Pas facile de se frayer un chemin dans le grand monde des jeux qui se veulent « arty », où chacun dégaine sa plus belle plume pour nous livrer un torrent d’émotions avec le plus de minimalisme possible. The Gardens Between tente tout de même le coup, et attire forcément les plus curieux d’un simple coup d’œil avec sa direction artistique originale et ses mécanismes jouant avec le temps, qui auraient pu faire de lui l’une des plus belles aventures de cette année. Le constat est malheureusement différent, car même si tout est réglé comme une horloge suisse, on est loin de crier au génie.
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ToggleLes rouages d’une amitié
Après des titres qui sont passés relativement inaperçus, The Voxel Agents livre enfin un véritable projet plus ambitieux, qui s’est fait attendre durant de longues années. Il s’agit là de The Gardens Between, qui a reçu de nombreuses récompenses à travers les salons avant sa sortie. Il faut dire que le titre a tout pour plaire en quelques secondes de jeu, surtout avec un pitch assez universel qui peut toucher n’importe qui. On y suit les aventures nostalgiques de Arina et Frendt, deux meilleurs amis qui se retrouvent être également voisins, et qui effectuent un voyage à travers leur constellation de souvenirs en commun pour une raison que vous comprendrez sans effort une fois dans le jeu. L’ambition de The Gardens Between est de livrer un récit chargé en émotions, traitant de thèmes comme le passage à l’âge adulte (ou du moins le fait de quitter le monde de l’enfance), mais surtout de l’amitié qui peut unir deux personnes.
Trop en retrait, l’histoire du jeu n’arrive jamais à nous toucher malgré des thématiques universelles.
Ne vous attendez pas pour autant que le jeu exprime cela au travers de dialogues ou des cinématiques, car le narration se veut être la plus minimaliste possible. Aucune ligne de texte ne viendra perturber votre aventure et on pourrait se dire que c’est tant mieux, puisque une histoire bien mise en scène n’a parfois pas besoin de s’épancher dans des dialogues verbeux pour véhiculer des sentiments. Pourtant, The Gardens Between aurait peut-être mérité à être un peu plus communicatif car les séquences censées illustrer le lien puissant entre les deux héros sont bien trop brèves pour qu’elles aient un impact émotionnel. On apprend finalement pas grand-chose sur eux ni pourquoi ils sont devenus inséparables, si ce n’est qu’ils partageaient certaines passions en commun. Le final n’arrive alors pas à nous bouleverser autant qu’il le devrait, surtout que celui-ci arrive bien trop vite.
Le temps d’un puzzle
C’est bien là le défaut majeur du titre, car il se boucle en à peine deux (voire trois) heures pour peu que vous soyez un peu habitués aux jeux de puzzles. Après tout, l’intention des développeurs n’a jamais été de construire des énigmes complexes, mais de rendre leur jeu accessible à tous pour que la frustration ne vienne jamais s’inviter dans le voyage. On ressent vraiment cela au fil des différents puzzles, matérialisés sous la forme d’îles, notamment dans les dix premiers qui se bouclent en un clin d’oeil, sans jamais se creuser les méninges. Ces derniers sont donc très simples mais pas dépourvus d’intelligence ou de malice, ce qui est principalement dû au gameplay de ce The Gardens Between, axé sur la manipulation du temps.
Le temps est le vrai personnage du jeu, le seul qui peut être contrôlé par le joueur.
On a beaucoup parlé de Arina et Frendt, mais ils ne sont pourtant pas jouables. L’outil principal du joueur est le temps, qu’il peut manipuler à sa guise avec le joystick en l’avançant ou en le reculant. Les personnages bougent alors en fonction du temps, tout comme les objets présents sur chaque île et qui représentent les souvenirs des deux jeunes gens, comme des consoles de jeux, des ballons et des objets de toutes sortes. Pour compléter chaque tableau, il suffit simplement de manipuler le temps de la bonne manière afin que les deux héros parviennent tout en haut de l’île, avec en leur possession une lanterne qui doit être éclairée. Pour cela, il faudra auparavant résoudre quelques énigmes avant d’effectuer votre ascension, histoire de récupérer la dite lumière. On note aussi que chacun des personnages à sa spécificité, puisque Arina est celle qui tient la lanterne tandis que Frendt actionne certains mécanismes.
Deux tours d’horloge et c’est fini
Ce système de jeu donne lieu à de (trop rares) jolis moments de réflexion, jamais bien longs. Tout cela s’enrichit parfois d’idées intéressantes comme certains objets qui sont à manipuler hors du temps, ce qui complexifie un peu la tâche. Revenir sur ses pas devient vite intuitif à partir du moment où l’on comprend que foncer tête baissée vers le sommet n’est pas la solution. Il faut d’ailleurs jouer avec les mécanismes en manipulant le temps comme un yo-yo, ne serait-ce que pour couper une planche de bois à l’aide d’une scie ou pour appuyer sur les touches d’un ordinateur dans le bon ordre. On regrette cependant que ce genre de moments sympathiques ne soit qu’éphémères, car c’est seulement une petite vingtaine de niveau qui vous attendent. Les choses sérieuses ne comment véritablement que dans les trois ou quatre derniers puzzles, qui illustrent parfaitement l’inventivité dont peut faire preuve le jeu, mais de manière trop brève encore une fois. Autant vous dire qu’une fois au bout du chemin, on ressent un sentiment d’inachevé, comme si le jeu n’avait pas encore fini de livrer toutes ses idées alors qu’il avait clairement le potentiel pour en montrer plus.
The Gardens Between a de la suite dans les idées, mais il ne prend jamais le temps de vraiment les exploiter.
C’est d’autant plus regrettable quand on voit le soin apporté aux diverses îles qui possèdent une vraie identité chacune, parsemés d’objets tous plus nostalgiques les uns que les autres. Il en est de même pour la musique, elle aussi très discrète, mais qui accompagne avec douceur chaque puzzle. C’est donc un sentiment de frustration qui l’emporte lorsque les crédits défilent, avec aucune jouabilité en vue pour venir combler cela. Plein d’idées, terriblement charmant et relaxant, il ne manque finalement pas grand-chose pour que The Gardens Between rentre dans les mémoires. Il aurait simplement fallu lui laisser davantage de temps. Du temps qu’il aurait pu utiliser pour développer encore plus ses puzzles (sans pour autant les rendre inaccessibles au grand public), du temps qui lui aurait permis que l’on s’attache plus au récit qui essaye de se construire, du temps pour que ses puzzles nous restent en tête et qu’on les chérisse autant que Arina et Frendt chérissent leurs souvenirs.
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