Lorsque l’on pense open-world sur Switch, difficile de faire l’impasse sur les productions made in Nintendo, qui sont les seules à avoir vraiment brillé dans le genre. Non pas que nul autre que la firme au plombier moustachu ne se soit essayé à cet exercice, mais il faut dire ce qui est : la console hybride n’est pas un étalon, et devoir affronter de basses résolutions et des problèmes techniques divers sur de vastes mondes ne fait guère rêver le joueur lambda. Nintendo s’en est extraordinairement bien sorti avec ses Zelda, qui démontrent d’un savoir faire certain et de moyens significatifs. Le plus souvent, les mondes ouverts dont bénéficie la console se trouvent être de simples portages de titres assez vieux pour y tourner sans trop d’encombres. Pourtant, personne ne l’avait vu venir, Star Overdrive n’a pas l’intention de faire les choses à moitié.
Exclusivité console Switch sortant en parallèle sur la plateforme Steam, le titre de Caracal Games, à qui l’on ne doit rien de bien mémorable si ce n’est un jeu Game Boy paru en 2023 (quelle mode étrange), Star Overdrive se présente, à première vue, comme un ambitieux open-world. Mais ambition s’accorde rarement avec Nintendo Switch, comme vu plus tôt, et il va sans dire que, à l’annonce de ce titre allant plutôt à contre-courant, les esprits se sont échauffés. On imaginait facilement que les premières images de gameplay délivrées provenaient de la version Steam, et que chez Big N les ralentissements et autres problèmes techniques seraient légion. Pourtant, il a bien fallu se rendre à l’évidence avec la sortie d’une démo jouable convaincante : Star Overdrive semble avoir de sérieux atouts à faire valoir, même sur Switch.
Conditions de test : Nous avons passé un peu moins de vingt heures sur la version Nintendo Switch du titre, autant sur TV qu’en portable via une Switch Lite. Ce test est garanti sans spoiler majeur.
Sparadrap
Autant dire les termes dès le début pour éviter d’y revenir par la suite, crever l’abcès comme on dit : oui Star Overdrive souffre de quelques ralentissements sur Nintendo Switch, et parfois même de saccades lorsqu’on lui en demande beaucoup. Néanmoins, et nous sommes les premiers surpris, il se révèle la plupart du temps d’une solidité surprenante. Non pas qu’il soit le jeu le plus impressionnant du support, palme qui reviendrait probablement à Metroid Prime Remastered, Xenoblade Chronicles 3 ou The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom, mais il faut bien lui reconnaître un univers et des performances rapidement convaincants. A fortiori dans la mesure où son monde jouit d’une topographie qui en met plein la vue.
Star Overdrive nous met dans la peau de Bios, un jeune homme féru de glisse ne se séparant jamais de son hoverboard et de son keytar (ambiance 80’s garantie), dont le vaisseau s’écrase sur une planète extraterrestre inconnue. Votre but n’aura rien de bien original, puisqu’il s’agira de découvrir et comprendre les secrets que renferme cet espace désolé, et bien sûr trouver un moyen de repartir. Quant à la recette, on pourrait grossièrement la comparer à celle d’un The Legend of Zelda : Breath of the Wild, en plus contenue néanmoins, et avec un petit twist très sympa.
Ce twist, c’est la présence, on en parlait plus haut, d’un hoverboard. Une planche qui permet à notre héros de glisser sur tout et n’importe quoi, mais aussi d’effectuer différents tricks en l’air, pour un résultat qui, sans aller jusqu’à concurrencer ce bon vieux Tony Hawk, apporte tout de même un vrai vent de fraîcheur à cette aventure. On prend plaisir à se déplacer dans ce monde aux teintes très orangées, et le Level Design dans son ensemble est pratiquement inattaquable, si l’on exclue les quelques phases de plateforme qui s’avèrent perfectibles. Notamment parce que celles-ci manquent parfois de lisibilité, souffrant d’une appréciation des distances qui peine un brin.
Votre hoverboard, vous avez toutes les armes pour l’améliorer, par-dessus le marché, pour lui conférer de meilleures statistiques (et pas seulement liées à sa vitesse de pointe). Pour ce faire, il va toutefois falloir passer par de la collecte de ressources, assez générique, et par un menu auquel on ne comprend, dans un premier temps, pas grand chose. Par la suite, on s’approprie un peu mieux ce système, surtout à force d’expérimentation. Mais il faut reconnaître qu’il demeure un brin opaque, même avec le temps et les essais, ce qui gagnerait à être revu.
On apprécie toutefois la possibilité, qui vient compléter un ensemble déjà assez séduisant sans cela. Star Overdrive offre de bonnes sensations de glisse, et peut mener, à force d’améliorations, à une vitesse et une maniabilité exemplaires, auxquelles s’ajoute un espace de jeu assez vaste. Quoique loin d’égaler celui de la plupart des open-world contemporains. Son monde est grand, certes, et on met du temps à le parcourir d’un bout à l’autre, mais il ne rivalise pas avec les ténors dont il s’inspire. Ce qui n’est pas un mal, entendons-nous bien, d’autant que le titre n’aspire pas à plus que ce qu’il est en mesure de proposer.
Ce qu’on devine d’un prix plutôt honnête, proche des 35 euros, le tout pour une durée de vie oscillant entre quinze et vingt-cinq heures, selon que vous préfériez foncer vers la fin du jeu ou explorer plus en profondeur ses environnements. Star Overdrive n’en fait pas trop, et même ses systèmes ne vont jamais trop loin, avec par exemple un arbre de compétences très basique, jamais surprenant, mais qui rempli parfaitement son office et aura le mérite supplémentaire de ne jamais perdre le joueur, même néophyte. Pourquoi chercher plus loin, finalement, quand la simplicité fonctionne à merveille ?
Dune
Des récents Zelda, Star Overdrive reprend une vague structure, qui consistera en premier lieu à la trouvaille de tours pour dévoiler les points d’intérêt alentour. Un petit air de Far Cry et d’Assassin’s Creed, heureusement vite balayé par la proposition, qui nous mène à résoudre de petites énigmes très appréciables, parfois un brin ardues, et à explorer de petits espaces souterrains qu’on rapprochera instinctivement des sanctuaires de Breath of the Wild. Il faut dire aussi qu’on en ressort avec un point de compétence, comme dans les aventures de Link. Dans une certaine mesure, il semble aussi leur emprunter leurs longs temps de chargement au lancement.
Mais ce que l’on retient le plus, c’est l’ambition sur le plan graphique. Le développeur de Star Overdrive ne peut assurément pas se targuer des mêmes moyens techniques qu’un studio first party de chez Nintendo, pourtant il faut reconnaître à ce monde et ce qui l’entoure un cachet qui fait mouche. Ses tons pastels lui confèrent une identité bien à lui, soutenus par une bande son singulière, tantôt portée par une volonté de poser une ambiance calme et reposante, tantôt habitée par un Rock’n Roll un peu basique mais fonctionnant bien. On se sent bien sur cette planète extraterrestre, et sa gestion des ombres surprend pour le support, autant que l’impression de vitesse, même si celle-ci est parfois atténuée par les petits problèmes techniques cités plus tôt.
Dommage que le titre souffre d’un certain sentiment de redondance sur la durée, dû à un schéma de progression qui ne se renouvelle que trop peu, malgré quelques tentatives plaisantes. Il est, par ailleurs, souvent question de faire la même chose, notamment allumer des générateurs pour faire fonctionner une machine ou ouvrir un passage. Heureusement, le moyen de parvenir à ses fins change parfois, atténuant ce sentiment de redite. Sentiment qui, de toute façon, touche tous les jeux du genre. Star Overdrive ne pouvait pas opter pour une proposition contenue, et espérer offrir variété et dépaysement constants.
Mais ce qu’on regrettera le plus de cette aventure, c’est assurément tout ce qui lui manque. Un scénario, pour commencer. Parce que si le jeu essaie de se la jouer « découverte d’un espace étranger » et « souvenirs enfouis d’un être aimé », le résultat est loin d’égaler ce qu’on trouverait chez la concurrence, et on s’en détache facilement. Heureusement pour lui, ce récit jouit d’une mise en scène plutôt inspirée, qui compose finalement son plus grand atout, surtout quand il s’agit de singer le cinéma. Dune n’est jamais bien loin, par exemple.
Plus problématiques, les combats sont assez difficiles à décrire, mais globalement plutôt mauvais. On s’en sort, en faisant un peu n’importe quoi et en usant des pouvoirs très sympathiques qui nous sont délivrés au fil de l’aventure. Mais il faut reconnaître que le tout manque autant de précision que de sensations, pour un résultat global qui fait un peu tâche. Dommage, car c’est finalement la seule vraie ombre au tableau, le jeu pouvant parfaitement s’apprécier sans histoire, tant sa proposition est sympathique et son enchaînement d’activités engageant.
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