Shiness est donc le premier jeu du studio indépendant Enigami basé à Lille. Après avoir récolté aux alentours des 140 000$ sur Kickstarter en 2014, Focus Home Interactive rejoint le projet quelques temps plus tard et éditera le jeu.
Condition de test : Nous avons testé une version Steam non finie du jeu. Même si les développeurs nous ont avertis de quelques bugs de collisions, nous n’en avons constaté aucun. De plus, nous avons attendu la sortie officielle pour obtenir le «Maherian pack» afin de juger cette option de doublage.
Sommaire
ToggleDragon ball, Naruto, Secret of Mana, et Sonic dans un mixeur
Quand les français de chez Enigami proposent un RPG aux influences nippones très prononcées, ils n’y vont pas avec le dos de la cuillère. Shiness nous emporte dans le monde de Mahera, une planète fragmentée en plusieurs îles flottantes où vivent plusieurs races. En plus des humains, vous avons les Wakis, et les Shelks. Ces êtres anthropomorphes nous rappellent facilement des univers similaires comme celui de Sonic, notamment les shelks qui ressemblent énormément aux Echidnas. Les conflits entre clans et territoires ne manquent pas et sont la toile de fond de ce jeu indépendant. D’ailleurs il est possible d’en apprendre plus sur le background à travers des choix de dialogues optionnels et des inscriptions disséminées qui laissent la possibilité au joueur d’en savoir un peu plus sur le contexte.
Car notre attention est essentiellement concentrée sur le périple de Chado, un jeune waki en quête des terres lumineuses. Quand son bateau volant s’écrase suite à une tempête de foudre, il fait la rencontre fortuite d’autres personnes ayant le même objectif que lui. En cherchant son ami et compatriote Poky après le crash, il croise donc la route d’une humaine nommée Rosalia et de Kayenne, un mystérieux Shelk qui veille sur cette dernière. Si l’on compte l’arrivée tardive de Askel, un mercenaire aux allures de Yamcha, nous avons notre équipe d’aventurier au complet.
Les allusions à Dragon Ball ne s’arrêtent pas là puisque Shiness s’inspire grandement de la référence en matière de manga shonen dans beaucoup de domaines. Que ce soit pour le reste des personnages ou le voyage initiatique parsemé d’embûches. D’ailleurs, la version Steam vous donne gratuitement accès à un manga en PDF qui est un préquel aux événements du jeu. D’une qualité plutôt bonne il faut l’admettre, on retrouve encore cette inspiration du shonen à travers une autre oeuvre bien connu. On y découvre un Chado quelque peu marginalisé par son village du fait qu’il parle à un être qu’il est le seul à voir. Le parallèle avec Naruto est aisément reconnaissable.
Malgré ces bonnes références, et d’autres du RPG japonais dans son côté heroic fantasy (comme Secret of Mana), vous n’allez pas faire de bons en avant concernant l’histoire. Certains personnages sont un peu trop stéréotypés et l’humour ne passe pas toujours. La quête de Chado est tout de même agréable à suivre de manière générale surtout quand on a gardé son âme d’enfant, toutefois le soft aurait pu gagner en identité en s’émancipant un peu plus de ses modèles.
Un RPG avec des combats équitables !
Par contre, là où il impose son style tout en étant en adéquation avec cette thématique du Shonen, c’est au niveau des combats. Nous sommes devant un hybride entre jeu de baston à la Naruto Ultimate Ninja Storm et un action RPG classique. Le tout se marie plutôt bien et les affrontements sont ultras dynamiques. Ces derniers sont exclusivement du un contre un et ressemblent plus à des duels d’arts martiaux qu’à de simples distributions de coups classiques.
On peut au moins reconnaître que c’est plus glorieux qu’un groupe de quatre personnes s’acharnant sur un ou deux pauvres ennemis. Coups de poing, coups de pied, esquives, parades, garde, les bases sont là, et le tout est agrémenté de différents combos et magies qui viennent enrichir les possibilités. Il faut un petit temps d’adaptation pour tout assimiler, d’autant que les ennemis ne vous laissent pas trop de répit, mais quand on s’y fait on prend un vrai plaisir à exploiter ce que nous offre le gameplay. La jauge de tension délimite nos actions physiques et de parade. Pour la recharger, vous devez donner quelques coups au corps à corps ou accessoirement vous en prendre même si ce n’est pas vraiment recommandé. Vous pouvez utiliser pleinement cette jauge pour déclencher des attaques ultimes (ou des «Hyper») qu’il vaut mieux user en guise de finish vu qu’une jauge de tension vide vous laisse pratiquement sans défense.
Ce système laisse également place à la stratégie via son système de Shi (la magie précédement évoquée) et d’affinité. Chaque personnage a un pourcentage d’affinité avec un des quatre éléments basiques (eau, feu, air et terre), qui influe non seulement sur les dégâts qu’il inflige en utilisant un sort, mais aussi sur sa défense. Ça tombe bien, il est possible de changer de personnage à tout moment ce qui permet de s’adapter à son opposant. Par exemple, un combattant qui a 100% d’affinité avec le feu sera insensible aux dommages provenant de ce même élément. Il est même possible d’utiliser des shi hybrides. Askel par exemple, avec son affinité du shi de l’eau et du shi de terre peut utiliser le shi des plantes.
Ces différentes compétences peuvent être apprises via les disciplines de shi, des parchemins de technique dont un personnage peut s’équiper. Pour débloquer la discipline de façon permanente, vous devez l’utiliser un certain nombre de fois. Même chose pour les combos au corps à corps. Pour finir dans le registre stratégie, nous avons les soutiens qui s’activent passivement après une asignation au préalable. Vous pouvez, par exemple préparer un soutien qui soigne quelques HP si votre vie tombe à 75, 50 ou 25% selon votre bon vouloir. Là encore, les combinaisons avec votre style de jeu peuvent s’avérer dévastatrices. Vous pouvez vous la jouer bourrin en boostant vos attaques drastiquement ou être plus dans une optique de contre offensive. On n’imagine pas une telle richesse du système au premier coup d’œil, mais on est agréablement surpris.
Au menu : îles flottantes
Malheureusement, la caméra capricieuse pourra vous causer quelques soucis. Les combats se déclenchent directement sur le lieu de rencontre avec l’ennemi, et certains passages étroits facilitent les mouvements de caméra pénibles surtout quand on accule son opposant contre un mur. Heureusement, vous pouvez rapidement recentrer avec le stick, mais ce n’est pas suffisant à de rares occasions. Ce qui nous amène à l’exploration, et cette dernière nous laisse un sentiment mitigé. Shiness propose un monde semi ouvert où l’on explore différentes îles volantes découpées en plusieurs zones. Si certaines offrent un sentiment de liberté agréable comme les premiers niveaux dont la grande plaine, d’autres sont extrêmement linéaires comme le parcours dans les montagnes enneigées. Les phases de plateformes sont occasionnellement savonneuses, et les énigmes sont un peu bébêtes pour la plupart.
Dommage, car le potentiel était là. Chaque personnage possède un don particulier lié au shi qui vous permet de progresser à travers certains obstacles. Chado peut créer des menhirs et s’en servir de poids, Askel peut user de son fouet pour activer des mécanismes éloignés… On trouve la solution des casse-tête très rapidement surtout quand le jeu nous tient par la main. Par exemple, on peut se poser un instant pour réfléchir et Kayenne nous sort un «Hey je peux déplacer tes menhirs avec mon pouvoir psychique tu te souviens ?». Certains mécanismes, à première vue énormes, laissent penser que le challenge sera de taille mais non, deux manipulations suffisent à en venir à bout.
Pour le reste, vous pouvez récolter différentes ressources sur la faune locale des nombreuses régions en étant discret ou en leur courant après. Vous pouvez ensuite les troquer à des marchands contre différents items ou tout simplement les vendre. Vous avez des objets consommables, de l’équipement, des nouveaux soutiens, et des disciplines. Par ailleurs, certaines disciplines s’obtiennent uniquement via des quêtes annexes, des quêtes de chasseur de prime ou bien en réalisant des défis qui se déclenchent aléatoirement durant les combats. Pour l’information, on apprécie l’ajout d’une monture qui permet de ne pas trop enquiquiner le joueur avec les quêtes basées sur des allers-retours récurrents. Tout ce contenu, en plus de l’intrigue, nous donne une durée de vie plus que correct, en particulier pour un jeu vendu une trentaine d’euros. Trente à quarante heures seront suffisants pour en venir à bout.
Univers bien rendu en images
Si techniquement, Shiness n’est pas fou, il profite d’un aspect visuel sympathique dans l’ensemble. Les décors sont jolis et colorés, en particulier les villages et les villes (la ville principale sur la baleine volante est tout simplement magnifique). En revanche, certaines zones sont affreusement vides, mais de nombreux panoramas retiendront notre attention. Pour le constater, des télescopes présents un peu partout vous permettent d’avoir un aperçu des zones dans une espèce de travelling montrant une vue d’ensemble. Le cell-shading et la direction artistique font leur effet et rattrapent les lacunes au niveau technique. Il est amusant de noter que les personnages principaux sont bien modélisés contrairement à certain PNJ qui prêtent à sourire (comme les enfants avec leurs énormes têtes ou quelques vieux avec de gros yeux écarquillés). La patte artistique se ressent également dans le chara-design et le bestiaire, même si ce dernier est peu fourni il faut l’avouer. Si le manga à une influence prépondérante, la bande-dessinée classique est aussi présente dans les cinématiques qui illustrent les instants importants.
Ces moments, où l’on peut bien voir l’expression des personnages ainsi que la ponctuation des répliques, sont l’occasion d’observer le doublage anglais qui est rarement dans le ton. Proposé de base dans le jeu, Shiness avait pourtant séduit avec une touche très originale lors de la campagne Kickstarter. Enigami avait carrément créé une langue spécialement pour le projet, le Mahérien. Heureusement, un DLC gratuit vous donne accès à cette option, et c’est bien mieux au niveau du jeu d’acteur même si on n’y comprend évidemment pas grand-chose. De plus, avec les voix anglaises, vous avez un décalage car les cris en combat utilisent le doublage « français » (Mahérien donc). Pour finir en musique, on peut saluer la très bonne bande son qui participe grandement au charme féerique du soft. On aurait juste aimé un thème de combat bien plus punchy.
Cet article peut contenir des liens affiliés