Le tennis, sport exigeant et complexe, a toujours représenté un défi pour les développeurs de jeu vidéo contrairement à d’autres sports. Bien que certains titres aient tenté d’en capturer l’essence, très peu ont réussi à le faire avec brio. Top Spin a longtemps régné en maître, mais depuis, les jeux de tennis ont perdu en popularité et en qualité. En 2024, Big Ant Studios revient à la charge avec Tiebreak : Official Game of the ATP and WTA, une tentative de redonner vie à la simulation de tennis avec des licences officielles et un grand nombre de joueurs professionnels. Mais cette ambition parvient-elle à se concrétiser ? Loin des strass et paillettes des grandes franchises sportives comme EA Sports FC ou NBA 2K, Tiebreak se veut être un jeu authentique, mais réussit-il vraiment à faire vibrer les fans ?
Conditions de test: Nous avons testé Tiebreak sur PlayStation 5, console sur laquelle nous avons joué durant un peu plus de vingt heures, à travers les différents modes du jeu.
Un potentiel gâché par des faiblesses importantes
Le gameplay est le cœur de toute simulation sportive, et Tiebreak ne fait pas exception à cette règle. La prise en main du jeu est relativement rapide et intuitive, permettant aux joueurs, même novices, de se familiariser avec les commandes. Les options de gameplay incluent les coups standards que tout joueur de tennis s’attend à voir dans une simulation : topspin, slice, frappes à plat et lobs. La variété des coups semble a priori prometteuse et offre une certaine profondeur stratégique. Cependant, malgré cette diversité apparente, des déséquilibres dans l’efficacité des coups viennent rapidement nuancer l’expérience. Un problème majeur réside dans l’utilisation du coup à plat, censé être puissant mais risqué. Dans Tiebreak, ce coup se révèle beaucoup trop hasardeux et n’offre que peu d’avantages par rapport à un coup lifté. Le manque de récompense pour l’exécution de ce type de frappe, combiné à la simplicité et à la sécurité des coups en topspin, limite la diversité des échanges. De fait, les joueurs se retrouveront à utiliser en grande majorité les mêmes coups, ce qui enlève une partie du plaisir de varier les stratégies en fonction des coups choisis par l’adversaire.
Une autre déception concerne les surfaces de jeu. Que l’on joue sur dur, sur gazon ou sur terre battue, la différence dans le comportement de la balle est quasiment imperceptible. Dans la réalité, ces surfaces jouent un rôle crucial dans la manière dont un match est disputé. Sur terre battue, par exemple, les échanges sont souvent plus longs, avec des balles plus lentes et plus de glissades, alors que sur gazon, les points sont plus rapides en raison de la vitesse accrue de la balle. En négligeant cet aspect, Tiebreak enlève une partie de la profondeur stratégique qui fait la richesse du tennis professionnel.
Malgré ces critiques, il faut reconnaître que le ressenti des coups et la fluidité des échanges dans Tiebreak sont agréables. Le jeu parvient à retranscrire avec succès le plaisir de placer une belle frappe croisée ou de remporter un long rallye. Les joueurs pourront s’investir pleinement dans des échanges tendus où chaque erreur de positionnement peut coûter cher. C’est dans ces moments que le jeu brille vraiment, mais ils sont souvent perturbés par des faiblesses mécaniques qui peuvent frustrer à long terme.
En dehors des mécaniques de gameplay, l’intelligence artificielle du jeu et le mode carrière constituent à leur tour deux éléments essentiels dans toute simulation de sport. C’est ici que Tiebreak révèle plusieurs nouvelles de ses limites. L’IA, malgré des tentatives d’adaptation à différents styles de jeu, souffre d’un manque de finesse. À des niveaux de difficulté élevés, elle devient extrêmement précise et retourne presque tous les coups sans difficulté, rendant les matchs souvent frustrants, car elle ne semble pas commettre d’erreurs humaines. En revanche, aux niveaux les plus faibles, l’IA devient passive, à peine capable de réagir aux coups de base. Ce déséquilibre fait qu’il est difficile de trouver un juste milieu pour un défi équilibré et satisfaisant.
Une des faiblesses les plus flagrantes de l’IA réside dans sa capacité à anticiper vos services. Dès que vous sélectionnez un type de service, que ce soit un slice, un kick ou un service à plat, l’adversaire se repositionne instantanément, avant même que la balle ne soit lancée. Cette réaction presque télépathique enlève toute la stratégie derrière la variation des services. Cela rend certains coups, comme le service slice, complètement inutiles car ils ne prennent jamais l’adversaire au dépourvu tout en ajoutant une prise de risque pour le joueur qui, dès lors, choisir un coup plat sécurisé.
Le mode carrière, qui devrait être le pilier central de l’expérience solo, est lui aussi en demi-teinte. Certes, il propose une vaste sélection de tournois sous licence officielle et permet aux joueurs de créer leur propre avatar pour gravir les échelons du circuit ATP ou WTA. Toutefois, cette progression est vite entachée par un manque de développement clair des compétences de votre personnage. Que vous enchaîniez les victoires ou les défaites, il n’y a que peu de sentiment d’évolution. La progression est figée, et vous n’avez pas la sensation que votre joueur s’améliore au fil des matchs. Cela contraste fortement avec d’autres simulations sportives, où la personnalisation et l’amélioration des compétences sont essentielles à l’expérience.
De plus, le mode carrière manque cruellement d’interactions narratives qui permettraient aux joueurs de se sentir investis dans leur propre histoire. Les interviews post-match ou les interactions avec les autres joueurs sont rares et superficielles, ce qui empêche de réellement s’immerger dans l’univers du tennis professionnel. Là où d’autres jeux de sport investissent parfois dans des scénarios captivants, Tiebreak laisse cette dimension narrative inexploitée, ce qui est regrettable. Sans parler de l’inutilité des achats possibles dans la carrière. Certes, les joueurs peuvent engager un coach, un kiné, ou un responsable de communication, mais ces derniers n’apportent que très peu à l’expérience. Sans parler des sponsors qui, outre l’argent, n’apportent aucun bénéfice au jeu. De simples objectifs par sponsor auraient été les bienvenus afin d’apporter une pointe de réalisme supplémentaire à l’histoire du joueur.
Un effort visuel en demi-teinte
Sur le plan visuel, Tiebreak fait montre de quelques atouts indéniables, mais là encore, le résultat est mitigé. Les modélisations des joueurs sous licence sont plutôt réussies, notamment pour les stars comme Novak Djokovic, Rafael Nadal ou encore Naomi Osaka. Les détails des gestes caractéristiques de chaque joueur, comme les routines avant de servir ou les tics particuliers, sont bien retranscrits, ce qui ajoute une touche d’authenticité que les fans de la discipline ne bouderont pas. Cependant, pour les joueurs moins connus ou en dehors du top 10 mondial, la qualité de modélisation diminue, créant alors un déséquilibre visuel indéniable.
Les environnements de jeu, tels que les courts et les stades, sont bien modélisés, mais l’ambiance autour des matchs reste étonnamment plate. Les spectateurs manquent d’énergie et de réalisme dans leurs réactions, ce qui enlève une bonne partie de l’atmosphère des grands tournois. Les éléments statiques, comme les ramasseurs de balles ou les juges de ligne, contribuent également à une certaine rigidité visuelle. On regrette également l’absence de marques de balles sur les surfaces, notamment sur terre battue, où ce détail visuel aurait pu renforcer l’immersion.
En ce qui concerne l’audio, le jeu est fonctionnel mais loin d’être exceptionnel. Les bruits de raquettes, les échanges et les applaudissements sont bien présents, mais le tout manque de dynamisme, notamment du côté du public qui réagit parfois en retard ou à l’opposé de ce qu’on attendrait de lui. Parfois, certains coups ne produisent même aucun son, rompant complètement l’immersion. De plus, la bande-son se fait assez discrète, sans apporter de réel soutien à l’ambiance générale des matchs.
En termes de modes de jeu supplémentaires, Tiebreak propose les classiques habituels comme les matchs rapides, les tournois, ainsi qu’un mode en ligne. Le mode multijoueur en ligne est stable mais manque de fonctionnalités avancées. Les joueurs peuvent s’affronter en matchs amicaux ou compétitifs, mais les tournois en ligne manquent de profondeur. Il n’y a pas de véritable système de classement mondial, ni d’options pour organiser des tournois personnalisés, ce qui limite la longévité du mode en ligne.
De plus, malgré la possibilité de créer et personnaliser ses propres joueurs et terrains, le mode de création reste assez basique et n’ajoute pas de contenu substantiel pour prolonger l’expérience de jeu. Le mode Slam Challenge, qui permet de rejouer les grands moments de la carrière de Djokovic, aurait pu apporter une vraie valeur ajoutée, mais il est trop limité dans son contenu pour captiver durablement.
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