Les rogue-like ne sont pas une denrée rare en ce moment, et les studios doivent donc redoubler d’imagination afin de se démarquer au sein de ce marché saturé. Rogue Lords a déjà pour lui sa direction artistique qui attire immédiatement l’oeil, d’un style burtonien réussi qui le rend facilement identifiable, mais ce n’est pas tout. Avec sa fonctionnalité unique de triche, le titre nous a montré au cours de nos deux précédents aperçus que ses mécaniques de jeu sont toutes aussi séduisantes que son look, et on attendait de voir si la proposition tenait sur la longueur avec le jeu complet. Et pour une fois, le Diable a tenu ses promesses.
Conditions de test : Nous avons pu jouer à Rogue Lords sur PC pendant plus de 25 heures réparties sur plusieurs semaines, après avoir déjà essayé la démo publiée il y a quelques mois. Malgré nos multiples tentatives, on doit bien confesser que l’on a pas encore réussi à obtenir les deux derniers personnages jouables (on entend déjà les huées, honte à nous), que nous n’évoquerons donc pas ici.
Sommaire
ToggleLa chasse aux humains commence
Même si on a déjà présenté le pitch du jeu en long et large à travers nos différents articles à ce sujet, une piqûre de rappel ne fait jamais de mal. Dans Rogue Lords, vous incarnez le Diable en personne, qui souhaite se venger de Van Helsing et des humains après l’avoir forcé à un exil qui a duré une décennie.
Vous envoyez alors votre armée de fidèles serviteurs répandre le chaos sur le monde, avec à sa tête vos lieutenants les plus connus, de Dracula à Bloody Mary en passant par Hecate. Puisque ce long dodo aux enfers a un peu rouillé vos capacités, votre retour sur Terre est plus expéditif que prévu, et il va falloir réunir plusieurs artéfacts (et tuer plusieurs lieutenants humains au passage) afin de pouvoir vous mesurer à nouveau au terrible chasseur.
Le titre adopte alors une structure à la Slay The Spire, dont l’influence est reconnaissable au premier coup d’oeil. Chaque recherche d’artéfact se divise en plusieurs chapitres, avec plusieurs activités et routes à choisir au sein de chacun d’entre eux, jusqu’à progresser jusqu’au boss final de la zone. Chaque activité correspond ainsi à une nuit, et il faut ainsi en traverser plus d’une trentaine pour voir le boss de chaque endroit.
Quel genre de Diable êtes vous ?
Les activités que vous rencontrez sont alors divisées en plusieurs catégories. On retrouve donc les combats, que l’on évoquera plus tard, les Fontaines du Styx pour se requinquer, les Pierres de sacrifice pour vous débarrasser d’une capacité, les marchands, et les événements. Ces derniers se présentent à la façon d’un jeu de rôle, ou des Livres dont vous êtes le Héros si vous préférez la référence, avec des choix à faire devant plusieurs situations, le tout avec une dose de chance indispensable pour bien s’en sortir.
On peut alors croiser des âmes en peine pour les corrompre, des chasseurs de démons que l’on peut piéger, des esprits que l’on peut hanter, bref, tout ce qu’un bon méchant doit faire pour servir son maître. Il est simplement dommage de voir que les événements ont tendance à vite tourner en boucle au bout de quelques heures, au point où l’on se désintéressera assez vite des dialogues – et de l’intrigue en général – bien que l’ambiance fasse son effet de bout en bout.
Si certaines actions reposent sur le hasard, avec des pourcentages de chance affichés concernant la réussite ou non de l’action, il est tout de même demandé de bien étudier l’événement avant de le lancer. Plusieurs caractéristiques sociales sont indiquées avant que l’on ne lance ce dernier, et orientent ainsi le choix du serviteur que vous allez envoyer faire l’action. Par exemple, il se peut qu’un événement demande une caractéristique de Ruse élevée (car un choix reposant sur cette capacité sera proposé dans l’événement). Il est alors conseillé d’envoyer le personnage de votre équipe ayant la Ruse la plus élevée afin de garantir votre réussite.
Mais rien n’est aussi simple dans Rogue Lords. Le serviteur que vous allez envoyer va obtenir des bonus suite à cet événement, comme des points de vie supplémentaires, des dégâts spirituels en plus, etc. Alors si on est vite tenté d’envoyer celui qui a le plus de chance de passer le « test », il faut veiller à garder une équipe équilibrée, et toujours faire en sorte qu’aucun des serviteur ne soit à la traine. Ce qui veut parfois dire qu’il faut prendre des risques pour « buffer » l’un de nos serviteurs, quand bien même il ne sera pas le plus efficace sur l’événement.
La terreur dans le coeur
Ceci n’est qu’un aperçu de la gestion de la balance risques / bénéfices que propose Rogue Lords. Et cette balance, il la gère à merveille, comme on peut le voir lors des affrontements. Là aussi, avant chaque combat (excepté ceux des boss ou des élites), il vous est demandé de choisir entre trois récompenses possibles.
Vous pouvez soit choisir d’obtenir une compétence en plus pour l’un de vos serviteurs, ou encore gagner des âmes (la monnaie du jeu), mais l’un des choix les plus intéressants reste celui de répandre la terreur durant les nuits suivantes. Lorsque vous arriverez aux nuits en question, vous obtiendrez des bonus non-négligeables, tout en augmentant la jauge de Terreur du jeu, qui vous fera gagner des artéfacts à chaque palier franchi. Ces artéfacts sont de la même facture que ceux de Slay the Spire, et peuvent agir sur les trois personnages de votre équipe ou sur un seul en particulier.
A l’inverse, les humains peuvent également inciter à la révolte et rendre certaines nuits plus difficiles que d’autres à l’aide de malus, ou encore d’embuscade. Ces dernières sont aléatoires et vous entraînent dans un combat plus difficile, la faute à des règles spéciales qui vous avantagent rarement.
Des serviteurs polyvalents
Mais bref, revenons-en justement aux affrontements, qui reposent sur un système classique de tour par tour. Les trois membres de votre équipe peuvent disposer jusqu’à 7 capacités chacun (hors recharge) que vous pouvez utiliser en dépensant des points d’action commun pour le groupe. Une fois ces compétences utilisés, il faudra les recharger à l’aide d’autres compétences spécifiques. Vos attaques peuvent alors soit viser les points de vie de vos adversaires, soit ses points d’esprit, et le but et de faire tomber l’une des deux barres à zéro avant de porter un coup final pour faire le ménage dans les rangs adverses. Ajoutez à cela des statuts aux divers effets, et vous aurez déjà un système de combat qui demande un peu d’exercice avant d’être pleinement assimilé.
Et c’est sans compter les spécificités de chaque personnage. Dans Rogue Lords, chaque serviteur est unique, avec des capacités complétement différentes de l’un à l’autre. Dracula est un buveur de sang, capable de voler les PV adversaires tout en étant le seul à pouvoir recharger les compétences de toute l’équipe d’un coup ; Bloody Mary peut placer son miroir derrière un ennemi pour lui infliger deux fois plus de dégâts ; Lilith devient plus puissante quand elle encaisse des coups, Hecate a différents pouvoir selon la rotation de la lune… Bref, tous les serviteurs ont leur propre identité.
Il y en a en tout 9 à contrôler, ce qui rend les champs des possibles assez dingue pour un jeu de ce calibre, et permet ainsi d’assurer une rejouablité exemplaire. En essayant ainsi toutes les combinaisons d’équipes possibles, en trouvant ses petits chouchous des enfers, et en testant les différents builds pour chaque personnage (car vous pouvez très bien orienter votre Dracula sur les dégâts physiques, ou sur les dégâts spirituels, par exemple), vous obtenez une durée de vie admirable.
Les dés sont pipés depuis le début
Et pour pimenter un peu la partie, vous pouvez également prendre votre rôle de Diable très à coeur et… Tricher. A l’aide d’une jauge qui représente vos points de vie, vous pouvez alors contourner les règles du jeu, en remontant par exemple les points de vie de vos serviteurs, en baissant ceux des adversaires, en changeant totalement de route, et bien d’autre fourberies.
Evidemment, le système est plus équilibré qu’il en a l’air, car si votre jauge atteint 0, c’est Game Over. Et c’est la seule façon de perdre dans le jeu, puisque vos disciples ne peuvent pas mourir. S’ils sont trop faibles et s’ils continuent à subir des dégâts, c’est votre jauge du Diable qui va en pâtir. L’avantage ici, c’est qu’entre chaque combat, vos disciples régénèrent complètement leur santé, donc il y a moins de gestion à prévoir de ce côté-là.
On en revient toujours à cette question d’équilibre, et c’est ce que Rogue Lords fait de mieux. Il est difficile de dire que le jeu n’est jamais injuste étant donné qu’une partie de son système relève du hasard, mais on aura presque toujours l’impression que ce sont nos mauvais choix ou notre mauvaise gestion des personnages qui nous a conduit à la défaite. Qui dit rogue-like, dit forcément échecs à répétitions, et il est vrai que tout aussi juste qu’il tente d’être, on reste parfois crispé à notre souris face à des boss qui provoquent un soudain pic de difficulté. Et cela ne nous empêche pas le moins du monde de vouloir retenter notre chance avec une nouvelle stratégie. Après tout, c’est bien connu, les serviteur du Mal aiment souffrir.
L’apprentissage dans la douleur
Cette potentielle frustration se ressent essentiellement dans les premières heures du jeu, étant donné qu’il y a beaucoup de mécaniques à assimiler avant de bien comprendre tous les rouages de Rogue Lords. L’échec sera votre apprentissage, à la dure comme on dit, mais on aura pas forcément refusé un tutoriel un peu plus clair sur les diverses activités (notamment sur le rôle des caractéristiques lors des événements et les statuts en combat) pour mieux nous mettre dans le bain. On regrette également que certains combats s’étirent en longueur et rendent certains runs interminables, sans doute la faute à certaines actions qui prennent du temps, malgré de jolies animations.
Il faut bien dire qu’esthétiquement parlant, le titre s’en sort de toute façon avec les honneurs. En dehors des PNJ qui se répètent à l’envie, le chara-design aussi réussi en 2D qu’en 3D, tout comme certains décors très réussis. Ces derniers manquent encore de variété (ce qui est assez inhérents aux jeux du genre il faut l’avouer), mais c’est surtout sur la carte principale que cela se fait ressentir. D’un chapitre à un autre, il y a peu de différences visuelles sur la « route » que l’on parcourt, et on a l’impression d’évoluer au même endroit de la première à la vingtième heure de jeu.
On appréciera au moins les remarques du Diable sur le chemin, grâce à un vrai effort sur le doublage, et ce pour tous les personnages (uniquement anglais, avec sous-titres français). Le travail sonore est également à souligner, avec des pistes discrètes signées par Laurent Courbier qui participent à nous immerger pleinement dans cet univers.
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