Lorsque Bandai Namco nous a annoncé que des anciens de la Team Tales Of, notamment ceux derrière Tales of Vesperia et Symphonia, s’essayaient à un nouvel action-RPG original, l’éditeur a attiré notre curiosité. Malgré ses airs de déjà-vu et les peurs d’un énième jeu très inspiré visuellement par la japanimation, au point même de lancer un projet cross-media avec un anime qui arrivera en juillet, Scarlet Nexus intrigue, notamment depuis que sa démo nous avait offert un premier contact satisfaisant. Une première impression qui se confirme aujourd’hui avec le jeu complet, car Scarlet Nexus est bien la bonne surprise de ce début d’été.
Conditions de test : Nous avons terminé le jeu une première fois en 25 heures, en effectuant l’histoire de Yuito et la majorité des quêtes annexes de personnages. Nous avons également joué une dizaine d’heures au scénario de Kasane pour constater les différences, en dehors du tronc commun qui lie les deux scénarios. Nous avons donc joué environ 35 heures, et ce sur PS5.
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ToggleDeux parcours similaires mais pas identiques
Le postulat de départ de Scarlet Nexus nous amène pourtant à penser que l’aventure sera relativement classique. Malgré sa description de « brainpunk », néologisme inventé par ses créateurs, on est clairement à la croisée des chemins entre les univers science-fiction et cyberpunk, entre un Psycho Pass et un Astral Chain. Cette dernière influence se traduit même dans la possibilité de jouer deux personnages différents, même si c’est ici bien plus intéressant que dans le jeu de PlatinumGames.
On incarne alors Yuito et Kasane, deux jeunes recrues de la BEA, une unité chargée d’éliminer les Autres, des créatures aliens qui naissent à partir de la Ceinture de l’Extinction qui englobe la planète. L’intrigue prend place dans un 2020 alternatif, où 99,9 % de la population possède des pouvoirs psioniques, qui sont justement bien utiles pour gérer la menace des Autres. Nos deux héros vont donc faire leur premiers pas dans cette unité, et si le tout ressemble à une colonie de vacances bien joyeuse au début, les choses ne tardent pas à dégénérer.
C’est là que Scarlet Nexus étonne une première fois. Le ton change bien vite au cours de l’aventure, et l’histoire prend un chemin que l’on ne pouvait imaginer au départ. Pas de spoils ici, mais l’intrigue se révèle être vraiment agréable à suivre, malgré quelques facilités et maladresses, et a même droit à quelques plot twists grâce à la séparation et au point de vue de ses deux personnages jouables.
Yuito et Kasane ne vont pas expérimenter les mêmes choses, et jouer avec l’un plutôt que l’autre permet de découvrir un point de vue sur une situation tout en occultant l’autre, laissant la porte ouverte à de nombreux mystères qui se résolvent lorsque l’on tente la deuxième aventure, à la manière d’un Resident Evil 2, pour simplifier. On en vient tout de même à se demander parfois s’il n’aurait pas mieux valu nous demander de jongler entre les deux héros plutôt que de tout recommencer.
Séance diapo pour tout le monde
Heureusement, le jeu a l’intelligence de mettre en place un tronc commun pour les deux intrigues en plus de tout expliquer ce qui s’y passe, afin de ne pas perdre celles et ceux qui n’auraient pas envie de recommencer le jeu avec l’autre personnage. La replay value du second personnage en est forcément impactée, mais les quelques scènes (et lieux) différents valent tout de même le détour pour les passionnés.
Dommage cependant que la majorité de cette histoire nous soit contée via des plans fixes façon visual novel, ou saynètes. Lorsque l’on voit les rares cinématiques du jeu, toutes très réussies, on regrette encore plus ce choix qui nuit au dynamisme de certaines scènes, même si le jeu essaye tant bien que mal de les afficher avec rythme. Sans doute un choix lié à des contraintes budgétaires plus qu’un choix artistique, mais lorsque l’on voit qu’un anime contant la même histoire sera diffusé prochainement, on ne peut s’empêcher de regretter que les efforts fournis dans cette adaptation n’aient pas été investi dans la narration du jeu en lui-même
Si Scarlet Nexus parvient à nous tenir en haleine, c’est aussi grâce à sa troupe de personnages. Si certains cochent les cases des stéréotypes (comme Shiden, suffisant et mal dans sa peau, ou Hanabi, l’amoureuse coincée en friendzone), tous se révèlent être attachants, et chacun d’entre eux à droit à sa propre histoire qui s’imbrique parfaitement dans le récit plus global. On se prend vite d’affection pour eux, et on a même l’occasion d’approfondir notre relation avec chacun d’eux entre deux missions.
L’amitié avant tout
Notre équipe dispose rapidement d’une planque qui leur sert de base, où ils peuvent interagir entre eux. Il est alors possible de leur donner des cadeaux et d’assister à des scènes spécifiques entre les personnages, pour en apprendre plus sur leur passé ou leurs passions. Cela ne vous rappelle rien ? Oui, on pense évidemment à la série Persona et son système de confidents.
Scarlet Nexus emprunte cette mécanique et l’utilise bien, puisque ces dits cadeaux vont par exemple servir à meubler la planque, tandis que l’augmentation d’affinité avec les personnages va servir en combat, comme on l’expliquera plus tard. On retrouve également un petit aspect craft pour la confection des objets, mais aussi de la personnalisation dans la tenue des héros, en dépit de beaucoup de costumes différents.
Histoire de remarquer l’influence jusqu’au bout, on ne pourra que souligner que la musique de la planque semble directement sortie de la bande-son de Persona 5. C’est loin d’être la seule piste qui évoque l’aventure des Phantom Thieves, puisque l’OST du jeu apporte souvent une petite touche jazzy à ses thèmes.
Si l’on a du mal à retenir une piste en particulier (en dehors de l’opening du groupe The Oral Cigarettes), l’OST de Scarlet Nexus fait mouche la plupart du temps, notamment contre les boss. A vrai dire, tout le travail sonore est à saluer, en particulier celui des doubleurs japonais. Le jeu se paye le luxe d’avoir un casting rempli de seiyus de premier ordre pour ses différents personnages, qui aident beaucoup à l’attachement que l’on peut avoir aux personnages.
Une direction artistique qui explore plusieurs horizons
Le titre met donc les petits plats dans les grands du côté de l’aspect sonore, et on aurait bien aimé qu’il fasse de même pour ce qui est de l’aspect visuel. Si Scarlet Nexus a été présenté comme l’un des premiers titres next-gen, il a bien du mal à être l’un des porte-drapeaux de cette nouvelle génération. C’est bien normal étant donné que le titre est également cross-gen, mais il est évident que Scarlet Nexus ne brille pas par sa technique, et ce malgré un framerate constant sur PS5 à 60 fps.
Même si le titre ne comporte que des zones relativement fermées constituées de couloirs (même les villes), le clipping s’en donne à cœur joie, avec une distance d’affichage des objets très limitée. On n’échappe d’ailleurs pas à quelques micros-bugs, qui ne sont pas dérangeants et qui pourront être corrigés avec un patch. Pas de quoi gâcher l’expérience mais on en attendait sans doute un peu plus du titre, surtout sur la nouvelle génération de console. De plus, cette limitation technique sur les environnements contraste fortement avec les modèles 3D des personnages, qui sont eux bien plus réussis grâce à un cel shading qui retranscrit bien la patte « anime » du titre.
On notera aussi une certaine dissonance entre l’aspect des humains et des Autres, ces créatures qui remplissent le bestiaire du jeu, et qui affichent un design pour le moins particulier. Entre machines, végétaux et éléments organiques, ces Autres portent à merveille leur nom et surprennent par la folie de leur direction artistique.
On doit cela à la vision de Masakazu Yamashiro, qui montre ici tout son talent pour nous présenter des créatures étranges et parfois dérangeantes, dont le design n’est parfois pas sans rappeler celui de certains démons dans la saga Shin Megami Tensei. Cet aspect « dérangeant » se retrouve aussi parfois dans les décors, avec certains lieux qui sortent vraiment du lot (on pense à un hôpital désaffecté qui offre une jolie séquence). Il est revanche dommage que le jeu nous entraine parfois à revisiter plusieurs fois ces mêmes endroits au cours de l’aventure, sans changement notoire entre chaque passage.
Des combats qui transpirent le style
Tout ce cadre est servi par le point le plus important de Scarlet Nexus, son gameplay. En vidéo, le titre prend des allures de beat’em all un peu bourrin, mais manette en main, on sent bien que l’on a affaire à un vrai action-RPG survitaminé, qui fait passer le genre à un stade supérieur.
La particularité du titre vient du fait que l’on contrôle deux personnages doués de psychokinésie, qui peuvent faire léviter les objets autours d’eux pour s’en servir comme arme. De fait, en plus des combos traditionnels à l’arme blanche (maniée elle aussi à l’aide de ce pouvoir), il est possible de lancer tout ce qui se trouve à portée de main sur nos ennemis. Voitures, rochers, poteaux électriques, lustres etc., bref, vous l’aurez compris, il y a de quoi s’amuser, d’autant plus que certains objets ont droit à des interactions spéciales sous forme de QTE pour rendre les attaques encore plus spectaculaires.
Toutes les découvrir est amusant, puisque l’on est parfois amené à monter un bus pour rouler sur des ennemis, ou à se servir d’un gros bloc en pierre plat pour faire un peu de surf aérien. On est également invité à bien scruter le terrain autour de soi pour, par exemple, lancer des bidons d’huile sur un ennemi avant de l’enflammer. C’est l’occasion de faire une rapide parenthèse sur l’utilisation de la DualSense sur PS5, qui exploite à merveille le pouvoir avec la sensibilité des gâchettes et les vibrations qu’elle offre. Un vrai plus qui est à souligner étant donné que l’on passe la majeure partie de notre temps à utiliser cette capacité.
Un gameplay qui s’affine avec le temps
Rien que ce pouvoir suffit à rendre le système de combat intéressant et dynamique, mais il gagne vraiment en profondeur avec le SAC, la technologique qui permet aux pouvoirs de vos équipiers de rentrer en résonance avec votre personnage. D’un simple raccourci, vous pouvez alors temporairement enchanter vos attaques avec des flammes, vous téléporter, vous rendre invisible, vous dupliquer et bien d’autres joyeusetés, et il faut alors jongler savamment entre ces capacités pour venir à bout des différents Autres.
Le système montre à quel point il est efficace contre les boss qui forcent à l’utilisation de certaines capacités, tandis qu’on s’amusera aussi à essayer certaines combinaisons lorsque l’arbre de talent nous aura permis d’utiliser plusieurs pouvoirs à la fois. Cet arbre permet de débloquer de très nombreuses capacités, permettant de faire évoluer le système de combat pour qu’il gagne en possibilités.
La puissance des neurones
Il s’approfondit d’autant plus lorsque l’on prend soin de nos coéquipiers, via le simili système de confidents que nous évoquions plus tôt. Chaque personnage possède six étapes de relation, et chacun de ses paliers va renforcer l’utilisation du pouvoir du personnage en question. A un certain niveau, il est même possible qu’une vision d’eux viennent protéger Yuito ou Kasane le temps d’une attaque, tandis que l’on pourra aussi effectuer une action spéciale avec leur aide, qui consommera de la jauge SAC pour effectuer une puissante attaque unique.
Rapidement, le jeu donne aussi à des pouvoirs supplémentaires comme une jauge de puissance qui, une fois remplie, donne accès à un boost pour enchaîner l’utilisation de la psychokinésie. On retrouve également le Brain Field, sorte d’état second dans lequel nos deux héros peuvent rentrer pour se servir de leur pouvoir sans limite, avec de gros dégâts à la clé. Mais attention, car cet état est limité, et c’est au joueur de veiller à l’arrêter à temps, car en cas d’utilisation massive, c’est game over.
Vous l’aurez compris, le gameplay de Scarlet Nexus est bien plus complexe qu’il en a l’air, et ce n’est pas cette profondeur qui l’empêche d’être une véritable feu d’artifice à l’écran. On le doit notamment à ces animations très chorégraphiées, lors des finish moves, qui rendent chaque élimination grisante.
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