Résolu à faire revenir certains des opus marquants de la franchise Tales of, et ce à moindre coût en optant pour de simples remasters plutôt que d’onéreux remakes, Bandai Namco nous sert en ce début d’année Tales of Graces f Remastered. Version améliorée de l’un des tout meilleurs opus de la saga, initialement paru sur Nintendo Wii en 2009, exclusivement au Japon, avant de connaître une seconde sortie, déjà sous forme de remasterisation, sur PlayStation 3.
Un choix discutable, dans la mesure où nombre de fans attendent encore, désespérément, l’arrivée dans nos contrées de certains opus toujours exclusifs à l’archipel, avec en tête de liste Tales of Rebirth. Toutefois, force est de reconnaître qu’en 2025, au beau milieu d’une vaste étendue de mondes ouverts et de productions extrêmement ambitieuses, Tales of Graces f Remastered a quelques solides arguments pour séduire, notamment son prix.
Conditions de test : Nous avons passé une petite quarantaine d’heures sur la version PlayStation 5 du titre. Cet article est garanti sans spoiler majeur.
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Cette sortie, c’est avant tout une histoire de frustration. Celle des fans de la franchise de Bandai Namco, pour commencer, qui militent encore et toujours pour un accès à un Tales of Rebirth, reconnu par tous ceux qui ont pu y toucher dans sa version japonaise comme l’un de ses tout meilleurs épisodes. S’il semblait logique que, dans sa démarche de remise aux goûts du jour d’opus de sa célèbre série d’Action-RPG, le géant japonais commence par le mythique Tales of Symphonia (bien que le résultat ne fut pas à la hauteur des attentes), il demeure plus compliqué d’expliquer pourquoi c’est Tales of Graces qui lui fait suite. Du moins, pas sans se pencher sur la réalité économique de cette version améliorée.
Parce que dans les faits, non seulement le travail abattu ne saute pas aux yeux, mais il va sans dire qu’avec sa structure moins ambitieuse que la plupart des opus de la franchise, optant pour l’abandon du monde ouvert au sens où on l’entend, Tales of Graces f Remastered ne demandait pas énormément de travail. Visuellement d’ailleurs, on ressent assez fortement son origine 128bits, avec des décors qui manquent cruellement de détails, certaines textures qui agressent l’œil, une distance d’affichage ridicule, et des modèles de personnages typiques de l’époque. Cela étant dit, le jeu n’est pas moche, conservant son charme grâce, notamment, à une certaine inspiration dans ses environnements. On est à des années lumières de la plupart des productions actuelles, mais finalement pas si loin des titres Falcom.
Constat qui se ressent pas mal dans la mise en scène de ce Tales of Graces f Remastered, avec des dialogues en plan fixe, ou même dans sa structure, avec un environnement très couloir, regorgeant de murs invisibles qui ont de quoi frustrer. La construction du monde en lui-même n’est pas à blâmer, puisque celui-ci se révèle assez organique, plus que dans un Tales of Symphonia chez qui la world map disgracieuse était un petit frein à l’immersion. Néanmoins, on peut s’y perdre, dans un premier temps, entre ces étendues d’herbe, sur le bord des routes, que l’on peut fouler, et celles qui nous dédaignent. Dans la même catégorie, il est assez déroutant de découvrir, en 2025, un jeu du genre qui ne permette pas de caméra libre, même si on s’habitue vite, ou qui utilise un marqueur d’objectif dans des décors plutôt dirigistes (même si Final Fantasy XVI ne s’en souciait guère). Ce dernier point, ajout de ce remaster, est bienvenu dans de très rares situations, et comblera certainement ceux qui veulent traverser l’aventure sans réfléchir. Mais on aurait pu faire sans. Heureusement, il est optionnel.
Mais nous n’en avons pas encore fini avec cette histoire de frustration. En effet, Tales of Graces f Remastered débute par une introduction beaucoup trop longue pour son bien. Il nous a personnellement fallu près de neuf heures avant d’enfin apercevoir les tenants de l’histoire de Asbel et ses petits camarades, en prenant notre temps. Le jeu passe d’abord par une longue séquence où notre héros est enfant, de près de quatre heures, pendant laquelle les combats sont littéralement bridés, et la narration assez simpliste, en plus d’être particulièrement mièvre. Le tout se déroule lentement pendant les quatre à cinq heures suivantes, de quoi décourager les joueurs les plus impatients, ou venus chercher un sentiment d’aventure absent jusque là. Heureusement, dès la dizaine d’heures atteinte, les choses s’accélèrent, et le ton devient plus adulte.
Justice divine
On arrêtera les reproches net à partir de là. Oui, le jeu souffre de ses origines 128bits, et non il ne parlera pas à tout le monde en 2025. Mais ceux qui peuvent jouer à ce genre de production le savent sans doute, tandis que les autres n’atterriront probablement pas sur cet article. Tales of Graces f Remastered, puisqu’il reprend tout ce que proposait la version PlayStation 3, demeure un excellent Action-RPG, regorgeant de qualités. Première d’entre elles, un scénario qui parvient à marquer, avec plusieurs rebondissements bien sentis, et une galerie de personnages qui, comme souvent avec la série, constitue l’une de ses plus grandes forces.
Tout débute dans le village de Lhant, où le père de notre héros règne en qualité de seigneur sur un peuple qui semble prospère. Nous incarnons Asbel, accompagné par son jeune frère, Hubert, et par son amie Cheria, atteinte d’une maladie inconnue. Un beau jour, notre héros tombe sur une jeune fille amnésique allongée dans un banc de fleurs, sur une falaise. La ramenant au village, il décide de la garder à ses côtés le temps qu’elle retrouve ses esprits. Mais pas le temps de l’y aider, puisque le jeune prince du royaume de Windor débarque, et s’installe chez Asbel, qui compte bien braver les interdits pour s’en faire un copain. Ce qu’il parvient à faire, non sans réprimande, en déjouant une tentative d’assassinat.
La suite, on se gardera bien de vous la révéler, puisque le plaisir de la découverte de cette trame revêt une importance capitale dans l’appréciation de Tales of Graces, ou de sa version remasterisée, du reste. Tout ce qu’on peut vous dire, c’est que la mort s’immisce assez tôt dans le récit. Comme toujours dans la série, on apprécie en découvrir plus sur les différents protagonistes, qui ont chacun une histoire à nous narrer. Même si certains sont moins intéressants que d’autres, on s’attache toutefois rapidement et durablement à ces têtes marquantes, joliment doublées en japonais. Le doublage anglais, comme à l’époque, n’est toutefois pas recommandable, même si on sent que certains acteurs s’investissent plus que d’autres.
De l’importance de la bagarre
Après une ellipse de sept longues années, nous retrouvons notre héros plus mature, et surtout plus habile à l’épée que jamais. Ce qui tombe bien, puisque le système de combat de Tales of Graces est assurément sa plus grande qualité. On en a l’habitude avec la sérié, le dynamisme est de mise. Mais dans ce volet, c’est plus vrai que de coutume. Les affrontements se règlent d’ailleurs à une vitesse record, et nous sommes souvent encouragés à accélérer la cadence pour obtenir différents bonus. Un bon moyen de nous maintenir engagés pendant la grosse quarantaine d’heures que dure l’aventure principale en ligne droite, voire même dix à vingt heures de plus si vous décidez de vous lancer dans le post-game, qui bénéficie de nouveautés de gameplay bien senties.
Cela saute rapidement aux yeux, le système de combat de Tales of Graces est extrêmement riche et généreux. Il s’agit par ailleurs de l’un des plus dynamiques et jouissifs de la série. On saute dans tous les sens, on utilise différentes attaques spéciales (ou Artes pour les puristes), ça déborde d’effets lumineux, et on tourne facilement autour des ennemis grâce à un système d’esquive bien pensé (bien que moins permissif que chez un Visions of Mana ou un Tales of Arise évidemment). Le tout est rendu assez complexe par l’utilisation d’une garde évolutive, ou d’un système de points d’action qui bride nos possibilités, et demande de bien gérer son rythme pour ne pas se retrouver submergé par les attaques ennemies. Par ailleurs, il est possible d’incarner chacun des personnages de l’équipe en combat, tous ayant leur propre style.
Le résultat est étrangement complet, pas forcément évident à appréhender en premier lieu. On comprend ainsi pourquoi le jeu met autant de temps à se mettre en place et à dérouler ses possibilités offensives et défensives. Nous lâcher dans le grand bain sans nous avoir bien laissé le temps de tout apprendre, c’était prendre le risque de voir les néophytes se faire rétamer par l’intelligence artificielle, qui ne fait que peu de cadeaux. Le jeu n’est pas particulièrement difficile, mais demande néanmoins un brin de maîtrise pour s’en sortir. Heureusement, quatre modes de difficulté sont disponibles, et interchangeables à tout moment (hors combat). À titre personnel, nous avons fait l’intégralité du jeu en mode Normal, et avons eu quelques sueurs froides face à certains boss. Notez que quelques options de confort apparaissent sur cette version remasterisée, comme la possibilité de recommencer directement un combat perdu, sans passer par la case Game Over ; ou encore une sauvegarde automatique, qui rend globalement caduque le point de sauvegarde conventionnel.
S’ajoutent à cela un système de titres, qui fonctionne grossièrement comme un arbre de compétences, se révélant lui aussi d’une richesse assez vertigineuse ; de vastes possibilités d’équipement, avec notamment une fonction de synthèse qui permet d’améliorer ses armes et armures et de les perfectionner à l’utilisation ; ou encore un mixeur, étrange objet pouvant conférer des bonus en combat et permettre de dupliquer nos objets, moyennant une monnaie singulière que l’on nomme l’Eleth. Il n’y a pas à dire, Tales of Graces est étonnamment généreux pour un titre Wii, d’autant plus lorsqu’on constate la quantité de missions annexes disponibles. Les plus acharnés en auront pour leur argent. Les autres n’auront pas l’impression de perdre le temps, d’autant que le titre est plutôt bien rythmé. Enfin, surtout une fois la longue séquence introductive passée, cela va sans dire.
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