Avec la horde de remasters en tout genre, de remakes, ou avec la surabondance de Battle Royale coté multijoueur, on aurait pu croire que le jeu vidéo allait finir pas stagner, par tourner en rond, malgré une technologie qui évolue à un rythme régulier. C’était heureusement sans compter sur la scène indépendante, qui gagne en volume chaque année, et sur quelques entreprises qui privilégient encore les concepts forts. Parmi eux, le célèbre studio britannique Team 17 qui, non content d’être pionnier, est en plus à l’origine de plusieurs séries cultes, telles que Worms ou Alien Breed. Leur dernier titre en date, The Knight Witch, requiert toute votre attention.
Au premier coup d’œil, on pourrait croire que The Knight Witch n’est qu’un Metroidvania de plus, comme le marché indépendant nous en a offert des dizaines ces dernières années. Le genre est un peu bouché, il faut le reconnaître, et si des titres comme Hollow Knight : Silksong ou Blasphemous 2 ont toutes les chances de trouver leur public, une majorité passera tout simplement à la trappe. L’avenir nous dira peut-être quel accueil a reçu le projet qui nous intéresse aujourd’hui. Mais en attendant, on peut au moins vous en dire plus à son sujet, en espérant que cela vous convainque de vous le procurer à votre tour.
Conditions de test : Nous avons joué près d’une dizaine d’heures sur la version Nintendo Switch, principalement sur TV. Au cours de notre partie, nous avons fait face à trois reprises à un bug nous contraignant à relancer le jeu. Nous espérons que ce problème sera résolu dans la version finale. Ce test est garanti sans spoiler.
Sommaire
ToggleBlack Magic
Il y a quelques années, le monde essuya une guerre d’une envergure nouvelle, mettant en péril toute la surface du globe. L’humanité se sortit tant bien que mal de cette situation catastrophique, en envoyant ses quatre meilleures recrues, les Knight Witches. La victoire leur était assurée, malheureusement la planète se portait trop mal pour permettre aux hommes de vivre convenablement. La découverte d’une ville souterraine, au centre d’un cratère résultant du dernier combat, va alors pousser toute la race à s’exiler dans des kilomètres de tunnels.
Cela fait longtemps que la paix règne sur cette ville troglodyte, trop longtemps pour l’ennemi Dagadaï, qui refait surface, visiblement décidé à prendre sa revanche. Dans ce contexte, vous incarnez Rayne, une jeune femme au tempérament plutôt doux, détentrice des pouvoirs des Knight Witches, mais n’ayant pas été autorisée à prendre part à la guerre des années plus tôt. Ce n’était que partie remise, puisque ce coup-ci, c’est bien à votre tour d’être en première ligne, face à des hordes de golems prêts à en découdre.
Si le scénario de The Knight Witch n’est pas particulièrement surprenant, il s’avère malgré tout suffisamment bien écrit pour qu’on le suive avec un certain plaisir. Il doit aussi cet état de fait à ses personnages, auxquels il est difficile de ne pas s’attacher, surtout Rayne et Akaï, son mari, qui forment un couple tout bonnement adorable. Le character design n’y est pas étranger. Très réussi, il offre au jeu une galerie de personnages, bons ou mauvais, hauts en couleurs. Au même titre que le jeu dans sa globalité d’ailleurs, qui regorge de teintes vives, et jouit d’une diversité d’environnements plaisante.
Une diversité mise en valeur par une réalisation graphique très convaincante pour un petit Metroidvania. The Knight Witch est un jeu très soigné, riche en détails et en effets visuels agréables à l’œil, jouissant d’une direction artistique du meilleur effet, et de décors en 2,5D qui profitent d’une profondeur souvent bien exploitée. En un mot comme en cent, The Knight Witch est beau, et surprend à plusieurs reprises, notamment grâce à son level design bien pensé. Et que dire de son exceptionnelle bande sonore ?! Autant de raisons nous poussant à être confiants en lançant le jeu pour la première fois.
Link in Park
Non content d’être beau, le titre de la Team 17 est en plus assez bien construit, et bénéficie d’un concept intéressant. S’il se présente comme un Metroidvania assez classique, la composante principale de son gameplay semble pourtant n’avoir rien à faire ici. En effet, The Knight Witch puise son inspiration dans le Shoot’em Up, à qui il emprunte certaines de ses mécaniques, n’oubliant pas de s’armer de la difficulté légendaire du genre par la même occasion. Le résultat, en plus d’être assez surprenant, fonctionne plutôt bien manette en mains.
Il faut dire que Rayne est un charme à contrôler, volant de manière fluide dans les décors souvent étriqués. Mais aussi que le shoot est assez intuitif, utilisant le joystick de droite pour la visée, et la gâchette R pour tirer. Du grand classique, qui fonctionne très bien chez des jeux comme Ruiner ou The Ascent, et permet à The Knight Witch une prise en mains immédiate. Aidée par un système de visée automatique, permettant de tirer sur les ennemis dès qu’ils sont à portée, sans avoir à utiliser le joystick attitré. Il fallait au moins ça pour permettre aux joueurs de s’en sortir dans cet enfer de projectiles.
Parce que le développeur ne s’est pas contenté d’inclure une fonction de shoot, et de faire voler sa protagoniste. Il va être question de Bullet Hell, un terme qui fait froid dans le dos aux non initiés, pour la simple et bonne raison qu’il est systématiquement synonyme de difficulté surhumaine. The Knight Witch ne fait pas exception à la règle, nous mettant par trop souvent dans des situations délicates, où l’écran est surchargé d’ennemi, de leurs projectiles, et d’effets visuels en tout genre. Heureusement, il est plutôt juste dans sa proposition, offre des challenges intenses mais courts, et jouit d’une lisibilité rarement mise à mal. Sauf contre certains boss, malheureusement, mais rien de grave.
Metroidvania oblige, The Knight Witch offre au joueur la possibilité de faire évoluer sa protagoniste, qui va découvrir différents pouvoirs au fil de l’aventure, lui permettant à la fois de combattre différemment, mais aussi de débloquer de nouvelles zones jusque là inaccessibles. Rayne pourra aussi compter sur le Link, un pouvoir étrange qu’elle tire de la confiance que le peuple lui accorde. Faisant office d’expérience, comme chez un jeu de rôle, cette ressource grimpera à mesure que vous terminerez les missions qui vous sont confiées, en répondant publiquement à quelques questions, ou en venant en aide aux hommes et femmes retenus prisonniers. Le sentiment de progression est bien amené.
Cardcaptor Sakura
Vous l’aurez compris, The Knight Witch mélange habilement Shoot’em Up et Metroidvania, reprenant finalement les poncifs des deux genres pour consacrer une nouvelle façon de jouer plutôt bien pensée. Et le petit twist qui va permettre de lier le tout, c’est un système de deck de cartes à utiliser en temps réel, consommant notre courte jauge de mana. Facile d’utilisation, cette fonction fait un peu gadget dans les premiers niveaux, mais se révèle indispensable à compter de deux ou trois heures de jeu. Autrement dit, quand le challenge commence à se corser. Mais pas facile de bien visualiser sa main quand l’écran est chargé d’ennemis.
Il vous faudra évidemment partir à la chasse de ces cartes aux effets dévastateurs, disséminées dans une map aux zones connectées par un téléporteur, car elles seront votre meilleur atout face aux ennemis, rapidement en surnombre. Malgré tout, si elles peuvent sortir le joueur de situations périlleuses, elles n’ont pas pour objectif de lui faciliter bêtement la vie. Des effets plus puissants consumeront entièrement votre jauge de mana, vous contraignant à en récupérer au péril de votre vie. Autrement dit, en passant à l’offensive.
Qu’on se le dise, le jeu est bon. Vous avez de toute façon déjà vu la note. Néanmoins, bien que son public cible soit assez vaste, il parlera surtout aux joueurs et joueuses capables de surmonter sa difficulté hors norme. « Easy to learn, hard to master ». Des mots qui parleront aux amoureux de Dark Souls ou autre Nioh, s’appliquant à merveille à The Knight Witch. Parce que l’on recommence souvent une escarmouche, que certains affrontements sont parfaitement intransigeants avec le joueur, et que l’on est rapidement guetté par le fameux rage quit. Nous n’y sommes pas étrangers, et avons cherché en vain l’accès à un mode facile…
Mais le plaisir procuré par le jeu se situe bien là : réussir à se surpasser. On est sans cesse mis à l’épreuve dans The Knight Witch, et certaines séquences sont bien plus corsées que d’autres. Ainsi, on meurt souvent. Et à ce sujet, on aurait apprécié un système de checkpoints mieux pensé, qui nous aurait permis de reprendre nos affrontements du début. Tant qu’on est sur les défauts, autant aborder l’environnement qui manque peut-être un peu de voies à explorer. Nous ne sommes pas devant un Ori and the Blind Forest, c’est vrai, mais c’est dommage qu’on fasse aussi rapidement le tour des lieux.
Et du jeu en lui-même d’ailleurs, parce qu’il n’est pas bien long. Sans sa difficulté, il serait aisé d’en voir le bout en quatre à cinq heures. Heureusement, le juste dosage de celle-ci permet de gonfler la durée de l’expérience, sans que cela semble artificiel. Cela étant, le challenge est parfois intolérable, et il est dommage que le développeur n’ait pas pensé à inclure des options d’accessibilité pour les joueurs les moins aguerris. Ceux-ci seront rapidement rebutés par des situations qu’il faut apprendre sur le bout des doigts, ou des patterns remplissant l’écran de projectiles de couleur vive. Reste un système de cheat codes, qui seront à découvrir par soi-même.
Cet article peut contenir des liens affiliés