Depuis son arrivée en Europe en 2006 avec les premiers épisodes sur DS, la série Ace Attorney a su rapidement se faire un nom auprès des joueurs, en dépit d’un gameplay assez particulier de visual novel, genre très populaire au Japon mais assez peu dans nos contrées, grâce à ses enquêtes bien ficelées, ses personnages hauts en couleurs et son humour loufoque.
Mais même s’il est vrai que la licence a su se créer un groupe de fans fidèles, notamment en France, sa réception a malgré tout été compliquée en occident, où la série, peinant à élargir son public, ne bénéficiait plus de traduction française depuis déjà un certain temps, et où la plupart des spin-off ne s’étaient jamais exportés.
C’est finalement plusieurs années après leur sortie sur 3DS que les spin-off The Great Ace Attorney Adventures et The Great Ace Attorney 2 Resolve, sortis respectivement en 2015 et 2017, arrivent enfin en occident dans une compilation HD. Intitulée The Great Ace Attorney Chronicles, la compilation, disponible sur Switch, Ps4 et Steam, regroupe les deux opus qui retracent les aventures de Ryunosuke Naruhodo, ancêtre du bien connu Phoenix Wright, dans les débuts de sa carrière d’avocat. Un spin-off dont la sortie occidentale était réclamée depuis bien longtemps par les fans de la licence.
Mais après tant d’attente, le jeu en vaut-il réellement la chandelle ? Après deux épisodes que certains auront trouvé discutables, marqués par l’absence de Shu Takumi, réalisateur et scénariste principal des quatre premiers volets, The Great Ace Attorney Chronicles sera-t-il l’épisode qui mettra tout le monde d’accord ? C’est à cette question que nous tâcherons de répondre dans ce test.
Conditions de test : Le jeu a été testé sur Switch avec une version anticipée fournie par Capcom. Plus de 90 heures de jeu ont été cumulées sur les deux épisodes avant l’écriture de ce test.
Les aventures de l’apprenti avocat
Sans trop en dire sur l’histoire, The Great Ace Attorney Chronicles se déroule vers la fin du XIXe siècle et suit les aventures de Ryunosuke Naruhodo, un jeune étudiant japonais devenu avocat par un concours de circonstances et qui sera amené, par un second concours de circonstances, à officier à Londres. Il sera accompagné dans ses aventures par Susato Mikotoba, une jeune assistante juridique.
Un duo que nous verrons évoluer ensemble pendant la majeure partie des quelque 30-40 heures que prendront chacun des deux opus, et qui fonctionne à merveille. Même s’ils s’avèrent tous deux un peu plus sérieux que les précédents protagonistes de la série, leurs interactions ne manquent pas d’humour, notamment grâce à l’insouciance dont ils font parfois preuve, plus particulièrement Susato, dont la curiosité et l’enthousiasme viendront créer des instants de choc culturel assez cocasses.
La véritable perle de ce nouveau casting reste cependant le personnage de Herlock Sholmes (pas besoin d’expliquer la référence), autoproclamé plus grand détective de son époque et qui vole tout simplement la vedette aux autres personnages à chacune de ses apparitions, aussi bien dans les scènes sérieuses que dans les scènes plus légères, où son petit côté dramatique et chaotique provoque bien souvent l’hilarité.
À l’instar de ses prédécesseurs, The Great Ace Attorney est divisé en affaires, au nombre de cinq par jeu, dont la première fera office d’introduction, en proposant une seule phase de tribunal pour permettre aux joueurs et joueuses découvrant la série de se familiariser avec la base du gameplay. Une entrée en matière qui, bien que relativement simple, figurera parmi les plus longues de la série.
C’est véritablement à partir de l’arrivée de nos personnages en Angleterre que les choses commencent réellement à se corser, avec des enquêtes plus longues et plus compliquées, qui, même si elles ne se valent pas, finissent toutes par trouver leur intérêt scénaristique pour finalement aboutir à une histoire assez complexe et fouillée aux ramifications inattendues. Le jeu comporte globalement beaucoup moins de superflus que les opus précédents. Il est ici assez difficile de dire que telle ou telle affaire aurait pu être retirée.
Mais malgré la qualité d’écriture de son scénario et de ses personnages, le jeu n’échappe cependant pas aux travers de ses prédécesseurs, à savoir des moments caractéristiques où le jeu cherchera à faire des détours pour atteindre une conclusion évidente pour le joueur, demandant ainsi de présenter des preuves qui pourront sembler sans rapport avec le contre-interrogatoire.
Il est également important de souligner que The Great Ace Attorney Chronicles ne propose pas de traduction française mais uniquement anglaise. Même si un effort tout particulier a été apporté à ladite traduction, il est malheureusement vrai qu’il sera assez compliqué pour les moins bilingues de se plonger réellement dans le jeu, d’une part à cause de la quantité de texte, visual novel oblige, mais également à cause des différents accents des personnages et du vocabulaire employé.
Néanmoins, pour peu que l’on comprenne l’anglais, découvrir par soi-même le fin mot de l’histoire reste toujours aussi satisfaisant, et les détours pris pour l’atteindre ne font que renforcer ce sentiment, un peu comme atteindre la fin d’un long marathon.
Et rabattre son caquet à Barok Van Zieks, le procureur titulaire de ces épisodes, n’est pas déplaisant non plus, il faut bien l’avouer.
Faire le tri dans les salades
En termes de gameplay, The Great Ace Attorney Chronicles choisi dans un premier temps de se détacher de ce qu’avait pu proposer la série par le passé : pas de verrous psyché, de mood matrix ou de bracelets magiques, les joueurs ne pourront ici compter que sur leur œil affuté pour s’en sortir. Un retour a quelque chose de plus terre à terre assez bienvenu dans une série qui commençait un peu à se perdre dans la surenchère de pouvoirs à la limite du surnaturel.
Ryunosuke ne pourra pas non plus forcément compter sur la médecine légale pour démêler le vrai du faux, même si le jeu se permettra tout de même quelques libertés de ce point de vue, en demandant ponctuellement de faire usage de l’une des inventions un peu anachroniques d’Iris Wilson et Herlock Sholmes, qui permettront ainsi de déceler des preuves invisibles à l’œil nu, même si celles-ci seront difficilement recevables au tribunal.
Mais parlons plutôt des nouveautés exclusives à The Great Ace Attorney. La première d’entre-elles, que nous traduirons par « la danse de la déduction », nous est proposées durant les phases d’enquête et consiste à suivre Herlock Sholmes dans ses déductions quelque peu saugrenues pour le corriger en usant de l’environnement et des preuves à votre disposition. À chaque point que vous devrez corriger, il sera ainsi possible de déplacer la caméra afin de récolter diverses informations et indices qui permettront d’arriver à la bonne conclusion. Des recherches d’indices pouvant par ailleurs être faites grâce à l’écran tactile si vous jouez sur Switch en mode portable.
Des séquences particulièrement fun à jouer et où le jeu s’autorise également quelques petites fantaisies en matière de mise en scène, en variant les angles de caméra, les déplacements des personnages, ainsi que leurs différentes réactions. Des éléments qui ajoutent pas mal de dynamisme et de fraicheur à un genre en principe assez statique.
La seconde addition concerne la mécanique appelée « summation examination », ou « examen de synthèse », propre au système de jurés du tribunal londonien : pendant la phase de tribunal, les six membres du jury pourront décider de voter pour ou contre la culpabilité de votre client, si ces derniers le déclarent coupable, ce sera à vous de les convaincre de revenir sur leur décision.
Pour cela, vous devrez écouter chaque membre individuellement, comme lors d’un contre-interrogatoire, et trouver des éléments contradictoires dans les témoignages des autres jurés afin de les mettre en désaccord et permettre au procès de continuer. Cette mécanique, en plus de proposer une dose supplémentaire d’humour avec des jurés complètement délirants, vient également casser la monotonie des procès.
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