Depuis longtemps et plus que jamais, les jeux estampillés Mario constituent une part importante du catalogue maison de Nintendo, tant pour le plus grand plaisir des fans du plombier moustachu que pour la fatigue des détracteurs lassés de cette omniprésence. Un sentiment qui ne risque pas de changer puisqu’à l’horizon se profilent les sorties des remakes Super Mario RPG, Mario vs Donkey Kong ou encore Paper Mario : La Porte Millénaire.
Des difficultés à se renouveler ? Peut-être, et c’est d’autant plus vrai du côté de la branche plateforme 2D, paradoxalement le cœur de la série. À l’exception des très bons Mario Maker, davantage bacs à sable géants qu’épisodes « canons », la série restait orpheline d’une véritable aventure inédite depuis New Super Mario Bros. U. Son portage Switch avait d’ailleurs fini de réchauffer cette recette « New » démarrée… sur DS en 2006.
Annoncé cet été, Super Mario Bros Wonder arrive donc le 20 octobre avec cet objectif de donner un coup de fouet à cette formule 2D. Objet d’un aperçu fort réjouissant, le titre confirme haut la main les espoirs qu’il a pu susciter.
Conditions de test : Nous avons joué à Super Mario Bros. Wonder durant près de 20 heures, le temps de terminer le jeu à 100% puis de tester les fonctionnalités en ligne au cours de sessions organisées par Nintendo. Nous avons joué au jeu sur Nintendo Switch OLED, principalement en configuration dockée.
Sommaire
ToggleBowser engraine le Royaume des Fleurs
Que serait une aventure vécue par Mario sans Bowser et son désir de surpuissance ? Eh bien c’est certainement ce que doit se dire l’adversaire historique du héros à la casquette puisque non content d’avoir suffisamment semé le chaos au sein du Royaume Champignon, il décide cette fois de s’en prendre à celui des Fleurs. Gouvernée par le petit prince Florian, une sorte de mini-Wiggler terriblement chou, la contrée voit donc sa quiétude chamboulée au beau milieu d’une fête lorsque le roi des Koopa subtilise une fleur aux pouvoirs colossaux.
Désormais fusionné avec le château du royaume, Bowser se dresse fièrement au-dessus des Îles florales, protégé par des nuages Piranha maléfiques. Seules les puissantes graines royales, dispersées aux quatre coins du pays, peuvent affaiblir la barrière et permettre à la bande de Mario d’aller refaire une fois encore le portrait au « papounet » de Bowser Jr, lui aussi impliqué dans ce sombre dessein (on aurait été étonné de l’inverse).
Et pour mettre la main sur ces graines, Mario va devoir arpenter les sept régions composant le Royaume des Fleurs. Guidé dans son aventure par le prince Florian, le plombier moustachu va y rencontrer de nouveaux personnages : les Poplin. Ce peuple floral ressemble aux Toad à la différence que, à la place d’un champignon, c’est un bourgeon qui se dresse au sommet de leur tête. On les croisera régulièrement au cours de notre avancée à travers les mondes liés par la traditionnelle World Map.
Cette manière de voyager entre les stages et les régions rempile donc fort logiquement pour cet épisode en bénéficiant de quelques nouveautés, comme la possibilité d’arpenter des zones semi-ouvertes où compléter les parcours se réalise dans un ordre libre. La progression va tout de même devoir passer par le déverrouillage d’étapes-clés grâce à un montant donné de graines prodiges, collectées au sein des parcours. Aussi, des niveaux dissimulés, des chemins alternatifs et bien d’autres petites curiosités sont à découvrir sur cette carte qui, de surcroit, s’avère plus rayonnante et vivante que les opus précédents. Un constat faisable également au sujet des niveaux en eux-mêmes.
Un monde florissant
Il ne suffit que de quelques écrans pour constater la volonté de Nintendo de transmettre au public une sensation de neuf et de vie à l’écran. Le léger lifting de la direction artistique se ressent et les environnements très colorés enchantent. L’arrière-plan, censé amener du corps au décor, dispose même parfois de quelques animations selon le monde dans lequel on se trouve. Et comme d’habitude, chaque région possède son identité visuelle avec notamment les traditionnels mondes glaciaire, aquatique ou bien désertique pour ne citer qu’eux. Toutes ces zones amènent en plus leur lot d’ennemis et d’effets environnementaux spécifiques, de quoi susciter un réel sentiment de nouveauté chaque fois que l’on en découvre une inédite.
La musique s’adapte encore une fois très bien à l’image et participe au dynamisme de l’aventure. Déjà en collant elle aussi à ces diverses thématiques de mondes et à l’ambiance qu’elles peuvent dégager, mais également en fonction de ce que fait Mario. S’il ne bouge pas, certains instruments restent en retrait, et en se mettant à courir, ils reviennent mettre du peps. Lorsque notre héros se trouve en arrière-plan après être entré dans un tuyau, la mélodie s’efface légèrement en donnant l’impression d’être écoutée de loin. Enfin, dès qu’il se transforme en éléphant, les trombones viennent donner un petit côté balourd amusant à la musique.
Histoire de rajouter encore un peu de relief à cette ambiance, des fleurs cancans nous interpellent très régulièrement au cours des stages. Elles donnent des commentaires sur ce qui se passe à l’écran ou autour d’elles, et leur intervention s’effectue souvent avec humour, voire avec un brin de méta en ayant l’impression qu’elles s’adressent autant à Mario qu’à nous. On les trouve parfois à des endroits ou dans des situations improbables. Bref, elles remplissent le rôle de gag régulier tout au long de l’aventure, même s’il arrive qu’elles soient plus sérieuses en nous encourageant par exemple.
Alors, de notre côté, nous sommes plutôt enthousiastes envers cette nouvelle présence. Cependant, il est certain qu’elles risquent de casser les oreilles ou d’en lasser pas mal, surtout qu’à chaque fois que l’on passe devant la même fleur, elle répète son message. Bien heureusement, les développeurs ont pensé à la possibilité de couper soit leur voix, soit leur texte, soit les deux, afin d’être tranquille pour les moins patients. Quoi qu’il en soit, de ces petites fleurs naît un ton décalé bienvenu bousculant gentiment le schéma des légendaires interjections des personnages de la série. D’ailleurs, parlons de ce fameux passage de témoin entre Charles Martinet et Kevin Afghani pour les voix de Mario et Luigi. De ce que nous avons entendu, la transition s’effectue vraiment en douceur et on s’habitue déjà à ce nouveau comédien de doublage qui veille à rester au plus proche du travail de Martinet.
Un gameplay plus solide que jamais…
Si on ne tarde donc pas à être emballé par l’enrobage global de ce Mario 2D, on peut en dire autant manette en main. Aidée par une maniabilité au poil, chaque traversée de stage amène sa dose d’émerveillement tout en participant au renouvellement constant de l’expérience. Une multitude de blocs à activer, de nombreux bourgeons colorés à toucher pour faire apparaître moult secrets ainsi qu’une belle quantité de créatures inédites, Super Mario Bros. Wonder livre des niveaux riches et brillamment construits. L’agencement du décor, des éléments interactifs et des ennemis permettent tout autant une traversée du niveau à grande vitesse qu’une découverte plus posée de toutes ces petites curiosités disséminées ici et là.
Un bloc situé très haut et un Koopa placé juste à côté suggère de récupérer sa carapace et de la jeter vers le bloc pour l’activer. Sauf que cette même carapace peut aussi faire l’objet de la légendaire technique de la boule de bowling pour déblayer le chemin juste à côté. D’autres ennemis, que l’on esquive simplement dans un premier temps, constituent à diverses occasions une solution pour atteindre un endroit ou un collectible, lorsqu’ils ne le font pas carrément à notre place. Deux exemples parmi tout un tas d’autres qui traduisent une grande science du level design, caractéristique d’une série experte en la matière, s’il fallait encore le prouver.
Cette science prend davantage d’ampleur grâce aux nouveautés qu’apporte la nouvelle aventure du plombier. Les fameuses transformations remplissent à nouveau très bien leur rôle, en notant bien évidemment celle de l’éléphant. Disposant d’un gros gain de masse, Mario peut pousser plus facilement des structures et arrive à se débarrasser en un saut de certains ennemis plutôt costauds. Il dispose également d’une trompe capable de faire valser blocs et ennemis mais aussi de stocker de l’eau et d’arroser des graines aux effets variés une fois écloses. Seulement, l’éléphant n’est pas la seule transformation inédite.
Parlons également du chapeau foreuse, permettant d’attaquer les ennemis par-dessous, ou bien en surgissant du sol et même carrément en sortant du plafond. Il va sans dire que la traversée de certains niveaux se transforme catégoriquement avec la foreuse, et que les développeurs ont su placer des secrets en conséquence de cette verticalité. Mario bénéficie également d’une transformation lui permettant de tirer des bulles, tout autant redoutables pour la plupart des ennemis qu’utiles pour grimper en constituant des plateformes de fortune. Cerise sur le champignon, les projectiles traversent même les murs histoire d’atteindre ce qui ne peut l’être autrement.
… Où bourgeonnent surprises et variété…
Mais ce qui va définitivement insuffler un peu de folie et de variation aux niveaux restent sans conteste les fleurs prodiges. Plus ou moins cachées, en toucher une déclenche une séquence au cours de laquelle les règles du niveau changent temporairement, le tout souvent accompagné d’une métamorphose visuelle et musicale, qui se termine à la récupération de la graine prodige associée. Parmi les effets rencontrés, les tuyaux finissent par prendre vie, une pluie d’étoiles d’invincibilité tombe afin de nous rendre surpuissant ou encore un rodéo sur un troupeau de Coursératops nous fait traverser le niveau à toute vitesse. Et des dizaines d’autres situations étonnantes attendent d’être vécues.
Certaines fleurs transforment même physiquement Mario en lui conférant de nouvelles facultés, de quoi vivre grâce à chacune d’elles une séquence de gameplay inédite. Ainsi, tout au long du jeu, on alterne entre la surprise et l’éblouissement d’un effet de fleur prodige découvert, et la vive curiosité de ce que la prochaine va nous offrir. Clairement inspirées et récréatives, ces séquences constituent l’une des principales forces de cet épisode.
Le sentiment de renouvellement s’exprime aussi tout simplement par la pluralité des types de parcours. On ne se cantonne plus à traverser continuellement un niveau d’un point A à un point B et hisser le drapeau de fin de parcours. Certains stages nous proposent par exemple de participer à des intermèdes musicaux ou des petits challenges de plateforme et de collecte. D’autres mettent même à profit la coopération entre les joueurs. Une fois encore nous n’en dirons pas trop mais d’autres déclinaisons sont à découvrir et font de cet opus une aventure à l’abri de la monotonie.
Super Mario Bros. Wonder livre un éventail de niveaux plus variés, plus recherchés, mais aussi plus courts. On a le sentiment de passer très peu de temps dans ces stages et même d’en réussir assez facilement la grande majorité. Ces derniers s’avèrent généreux en termes d’objets spéciaux, en sachant que l’on dispose à nouveau d’une réserve dans laquelle on peut piocher un objet stocké afin de ne pas rester trop longtemps avec un mini-Mario. Notons en plus que franchir un checkpoint sous la plus petite forme confère automatiquement l’effet d’un champignon. Dans Wonder, le compteur de vies baisse donc un peu moins que la moyenne.
… Tout en s’ouvrant davantage
Faciliter la vie aux joueuses et aux joueurs semble d’ailleurs constituer une préoccupation toute particulière auprès de l’équipe de développement, en allant encore plus loin ici. Premièrement, fait assez rare dans l’historique 2D de la série, les notions de timer et de scoring disparaissent. On dispose alors de tout notre temps pour fouiller et savourer chaque niveau, ce qui amène un véritable confort de jeu. Bien sûr, le dosage du challenge passe aussi par une expérience de jeu directement partagée en permettant une nouvelle fois des parties jusqu’à quatre joueurs en local, où l’on dispose à nouveau de personnages faciles à jouer. Carottin ainsi que les différents Yoshi demeurent invulnérables, et ne trépassent qu’en tombant dans le vide. En échange, il leur est impossible d’hériter des objets spéciaux, et donc d’accéder à certains secrets. Les autres, Mario, Luigi, Peach, Daisy, Toadette et les Toad partagent quant à eux le même gameplay de base.
Mais le partage de l’expérience se réalise aussi d’une autre manière, grâce à un système de mode en ligne où des personnes du monde entier peuvent se croiser dans un même niveau. Des amis peuvent également se rejoindre dans des salons. En ligne, les interactions sont cette fois indirectes en cohabitant seulement avec les fantômes des joueurs, aussi appelés « ombres live ». En d’autres termes, casser un bloc ne le casse uniquement que pour soi, et aucun autre élément ou collectible ne se partage avec autrui. Simplement, par un système de panneaux à poser où on le souhaite, il est possible de ressusciter assez facilement en ayant touché au préalable le panneau posé par une ombre live au cours du niveau. En effet, en mourant, on prend la forme d’un fantôme pendant un temps limité. Dans ce laps de temps, si l’on parvient à rejoindre l’ombre live ou le panneau en question, on peut être ranimé. Accumuler des actions de ce type nourrit par ailleurs un système de points de cœurs permettant de montrer aux autres que l’on a été altruiste. Un score symbolique, certes, mais ce moyen de repousser la mort grâce à l’aide d’autrui se met au service de ce souci de convivialité.
Les badges ne dérogent pas à ce leitmotiv. Autre mécanique inédite du titre, les badges offrent des passifs ou des mouvements supplémentaires à Mario et ses amis. Du côté des avantages passifs, certains nous confèrent le pouvoir d’attirer les pièces à soi, de bénéficier d’un champignon à chaque début de niveau ou encore d’échapper une fois à la mort dans la lave ou un trou. Et puis concernant les mouvements, le badge Saut d’Escalade nous offre un appui supplémentaire sur une paroi, Grand Saut Accroupi parle de lui-même tandis que le fameux Parachapeau allonge la longueur d’un saut en faisant planer le personnage. Enième corde à l’arc d’un gameplay solide, ces badges, bien utilisés, rendent donc l’expérience encore plus abordable, y compris au sujet de la récupération des collectibles.
Les plus avides de défi l’ont peut-être compris : miser sur une aventure au fun intarissable et accueillante pour le plus grand nombre s’effectue ici au prix d’un challenge un cran en dessous de ce que l’on a pu connaître. Super Mario Bros. Wonder nous rappelle ainsi fortement la tournure prise parallèlement par la série des Mario 3D avec Odyssey. De la même manière que le jeu sorti en 2017 a pu décevoir une petite partie des fans en prenant un tel virage, il ne serait pas étonnant qu’il en soit de même avec Wonder. Malgré tout, et sans trop en dire, il propose à quelques reprises un défi plutôt relevé. Et puis outre le fait qu’elles soient surtout censées déverrouiller les étapes clés de chaque monde, chasser l’intégralité des graines prodiges rallonge la durée de vie et procure une certaine satisfaction. Idem concernant les grandes pièces violettes qui, en plus de contribuer au 100%, garnissent notre portefeuille à délester au Bazar Poplin pour y acheter divers bonus.
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