Disponible en accès anticipé sur PC via Steam depuis le 20 octobre dernier, Solasta: Crown of the Magister, le JDR tactique développé et édité par le studio français Tactical Adventures, sortira officiellement dès demain, le 27 mai. Plusieurs mois après nous avoir laissé sur un aperçu prometteur, ce titre parvient-il à se hisser au niveau des maîtres du genre ? Réponse dans ce test.
Conditions de test : Test réalisé sur un PC possédant une mémoire vive de 8 Go de RAM et équipé d’un processeur Intel Core i5-9400F (2,9 GHz) et d’une NVIDIA GeForce RTX 2060. Les versions 1.0.6 puis 1.0.13 du titre ont tourné en configuration Ultra en 1080p durant toute la phase d’essai. Celle-ci a duré environ 36h, temps nécessaire pour terminer la campagne principale en ligne droite, effectuer quelques quêtes secondaires et voir rapidement ce que l’éditeur de donjons avait à proposer. Cet article est garanti sans spoilers.
Sommaire
ToggleUne aventure au cœur des Badlands
Reprenant les codes de la très célèbre licence Donjons & Dragons, Solasta: Crown of the Magister se déroule un peu plus de mille ans après un Cataclysme qui a ravagé le monde de Solasta. Depuis ce funeste événement, de nouveaux États ont vu le jour et lorsque la Principauté de Masgarth découvre une route permettant de voyager « en sécurité » de son territoire jusqu’aux Badlands, une vaste et dangereuse zone abritant les ruines d’un ancien Empire, l’équilibre politique est bouleversé.
Afin de maintenir la paix en garantissant le partage des connaissances et des secrets cachés dans les Badlands, les différentes factions en place décident de former le Conseil des legs et d’engager des agents pour explorer les vestiges du passé pour le compte de cette nouvelle instance. C’est ainsi que les aventuriers affluent vers Caer Cyflen, capitale de la Principauté et siège du Conseil, dont les quatre que vous aurez au préalable créés au début de la partie.
Ne s’étant jamais croisé auparavant, ce petit groupe se retrouve à l’auberge du Fût du Fossoyeur dans le but de se voir confier une mission en apparence très simple : voyager jusqu’à l’avant-poste de Caer Lem qui ne donne plus de nouvelles depuis plusieurs semaines. Bien entendu, les choses vont très vite se compliquer. Qu’est-ce qui attend cette fine équipe ? À vous de le découvrir.
Bénéficiant d’un pitch de départ accrocheur sur le papier, la campagne principale du jeu s’avère assez plaisante à suivre du début à la fin. L’univers à la sauce D&D est plutôt bien exploité, notamment grâce à un bestiaire d’ennemis fourni, et votre périple vous emmènera dans des contrées semi-ouvertes variées à explorer où le danger peut surgir à chaque instant.
Malheureusement, il faut bien avouer que la dimension narrative n’arrive pas à la cheville de certaines franchises phares s’inspirant des JDR comme Divinity: Original Sin et Baldur’s Gate. L’écriture d’ensemble ainsi que celle de la plupart des personnages manque de profondeur et les quêtes secondaires, très lambdas, ne sont pas particulièrement intéressantes.
Quant au système de choix, il est simpliste, ce qui restreint considérablement notre liberté de progression. La majeure partie du temps, il ne vous servira qu’à en apprendre un peu plus sur le lore et à avancer en tentant d’user de la voie diplomatique plutôt que celle des armes et tout ça pour n’aboutir qu’à une seule et unique fin (en tous cas, s’il en existe d’autres, elles sont fichtrement bien cachées).
Même s’il peut être amusant de recommencer une partie dans le seul but de profiter de quelques lignes de dialogue inédites et d’un gameplay différent en modifiant le background des personnages, la rejouabilité du titre paraît très limitée pour le genre. C’est décevant.
Du roleplay à foison
A défaut de proposer une narration riche et des choix à la hauteur de ce qu’on est en droit d’attendre d’un JDR tactique, Solasta: Crown of the Magister intègre une dimension roleplay maîtrisée.
Comme mentionné précédemment, vous devez créer quatre personnages avant de commencer la partie. Pour chacun d’entre eux, il faut décider de son ascendance (Nain des collines ou des neiges, Demi-elfe, Humain, Haut-Elfe ou Elfe sylvain, Halfelin des marais ou des îles) qui déterminera la base de son apparence et aura un premier impact sur ses statistiques, de sa classe (Clerc, Guerrier, Paladin, Rôdeur, Roublard, Magicien) qui lui octroiera des attributs spécifiques et l’équipement de base qui peut lui être assigné, de son passé (Universitaire, Acolyte, Aristocrate, Justicier, Vaurien, Philosophe, Mercenaire, Espion) qui affectera notamment sa personnalité, son caractère et sa manière de s’exprimer, de ses caractéristiques (force, dextérité, constitution, intelligence, sagesse, charisme), de ses pouvoirs ou de son style de combat et de ses stats de maîtrise.
Celles-ci regroupent de nombreuses compétences (athlétisme, perception, discrétion…) dans lesquelles vous pouvez investir des points, ce qui aura des répercussions sur vos jets de dés, certains dialogues et options de craft. Notez que c’est également sur cet écran que vous déciderez des langues parlées et comprises par vos aventuriers et que s’afficheront les dons que vous pourrez acquérir en gagnant des niveaux grâce à l’XP accumulé.
Mais le roleplay ne s’arrête pas là. En jeu, vous devrez aussi faire attention au poids de votre inventaire qui est spécifique à chaque membre de votre groupe ainsi qu’à bien gérer le loot récupéré car celui-ci vous sera d’une aide précieuse pour survivre.
Armes, armures, munitions, ingrédients, potions, il y a de quoi faire d’autant plus que rapporter certains objets uniques trouvés dans les Badlands vous permettra d’améliorer les relations diplomatiques avec les différentes factions du Conseil. Plus elles seront positives, plus vous aurez accès à de la marchandise rare voire très rare. Toutefois, ne vous attendez pas à obtenir ces articles gratuitement et préparez-vous à devoir envoyer les pièces d’or.
Enfin, acheter ou récupérer des vivres sera indispensable pendant votre périple. On le répète, le titre ne propose pas de monde ouvert mais des zones semi-ouvertes plus ou moins vastes. Il faudra donc plusieurs jours de marche pour vous y rendre en fonction du rythme imposé au groupe. Pendant le voyage, vous pourrez vous faire attaquer par des ennemis de jour comme de nuit et, tous les matins, vos compagnons auront besoin de se nourrir pour terminer leur repos long.
Cette mécanique, à laquelle vous aurez aussi accès de temps en temps à certains endroits symbolisés par des feux de camp, est la seule capable de restaurer automatiquement la totalité des PV et des compteurs de sorts de votre équipe.
Sachez que des repos courts sont également disponibles dans n’importe quel lieu jugé sans risque. Ils vous donneront la possibilité de regagner quelques emplacements de sorts ou de lancer des dés de vie afin de regagner un peu de santé mais, bien évidemment, ils resteront moins efficaces que les repos longs.
Vous l’aurez compris, les développeurs de Tactical Adventures ont fait de gros efforts pour que la dimension roleplay tienne la route. Même si on regrette que de rares caractéristiques et langues ne soient pas utilisées dans la campagne et que quelques options de personnalisation du créateur de personnage soient plus pauvres que d’autres (choix des visages et des voix notamment), on peut considérer que cet aspect du titre est une réussite.
Des affrontements stratégiques où les dés sont rois
Malgré la présence d’un système de progression générale trop limité pour le genre, Solasta: Crown of the Magister a le mérite d’offrir une vraie liberté d’approche dans les combats. Puisant ses inspirations à la fois dans la série XCOM et les règles SRD 5.1 de Donjons & Dragons, les affrontements au tour par tour imaginés par le studio français sont intéressants, variés et stratégiques.
En fonction des nombreuses caractéristiques et compétences des personnages, de leur équipement, de l’agencement de la map et des ennemis qu’ils affrontent, une passe d’armes ne sera jamais identique à une autre. De plus, l’interface utilisateur est suffisamment bien conçue pour ne pas trop surcharger l’écran d’informations. Contrairement à Divinity: Original Sin II, on parvient facilement à savoir où aller pour effectuer telle ou telle action. C’est vraiment très agréable.
Qui plus est, au fur et à mesure de la partie, on a l’impression d’assister à une vraie montée en puissance de nos aventuriers. Les débuts sont donc très frustrants car l’IA des adversaires n’est pas stupide et les jets de dés ratés peuvent vite s’enchaîner même en essayant d’appliquer la meilleure tactique possible. Mais ces mauvais moments où la chance semble vous avoir complètement abandonnés sont nécessaires pour progresser.
Plus on avance, plus notre groupe s’améliore et plus il est armé pour survivre. Jamais le dicton « De zéro à héros » n’aura eu autant de sens que sur ce point et se rapprocher du dénouement en boostant les réussites standards et critiques tout en faisant preuve de réflexion est un régal.
Cependant, au cours de nos 36 heures de jeu, on a constaté que le level design n’offre pas autant d’interactions avec l’environnement qu’on pouvait l’espérer, sans compter que les dégâts qu’elles provoquent sont faibles.
Notez aussi que les combats souffrent de quelques aberrations de conception. Par exemple, manquer son tir en utilisant une flèche ou un carreau empoisonné infligera tout de même des dégâts (ça n’a aucun sens !), attaquer un adversaire situé en hauteur depuis le sol ne provoque aucun désavantage sur nos jets et, s’il y a une vraie différence entre une réussite et une réussite critique, celle entre un échec et un échec critique, si tant est qu’elle existe, n’est pas visible. C’est dommage.
Jet de Finition : échec. Tactical Adventures relance le dé et…
Il est temps de conclure cette critique en parlant du soin, ou plutôt du manque de soin, apporté à Solasta: Crown of the Magister. Outre une réalisation générale (graphismes, modélisations, mise en scène…) qui ne restera pas dans les mémoires, même si ce n’est pas non plus catastrophique, le titre souffre d’un gros manque de finition difficilement acceptable, surtout pour une production qui a passé plusieurs mois en accès anticipé pour se peaufiner.
Attention, il est important de préciser que Tactical Adventures a parfaitement conscience de l’existence de la plupart de ces problèmes et de la qualité passable de la réalisation de son jeu. En conséquence, le studio français a promis qu’un gros patch devrait venir corriger et améliorer tout ça au moment de la sortie. Espérons juste que la mise à jour en question n’était pas celle d’un peu plus de 8 Go qui a été déployée pendant le test car, même si elle a permis de rendre l’expérience légèrement meilleure, c’est clairement insuffisant. Croisons les doigts !
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