En 2013 sortait The Last of Us premier du nom. Naughty Dog avait alors créé la surprise et nous proposait une aventure post-apocalyptique aux petits oignons en compagnie d’un duo qui a marqué toute la sphère vidéoludique. Sept ans plus tard, le studio californien réitère l’expérience et veut proposer une suite plus approfondie, plus viscérale mais qui est surtout attendue au tournant. The Last of Us Part II signe-t-il un nouveau chef-d’oeuvre de Naughty Dog ? Il semblerait.
Conditions de test : Nous avons testé The Last of Us Part II sur une PlayStation 4 Pro qui n’a pas hésité à toussoter et à faire l’avion de chasse. L’aventure a été terminée en un peu plus de 25 heures en difficulté normale et en fouillant un peu. Nous avons ensuite relancé certaines portions en jouant sur les réglages et refait une partie en difficulté maximale. Le testeur avait précédemment terminé le premier The Last of Us cinq fois dont une fois sur la version remasterisée avant de se lancer dans cette suite.
Alerte spoiler : Ce test est garanti sans spoiler. Le scénario ne sera que survolé pour éviter de divulgâcher des éléments qui pourraient potentiellement vous révéler des détails importants. Aussi, nous éviterons volontairement d’aborder certains éléments de gameplay intrinsèquement liés à la progression. Les images de ce test ont été fournies par Sony pour également éviter tout spoiler.
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ToggleEntre l’amour et la haine, il n’y a qu’un pas
Suite directe du premier opus, The Last of Us 2 est évidemment dans la continuité de celui-ci. Cinq ans se sont écoulés depuis les événements qui se sont clôturés après le laboratoire des lucioles. Joel et Ellie sont arrivés à Jackson, au Wyoming, où une communauté de survivants se sont rassemblés pour faire face au difficile environnement post-apocalyptique. Tout semblait aller pour le mieux jusqu’au jour où un terrible événement survient et bouleverse la vie quotidienne des survivants. Ellie va ainsi partir en croisade et entreprendre un voyage qui s’annonce particulièrement risqué, ce qui va la mener à Seattle.
Voici le background de fond. Difficile d’évoquer davantage d’éléments scénaristiques au risque de vous divulgâcher certains pans importants. Sachez cependant que l’histoire de The Last of Us Part II n’a rien de vraiment original : sous fond d’une vendetta personnelle, Ellie va rechercher plusieurs individus pour en savoir davantage et les grandes lignes du scénario restent terriblement classiques. C’est cependant dans son interprétation, sa construction et la profondeur du récit que cette escapade va nous prendre aux tripes et nous faire passer par tous nos états.
Si en surface, il s’agit d’une simple histoire de vengeance, c’est bien dans ses thématiques fortes que le jeu se démarque. L’amour et la haine sont sans aucun doute les sentiments les plus valorisés et le récit va jouer sur ces émotions opposées et pourtant si enchevêtrées. Que sommes-nous prêts à faire par amour ? Jusqu’à où peut nous mener notre haine ? Et surtout, quand est-ce qu’il faut lâcher prise ? Naughty Dog aborde le sujet du traumatisme avec une approche maîtrisée et qui se développe au fil de l’aventure ; que l’on vit et que l’on ressent. Le tout, avec un rythme endiablé, où le temps semble se suspendre à de nombreuses reprises.
Une histoire violente et sans retenue
C’est dans sa mise en œuvre que Naughty Dog nous insuffle une histoire authentique. Derrière cette vengeance se cache une seconde lecture plus intense qui se concrétise par des scènes fortes et des personnages intéressants. Bien que très loin de titiller le duo terriblement marquant du premier The Last of Us, cette suite introduit des visages que l’on n’oubliera pas de sitôt. Certains personnages secondaires seront vite oubliés mais une bonne partie sont attachants, travaillés en profondeur et viendront apporter leur contribution au récit ou lors de certaines séquences de gameplay. Sans tomber dans le cliché, chacun d’entre eux possède une personnalité et des traits de caractère assez forts.
Mais l’un des aspects sur lequel The Last of Us 2 nous marque, c’est bien sa violence. Visuelle, dans un premier temps, comme en attestait la bande-annonce publiée à la Paris Games Week 2017. Certaines scènes sont particulièrement marquantes, parfois choquantes, limite traumatisantes et ne sont pas faciles à regarder. Le studio californien ne fait pas de compromis et montre véritablement ce que les survivants sont prêts à faire pour se défendre ou protéger quelqu’un. Heureusement, on est loin de tomber dans le gore à outrance et bien que cela dérangera forcément les plus sensibles, cela vient appuyer la thématique principale de cette aventure.
Mais cette violence n’est pas seulement visible à l’œil nu. En plus de ces scènes qui dérangent, cela se joue également sur le plan psychologique. Que ce soit sur les dialogues, les échanges entre les personnages, les choix que l’on prend et surtout, les conséquences de nos actes, nous prenons conscience de ce que l’on fait et ce qui en découle.
Mieux encore, pour soutenir ces propos, Naughty Dog change le rythme au milieu de l’aventure et si l’on ne peut absolument pas évoquer cette direction pour éviter de spoiler, c’est un véritable tour de force qui vient appuyer cet aspect psychologique. On veut nous faire ressentir les émotions à travers des moments lourds, éprouver la peine et la joie des personnages, mais aussi créer une réflexion personnelle quant à nos actions.
Un monde riche et ouvert
Le studio entreprend une prise de risque non négligeable sur bien des aspects. Si la formule reste la même dans ses mécaniques – que l’on évoquera juste après – les créateurs proposent une œuvre personnelle et jouent carte sur table. Cela passe par tous ces divers éléments que l’on vient d’évoquer. Ces ambitions se traduisent également par un monde plus vaste, plus riche en détails et surtout, encore plus propice aux opportunités d’approche et d’exploration.
Comme cela a été dévoilé lors de la dernière présentation de Sony, The Last of Us Part II introduit des zones plus ouvertes. On peut évoquer par exemple notre arrivée à Seattle, où à un moment, on sera lâché avec une carte à la recherche d’essence. Il faudra parcourir les différents quartiers avec plusieurs points de chute, comme une banque, un magasin de musiques ou d’autres coins. Si cela est propice à l’exploration – et aux nombreux collectibles dissimilés ci-et-là, c’est aussi l’occasion de faire le plein de ressources et de faire parfois de malencontreuses rencontres. D’autres fois, on tombera sur des coffres qu’il faudra ouvrir à l’aide de codes qui sont cachés dans les alentours, sur une note ou sur un autre élément du décor.
Au début quelque peu déroutant, de peur de casser le rythme, cette ouverture des zones est une plus-value agréable et offre une expérience un peu plus survivaliste. Cette première escapade dans les quartiers de Seattle ne va pas se réitérer dans les mêmes circonstances, ce qui permet au titre de présenter l’une de ses plus grandes qualités : une incroyable construction des niveaux. La production arrive à se renouveler sans cesse et dépeint des paysages d’une beauté à se damner. On passera par des environnements plus urbains, à des endroits étriqués et propices aux plus grandes frayeurs en passant par des étendues plus sauvages ; tant d’éléments qui justifient cette excellente qualité de construction.
Cela se traduit par un level design de qualité, sublimé par une direction artistique de haute volée. Que ce soit les environnements qui fourmillent de détails, les arrière-plans travaillés, les nuances orangées lorsqu’il y a des torches ou des feux, le jeu est visuellement magnifique.
Dommage que cela soit entaché par quelques soucis de textures et de clippings, mais rien de vraiment méchant. Cela n’impacte pas le travail colossal qui a été fourni par les artistes qui nous dépaysent à plusieurs reprises. Quel régal ces petits moments de contemplation, souvent jumelés à des instants plus calmes et qui nous permettent de souffler le temps de quelques secondes. Un vrai petit moment de bonheur également lorsque l’on profite de ces flashbacks qui développent certaines relations et apportent un peu de légèreté.
Une formule qui évolue sans se bousculer
En nous faisant voyager sur différents niveaux, The Last of Us Part II fait la part belle aux multiples possibilités d’approches. Le soft jouit également d’une verticalité qui est particulièrement grisante lorsque l’on joue sur l’infiltration et que l’on doit faire face aux ennemis. Les bases restent cependant les mêmes : tout comme son prédécesseur, il s’agit d’un jeu de tir et de survie dans lequel on jongle entre le scénario, les séquences d’infiltration et les phases d’action, le tout, avec de l’artisanat et quelques moments où il faut effectuer des QTE avec le bon timing.
Sur ses mécaniques de gameplay, cette suite ne bouleverse absolument pas la recette. Il la bonifie simplement, en lui donnant un peu plus d’impact et d’avantage de profondeur. Dans les scènes d’action, la violence est encore une fois développée, avec quelque chose de beaucoup plus viscéral. Cela passe par des combats au corps-à-corps dynamiques, basés sur la lecture des mouvements de l’ennemi, où une erreur peut s’avérer fatale avec des saynètes souvent brutales. On pourra aussi user d’un arsenal traditionnel, allant du revolver au fusil de chasse en passant par l’arc, des engins de mort qu’il faudra pour la plupart débloquer au cours de l’histoire.
Le personnage pourra également user de l’artisanat pour s’aider dans les affrontements, avec par exemple, des fumigènes, des flèches explosives ou encore une amélioration de son arme de mêlée. La collecte de ressources est identique au premier volet, avec des éléments à récupérer un peu partout en fouillant les niveaux et qui permettent ensuite de confectionner à base de recettes que l’on débloque automatiquement dans l’aventure. Le kit de soin par exemple, va nécessiter de l’alcool et du tissu et est toujours particulièrement utile pour reprendre un peu de force et anticiper une rencontre qui pourrait mal tourner.
Là où cela change un peu, c’est au niveau des compétences. Cette fois, les manuels ne servent plus à développer telle ou telle capacité mais à débloquer un nouvel arbre de compétences complet. Ils ne sont pas nombreux et peuvent être trouvés en fouillant un peu, mais il est donc vraiment utile de bien chercher pour ne pas passer à côté d’un élément du genre. Une fois l’arbre débloqué, on pourra dépenser des suppléments, les médicaments, que l’on déniche un peu partout, tout comme les pièces d’armes, qui serviront à améliorer notre armement sur la petite vingtaine d’ateliers à trouver dans l’aventure.
Une ambiance glaçante
Tout est parfaitement maîtrisé et très organique, on passe d’une scène de l’histoire à une séquence de combat, avant de continuer une discussion en explorant et terminer sa course dans des décombres qui viennent de lâcher et nous envoyer dans un sous-sol rempli d’infectés. Certains diront que quelques passages sont scriptés, et c’est vrai. D’un autre côté, Naughty Dog maîtrise parfaitement le sujet et même si l’on pouvait avoir peur que cela n’aseptise la production, il n’en n’est rien. Tout du moins, dans son immense majorité.
Au cours des rencontres, s’il est toujours possible de foncer dans le tas, le soft veut mettre en avant la réflexion et la furtivité. Cela passe par la construction des niveaux où l’on nous incite à la jouer furtif mais aussi à travers les opportunités laissées au joueur, comme les herbes qui ont grandement poussé depuis le premier opus et dans lesquels on peut se cacher. L’approche brutale est souvent une solution viable dans les difficultés raisonnables, mais il sera absolument nécessaire de la jouer finement si vous augmentez celles-ci.
Cela laisse libre cours à plusieurs approches convaincantes, certaines plus subtiles que d’autres, notamment en jouant sur les environnements ou les infectés. Il sera d’ailleurs vital de calibrer son approche. Le gameplay va varier au cours de l’aventure avec l’évolution du héros mais on fera face à plusieurs ennemis. Des ennemis, qui d’ailleurs, ne sont pas toujours très futés. Bien qu’elle puisse vous détecter de loin, on regrette une IA parfois scriptée et souvent perfectible avec une vision périphérique pas très élargie. Des compagnons qui passent sous leurs yeux viennent également casser un peu de réalisme.
The Last of Us Part II nous mêle indirectement au conflit entre deux clans, les WLF (Washington Liberation Front), des militants xénophobes et les séraphites, une secte religieuse quelque peu dérangée. Les premiers, au style plus traditionnel, seront parfois accompagnés de chiens qui pourront vous flairer. Il faudra les fuir sans faire de bruit et détourner leur attention. Un élément de gameplay supplémentaire, qui s’ajoute aux autres petits détails, comme la possibilité de briser des vitres pour passer ou faire du bruit. Le second groupe usent quant à eux d’armes comme l’arc et sont plus silencieux dans leur approche.
Vient ensuite les infectés qui, bien sûr, font partie des grandes menaces du titre. Si les deux groupes cités plus haut font bien plus partie du fil directeur que les créatures, celles-ci ne sont pourtant pas du tout effacées. Au contraire, leur présence est toujours bien là et bien plus angoissantes qu’auparavant. Le soft excelle dans son ambiance pesante à souhait et jongle habillement dans ses scénarios pour ne pas créer de redondance, ni d’anticipation. Les séquences avec ces monstruosités font souvent l’objet d’un passage très tendu et les infectés sont bien plus menaçants qu’auparavant. Le virus a muté et a créé de nouveaux monstres que l’on vous laissera évidemment le plaisir de découvrir manette en main.
La corde sensible
Toute cette belle épopée est magnifiée par l’incroyable bande-son de Gustavo Santaolalla. Tout comme le premier volet, on attendait beaucoup de la composition musicale de cette suite et l’on n’est absolument pas déçu. S’il y a peut-être un peu moins de thèmes marquants, il n’en reste que l’on frétille à chacune des notes jouées qui viennent sublimer le récit. Même constat pour le sound design où les artistes et ingénieurs du son ont fait un boulot remarquable sur l’ambiance sonore. Celle-ci renforce la tension palpable tout au long de l’aventure, la nervosité et la violence du scénario.
On y retrouve également un incroyable casting avec Troy Baker, Ashley Johnson, Laura Bailey, Patrick Fugit ou encore Ashly Burch qui nous offrent tous des performances exceptionnelles. En version française, un très bon travail également au niveau des doublages, avec quelques petites surprises, notamment du coté des personnages secondaires.
Un bon acting dans l’ensemble, contrebalancé par de petites imperfections. On y retrouve quelques soucis de traduction dans les doublages, une synchronisation labiale parfois limite (bien moins impactant qu’au lancement du premier The Last of Us) ou encore un vouvoiement assez insolite entre deux personnages principaux, ce qui n’aurait pas dû être le cas. Gageons que cela soit corrigé dans les premières mises à jour.
N’oublions pas bien sûr le mode photo, traditionnelle fonctionnalité dans les productions du genre, qui est ajouté avec le patch day one. Celui-ci permet de prendre les plus beaux clichés possibles en jouant sur différents filtres et angles de vue. Plutôt complet, il s’agit toujours de l’outil gadget donc indispensable pour les amateurs du genre.
De l’accessibilité pour tous
Terminons ce test par une très bonne initiative de la part de Naughty Dog. Le studio a jugé bon de développer au maximum l’accessibilité de son titre. Et soyons clairs, c’est très probablement le jeu le plus accessible à ce jour. Au total, ce sont plus de 60 paramètres inclus pour jouer sur les options de textes, d’audition, de commandes et d’autres fonctionnalités. Cela permet à tous les joueurs de profiter au maximum de l’expérience.
On y retrouve des préréglages avec des paramètres recommandés d’accessibilité visuelle, auditive et motrice et il suffit de lancer le menu pour modifier tout cela. On peut par exemple, personnaliser entièrement les commandes, en réassignant les touches de la DualShock 4, ses vibrations ou son pavé tactile, jouer sur l’affichage des sous-titres (présence ou non, taille, fond noir…), le contraste de l’interface, un mode daltonien, la possibilité de modifier les mouvements simulés en 3D et bien d’autres choses encore. Une excellente initiative à saluer et à applaudir.
Par ailleurs, cette personnalisation est aussi présente dans la difficulté du jeu : il est possible de jouer sur cinq réglages (joueur, ennemis, alliés, furtivité, ressources) sur cinq degrés différents (allant de très facile à survivant). Vous pouvez donc partir sur une difficulté maximale ou alors personnaliser votre aventure en augmentant la présence des ressources mais en rendant les ennemis plus agressifs et la furtivité plus compliquée. Une personnalisation bienvenue qui permet d’adapter l’expérience à chaque profil de joueur.
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