Quatre ans se sont déjà écoulés depuis qu’Ethan Winters est parti en Louisiane à la recherche de son épouse Mia. L’annonce de Resident Evil Village, qui avait fuité peu avant, a surpris. Retour d’Ethan, Chris Redfield enlevant sa fille Rose, un château dans les Carpates et un village infesté de loups-garous… ce nouvel opus intriguait autant qu’il attirait. Mais que vaut cette nouvelle aventure concoctée par Capcom, qui tranche visiblement avec ses prédécesseurs pour proposer une expérience plus mystique, plus fantastique, avec ces hommes-bêtes, ces sorcières et ces vampires ?
Dès les premiers trailers, de nombreuses questions se sont posées. Qui est cette gigantesque Lady Dimitrescu, et que cache-t-elle dans son château ? Pourquoi Chris semble impliqué ? Qui est cet homme aux lunettes rondes qui semble s’amuser de la situation ? Et surtout, qui est cette Mère Miranda évoquée au détour d’une conversation téléphonique, et quel est le rapport direct entre ce qu’on nous a montré et la licence Resident Evil ? Rarement un titre de la licence aura autant attisé la curiosité des joueurs, qui attendent de savoir ce qu’il vaut. Pas de panique, dans une dizaine de minutes, vous saurez tout, enfin presque.
Conditions de test : Nous avons eu accès à une version review du jeu sur PS5 fournie par Capcom. Nous avons terminé l’aventure en 11 heures environ, après avoir complété l’histoire principale et une bonne partie des quêtes annexes réalisables dans un premier run. Le test ne tient pas compte du mode supplémentaire Mercenaries, qui se débloque à la fin du jeu et qui bénéficiera de son encart dédié.
Sommaire
ToggleCe n’est pas vraiment la fête au Village
Après une longue introduction dont nous vous épargnerons les détails pour éviter tout spoil, on retrouve Ethan Winters, perdu dans les montagnes de ce qui semble être les Carpates, à la recherche de sa fille Rose. Après quelques pas et moult bruits bien stressants, nous voici au village, élément tellement central dans ce Resident Evil que ce nom est accolé au titre pour former le VIII. On explore quelques maisons et soudain, on se rend compte que d’étranges créatures humanoïdes rôdent, prêtes à dévorer la chair de ce pauvre Ethan, qui en a déjà beaucoup trop vu trois ans auparavant.
Dès les premières minutes, Resident Evil Village pose son ambiance. Une ambiance crasseuse, délabrée, et froide, bien que moins effrayante que son prédécesseur. Et bon sang que c’est beau en 4K ray-tracing à 45 fps (il peut tourner en 60fps via les options) ! Le moteur RE Engine fait encore des merveilles, et a vraisemblablement encore été optimisé. Même dans une résolution inférieure, la sublime direction artistique du jeu fait le travail. Mais revenons à cette charmante bourgade, où tout essaye de vous tuer, sinon ce n’est pas drôle. Heureusement, on rencontre un groupe de survivants, mais, vous vous en doutez, tout va mal se goupiller pour notre héros sans visage. Premier objectif : s’infiltrer dans le château de Lady Dimitrescu. C’est alors qu’on fouille une première fois le village, comprenant que nous serons amenés à y retourner de nombreuses fois. Si vous avez des doutes quant à l’intégration de ce hub et à son intérêt tout au long de l’aventure, tranquillisez-vous.
Capcom a merveilleusement bien géré son affaire, et chaque visite permet d’accéder à de nouveaux lieux, à différents moments de la journée. Evidemment, de nombreux secrets ont été cachés, et il appartient au joueur de fouiller l’ensemble pour découvrir tout un tas de choses, qui vont des objets à collecter aux armes, en passant par des éléments de lore et quelques petits mystères sympathiques. L’ambiance, les adversaires, et les tâches à accomplir sont variés, sont de vraie réussite pour ce titre qui reprend la vue à la première personne et la prise en main de Resident Evil VII. Si vous avez joué à Resident Evil 4, vous retrouverez assurément quelques-unes des sensations de l’époque. Mais la proposition a été digérée par Capcom, qui parvient à aller plus loin, d’autant que contrairement à l’opus de 2005 (oui, déjà, ça fait mal hein ?), ce n’est pas qu’un « moment » du titre. Le village EST le jeu. On le redira, mais Resident Evil Village est un condensé de la licence, un vrai.
Une tension constante, un Resident Evil Village haletant
Resident Evil Village dure une bonne dizaine d’heures. Comptez 9 à 10 heures en ligne droite en jouant de façon classique, de 10 à 12 en faisant pas mal d’à-côtés, et plus de 15 heures pour les plus méticuleux. La rejouabilité est également au rendez-vous, avec de très nombreux défis à accomplir, incitant à relancer une partie en new game plus. Quelle que soit la durée de la partie, vous n’aurez que peu le temps de respirer. Entre combats, énigmes, explorations, recherche d’éléments liés au lore, il y a toujours quelque chose à faire, et Capcom gère très bien le rythme. On regrettera seulement une première partie qui semble bien plus longue que chacune des autres. On n’ira pas jusqu’à dire qu’elle s’étire trop, car ce n’est pas le cas, mais on sent un déséquilibre qui laisse parfois sur la faim. Qu’on soit bien d’accord, un seul des chapitres nous a semblé en dessous, trop scolaire pour qui a déjà joué à la licence.
Les changements de lieux, de thèmes et d’ambiances font mouche à chaque fois, portés par un sound design de haute volée, permettant à l’expérience de se renouveler jusqu’à la toute fin du titre, pleine de surprises. Et que dire du bestiaire, qui mélange au mieux tout ce que Resident Evil est capable de faire, et que l’on rencontre plus régulièrement qu’à l’accoutumée ? L’aspect action se développe d’ailleurs un peu plus qu’il y a quatre ans, sans jamais nuire à l’ambiance du jeu, bien au contraire. Créatures zombi-esques, monstres quasi-mythologiques, ennemis difformes et purulents, tout y passe, donnant un véritable sentiment de pot-pourri, sans que rien ne semble intégré au chausse-pied.
On a même le droit à de nombreux combats violents contre des élites, et contre de nombreux mid-boss pour rythmer le tout. En somme, la promesse faite par Capcom à travers sa communication est tenue, bien tenue même. Les boss disposent de designs et d’une mise en scène réussis, mais les grands affrontements sont très classiques, trop même. La difficulté réside ainsi bien plus dans le nombre de leurs points de vie que dans l’appréhension des patterns.
Vous êtes sans doute nombreux à vous demander comment Capcom a géré cette nouvelle aventure en termes de prise en main. Sur ce point, Resident Evil ne bouleverse pas les (nouvelles) habitudes de la licence. Les sensations de shoot sont identiques à celles de Resident Evil 7, à la différence près que la DualSense ajoute de vraies nuances dans la gestion des nombreuses armes accessibles. Les gâchettes adaptatives résistent plus ou moins en fonction de la pétoire, obligeant à adapter son approche. Cette approche, propre à la console de Sony, fonctionne très bien, mais on est ressorti de nos deux très longues sessions avec quelques raideurs au niveau des doigts. Dans l’ensemble, on imagine que ceux qui ont aimé la prise en main du précédent titre aimeront à nouveau, mais il y a peu de chance que les allergiques adhèrent à la proposition avec Village.
Le Duc, condition sine qua non de la progression
Pour renforcer la tension de Resident Evil Village, Capcom a purement et simplement supprimé les coffres. Les machines à écrire sont bien là pour sauvegarder, mais il faut toujours garder sur soi son équipement. Armes, potions, munitions, éléments d’améliorations, tout doit tenir dans l’inventaire ou être abandonné. Fort heureusement, le Duc, un étrange personnage, vous attendra un peu partout dans le village, prêt à récupérer vos sous pour vous fournir matériel et agrandissements d’inventaires. Il est même possible de lui vendre nos armes pour les racheter plus tard si besoin est.
Ce dernier n’hésitera d’ailleurs pas à rémunérer les joueurs, puisqu’il rachètera volontiers les babioles et autres trésors collectés en chemin. Pour le reste on reste sur du classique, à savoir un onglet permettant de créer des potions de soin et des munitions. Notez qu’il n’est plus possible de directement consommer les herbes, et qu’il faudra obligatoirement utiliser des fioles. Toujours contre monnaie sonnante et trébuchante, le Duc permet d’améliorer les statistiques de ses armes. L’ensemble coûte de plus en plus cher, mais heureusement, diverses pièces, cachées dans le village au sens large, permettent de passer outre.
Enfin, à un moment donné de l’aventure, le Duc proposera aux joueurs des recettes, qui permettent d’améliorer les statistiques d’Ethan de façon permanente. Le Duc servira également de guide à Ethan, puisque, sans qu’on sache trop pourquoi, il proposera son aide. Et on touche ici à l’un des principaux défauts du titre, puisqu’il brise d’un coup une partie de l’immersion. Capcom a visiblement peur de perdre ses joueurs. Très rapidement, il vous indique tout simplement tout ce que vous devrez faire, mettant à nu toute la structure de Resident Evil Village, son découpage, et ses enjeux. Heureusement, ce qu’on trouvera dans les différents chapitres reste mystérieux, permettant de retrouver rapidement un sentiment de découverte. Le titre est très bien pensé, et cet excès de clarté n’était absolument pas nécessaire. Dommage, mais loin d’être rédhibitoire. Capcom, ayez confiance en l’intelligence des joueurs !
Un gameplay équilibré d’un bout à l’autre
Si on demande à un joueur connaissant plus ou moins la licence de parler de Resident Evil, il évoquera sans doute les zombies, les monstres, l’ambiance, des personnages iconiques, des énigmes, et sans doute une entreprise pharmaceutique peu scrupuleuse. Tout en renouvelant régulièrement son ambiance, moins horrifique mais plus équilibrée pour soutenir sa narration et les phases de shoot, Resident Evil Village parvient à intégrer le meilleur de ce qui a fait la licence jusque-là, tout en conservant un rythme soutenu, à l’exception d’une petite partie pré-fin qui semble retarder l’inéluctable.
Sans réelles transitions autres que les passages par le village et par un étrange lieu de culte, on alterne entre phases les nombreuses de shoot, qui savent rester assez courtes, poursuites façon Mister X, affrontements uniques, explorations, énigmes et séquences développant le lore. Et quel que soit l’environnement, cette boucle se répète en se renouvelant à chaque fois. Ici, on est poursuivi par l’un des personnages, là, une créature nous traque sans relâche, tandis qu’ailleurs, une nouvelle énigme bien pensée fait son apparition. Aucune d’elles n’est difficile, mais les méthodes de résolution changent souvent. Contrairement à Resident Evil VII, qui redevenait très classique dans son approche une fois la maison des Baker quittée, Resident Evil Village parvient à garder une grande constance tout au long de l’aventure, pour une expérience plus équilibrée.
Une narration encore plus maîtrisée
Autre gros point fort du titre : l’ambiance est au service du gameplay. Comme elle évolue, on ne se lasse jamais. Le tout est d’ailleurs appuyé par une architecture qui varie assez pour que deux situations a priori similaires se jouent différemment et racontent de nouvelles choses. Il est souvent question de tirer ou de résoudre un puzzle, mais les déplacements et les lieux invitent à changer d’approche. Resident Evil Village parvient même à brouiller les pistes assez longtemps quant à la nature du mal qui ronge la zone et sur les intentions de Mère Miranda. Sans en dire plus, sachez que les fans de la licence sauront progressivement se raccrocher aux branches, grâce à une narration qui se dévoile petit à petit, tel un puzzle bien réalisé.
Il est d’ailleurs difficile d’évoquer l’histoire sans spoiler, tant les parties mineures et majeures du scénario sont liées. C’est pourquoi ce test évite volontairement de l’évoquer avec précision. Sachez cependant qu’on est dans un Resident Evil, avec tout ce que cela comporte au niveau des thèmes. Resident Evil Village, c’est de multiples petits scénarios, liés entre eux, qui se parcourent les uns à la suite des autres, avec un fil rouge qui lui ne se révèle qu’avec parcimonie. Capcom a réalisé un véritable effort, et si l’écriture reste loin de ce qu’il se fait de mieux aujourd’hui, la narration passe un cran et révèle une véritable maîtrise. Avec ce Resident Evil, Capcom parvient à amener la narration plus loin, de façon bien plus maîtrisée, pour notre plus grand bonheur.
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