La dernière création de Splashteam, Tinykin, a suscité pas mal d’attentes auprès du public curieux des productions indépendantes. Français, qui plus est, le titre s’est montré sous différentes formes depuis deux ans, et plus le temps nous rapprochait du 30 août 2022, jour de sa sortie, plus il donnait envie de poser ses mains dessus.
Notre dernier aperçu de Tinykin symbolisait cet enthousiasme, et pour cause : un platformer 3D fluide, coloré et détente qui s’inspire de mécaniques à la Pikmin, accompagné de la touche d’humour et de références amusantes, il y avait de quoi être intrigué par le jeu complet.
Nous nous étions quittés, à la fin de l’aperçu, en nous demandant si le titre était en mesure de maintenir l’efficacité de sa recette sur la durée. Et, destiné aux plateformes PC, PlayStation 5, Xbox Series, PlayStation 4, Xbox One et Switch, il se pourrait bien que le bébé du studio montpelliérain ait plus que réussi son coup.
Conditions de test : Nous avons joué à la version PlayStation 5 de Tinykin pendant un peu plus de 8h, le temps de voir le bout de l’aventure et de la terminer à 100%.
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Tandis que l’humanité vit sur la planète Aegis une époque florissante et bardée de technologie avancée, Milodane, archéologue et chercheur dans une des plus grandes universités du monde, sait que son peuple vient d’ailleurs.
En suivant ce signal d’origine humaine, il parvient à localiser la source émise d’une autre galaxie. Suite à sa téléportation, il subit une miniaturisation et se retrouve dans une maison des années 90 où il est accueilli par Ridmi, un insecte scientifique visiblement bien renseigné sur les lieux. Celui-ci cherche à poursuivre les travaux d’Ardwin, un sage qui a autrefois habité dans cette maison et qui projetait d’assembler une machine capable de voyager dans l’espace. Milo va donc aider Ridmi à trouver les cinq composants manquants en fouillant la maison.
Mais notre héros ne sera pas seul puisque les tinykin, petites créatures aux capacités étonnantes, semblent le suivre naturellement et comptent user de leurs capacités pour lui donner un coup de main. D’ailleurs, on fait d’entrée de jeu connaissance avec les tinykin roses. Faisant preuve d’une grande force, cette variété permet de pousser des objets, d’en porter, ou de les amener d’un point A à un point B, dès lors qu’on les lance sur la cible choisie.
Au cours de cette introduction de quelques minutes, on parvient rapidement à se faire une première idée des mouvements de Milodane, fluides et réactifs. Il peut sauter et surtout planer grâce à une bulle de savon qui l’entoure temporairement. Notre chercheur miniature se voit également offert un skate-savon confectionné par Ridmi, utile pour se déplacer rapidement dans une maison qui ne manque pas de place.
Des petits compagnons à l’aide précieuse
C’est en pénétrant dans la Cité de Sanctar, le tout premier niveau du jeu, que l’on prend pleinement conscience de notre condition d’individu aux dimensions réduites. À taille humaine, la cité s’apparente à un salon rempli de moult instruments de musique, étagères et autres meubles. À l’échelle d’un insecte, elle représente davantage un environnement très spacieux à parcourir.
Dans cette zone, comme dans toutes les suivantes, notre mission est de récupérer une pièce de l’appareil de Ardwin, ici un étendard détenu par un groupe de punaises. Afin de mener à bien ces objectifs principaux, l’idée est bien souvent de collecter suffisamment de tinykins, et ainsi s’ouvrir le chemin.
Chaque niveau ou presque ajoute son lot unique de petites bestioles venant compléter celles que vous connaissez déjà. La Cité de Sanctar nous amène à faire la connaissance des tinykin rouges. Ceux-ci ont la particularité d’exploser à l’impact, ce qui sert notamment à créer des passages, à détruire des cages contenant d’autres tinykin ou même débloquer des raccourcis. Puis on rencontre les tinykin verts, permettant de prendre de la hauteur en formant une échelle, ou encore les tinykin bleus, qui arrivent à conduire l’électricité d’un point A à un point B pour activer des appareils.
Alors, oui, la comparaison avec les Pikmin semble évidente et reste valable dans la mesure où chaque couleur de créature correspond à une fonction particulière. Et, tout comme Olimar, Milodane peut siffler histoire de ramener tous les tinykin prêts de lui. Mais est-elle réellement révélatrice de ce qu’offre le soft manette en main?
Si Pikmin-like que ça ?
Là où Pikmin fait intervenir une gestion du nombre de créatures, avec notamment certaines qui peuvent tomber au combat ou être laissées derrière soi, Tinykin simplifie largement cet aspect-là, et laisse place à la fluidité de l’action et de l’exploration sans jamais se retrouver bloqué ou pressé d’une quelque façon que ce soit.
Chaque pièce de la maison dispose d’un nombre fixe de tinykin qui ne peuvent pas voyager au-delà cette zone, et affiche une marge largement suffisante histoire de ne jamais en manquer pour réaliser toutes les actions possibles en leur présence. Splashteam fait donc le pari du fun, sans prise de tête, et nous laisse profiter de ces petites bestioles sans avoir à se soucier de ce qui leur arrive.
C’est ainsi par exemple que des tinykin verts, constitués pour faire une échelle à tel emplacement de la salle de bain, peuvent être ramenés à tout moment et peu importe l’endroit auquel on se trouve dans cette même salle de bain. On pourrait trouver cela un peu abusé, ou trop simple, et c’est un avis, nous le verrons plus tard, qu’il est possible de se faire d’une manière générale sur le titre. Quoi qu’il en soit, d’un point de vue confort de jeu, on apprécie grandement.
Vous l’aurez évidemment compris, au-delà le fait qu’elles fassent l’objet du titre du jeu, ces bestioles font le cœur du gameplay et se constituer l’armée la plus importante possible maximise les chances d’arriver au bout d’un niveau et de découvrir tous ses secrets. Et Dieu sait qu’il y a des choses à voir dans cette maison.
Une maison pleine de secrets
Bien que nous devions réussir un objectif principal dans chacune des pièces de la maison d’Ardwin, on se laisse emporter par ce qui constitue l’une des grandes forces de Tinykin : l’envie d’explorer. En faisant la taille d’une puce, on fait face à des pièces truffées de meubles et d’objets du quotidien.
La maison offre alors mille et un recoins au sein desquels se faufiler, pour y dénicher tous les secrets cachés. On trouvera notamment des œufs de tinykin qui laisseront échapper les petites bestioles en passant dessus avec Milo, mais aussi du pollen.
Le pollen représente un peu les « patounes » du jeu. Présentes en grande quantité dans toutes les pièces de la maison, ces petites boules sont chères à Sikaru, l’insecte brasseur de nectar. Il vous attendra à son stand présent dans chacun des niveaux, prêt à concocter une préparation à l’aide du pollen collecté.
En disposant sur soi d’un montant suffisant, Sikaru nous donne une bulle supplémentaire. En d’autres termes, le temps de vol se voit légèrement accru. Après, si on a l’âme d’un collectionneur, on peut toujours se lancer dans la récupération de toutes les particules de pollen restantes. Un défi assez costaud lorsqu’on sait à quel point n’importe quel endroit d’une pièce est susceptible de renfermer quelque chose. Mais, en même temps, c’est ce qui fait principalement que jouer à Tinykin nous enlève la perception du temps qui passe.
Il est libre Milo
Le titre affiche un tel flow qu’on ne sait ni s’arrêter de jouer, ni où donner de la tête. On se dirige d’abord vers cette armoire, mais sur le chemin on remarque que sous ce meuble il y a un petit espacement où se cachent quelques particules de pollen, puis en sortant on oublie complètement d’aller à l’endroit initial car des œufs ou bien des PNJ ont attiré notre regard à l’autre bout de la pièce.
Encore mieux, on ne se sent jamais perdu puisque les niveaux sont ouverts et bénéficient tous de raccourcis. Il en existe deux types : ceux qui permettent de parcourir la verticalité du niveau, et ceux qui au contraire relient les extrémités de la pièce vers le centre. Il est donc facile et très rapide de rejoindre une portion du niveau déjà explorée, pour peu que ces raccourcis aient été débloqués grâce à des tinykin rouges, et c’est encore une fois la fluidité et la continuité de l’action qui en sortent honorées, pour notre plus grand plaisir.
Nous l’avons rapidement abordé, la difficulté globale va clairement dans ce sens aussi. Milo peut certes se noyer, se faire écraser par des plaques ou bien craindre le feu, les dangers restent rares pour notre héros, sans aucun ennemi non plus pour nous barrer la route. De toute manière, une mort nous fait réapparaître assez souvent juste avant le danger. Ne comptez donc pas ici sur un gros challenge, la place est laissée, une énième fois, au fun.
En tout cas, cette sensation de fun ininterrompu se vit tout bonnement durant l’intégralité de la huitaine d’heures que propose Tinykin, L’envie de tout explorer ne nous quitte jamais, et on le doit très certainement aussi à la constitution d’un univers qui titille constamment notre curiosité et notre soif de découverte.
Seule, peut-être, la physique de saut arrive à nous faire parfois grincer des dents. Faisant preuve d’une assez forte gravité, un faux pas et l’on tombe à pic vers le sol. À moins d’un réflexe activant la bulle de vol et en cas de chute assez haut dans le niveau, on se retrouve sans trop faire attention tout en bas de la pièce en un rien de temps.
La richesse d’un univers de poche par son level design…
Dissimuler toute une quantité de secrets et de collectibles dans presque tous les recoins possibles réveille forcément notre côté aventurier, mais la manière de le faire amplifie sans conteste cette volonté des développeurs de nous scotcher à leur jeu. Cette maison est dans l’état tel qu’elle a pu être laissée en 1991, et c’est tout un level design qui, en plus de faire briller l’exploration, la liberté de mouvement de Milo ou l’utilisation instinctive des tinykin, le fait en respectant et en mettant en valeur ce contexte.
Des punaises, libellules, fourmis, ou autres bousiers ont élu domicile un peu partout, faisant d’un placard ouvert une maison de retraite pour vieux insectes, d’une baignoire remplie d’eau mousseuse une pool party euphorique, ou encore d’un circuit de petites voitures un lieu de Grand Prix de F1 entre frelons.
Cette vie d’une nouvelle échelle s’installe donc auprès d’objets et de reliques de 1991. En témoignent les VHS retrouvées sur des étagères, le jouet microphone similaire à celui d’Andy dans Toy Story, les tapis de mousses colorés frappés de lettres ou de chiffres, ou bien le téléviseur cathodique, entre autres, que l’on peut croiser au cours de nos expéditions.
On sait que nous parlons d’un jeu où les insectes parlent et où on incarne un voyageur intergalactique miniaturisé, mais en tenant compte de cette manière de créer un univers, on sent vraiment que la vie dans cette maison est, d’une certaine manière, cohérente. En tous les cas, ce foyer possède une âme, entretenue tout autant par le mystère planant autour de Ardwin, que par la civilisation qui s’y est formée ainsi que sa façon d’évoluer.
… Et ses habitants loufoques
Les insectes nous avait déjà marqué au cours de la preview, après avoir visité la Cité de Sanctar, en raison de leurs répliques sorties bien souvent avec humour, et de leurs noms choisis en fonction de références à la vraie vie. Et bien l’équipe ne s’est pas privée pour maintenir ce ton tout au long de l’aventure. Un nombre hallucinant de séries télé, de films et de personnages célèbres de tous horizons est détourné ici à la sauce Splashteam.
Quel jeu peut se targuer de faire allusion à la fois aux Inconnus, à David Guetta, à Bob l’Eponge, et au Bigdil de Vincent Lagaf’ ? Les développeurs imbriquent également leurs références dans des quêtes secondaires amusantes, au cours desquelles on gagne des reliques d’Ardwin à admirer au musée de Louvretro, dans le hub.
Les joueuses et joueurs pourront par exemple aider la fourmi Jovébosé à distribuer des affiches politiques pour sonner la révolte, ou bien mettre en avant la notoriété du restaurant de Micheline, accompagnée de ses serveurs Biben et Dum. Bien souvent, les « refs » sont gratuites, malgré le fait de les caser avec une certaine cohérence, mais parfois, elles reprennent des discussions et des thématiques plus ou moins actuelles.
Le cliché de La Poste a visiblement encore de beaux jours devant lui, le complotisme en prend pour son grade assez régulièrement, que ce soit par l’évocation de la Terre plate ou d’élites gouvernant dans l’ombre, et la lutte des classes, sous une parodie de la Révolution Française, est elle aussi abordée.
On aurait envie de tout citer, mais il est évidemment d’autant plus savoureux de les découvrir soi même et de s’amuser à en identifier un maximum. Presque un jeu dans le jeu. En d’autres termes, faire connaissance avec chacun des habitants de la maison d’Ardwin représente une autre curiosité à assouvir lorsque l’on a commencé à prendre cette habitude lors du premier niveau, et on ne le regrette jamais.
L’audio, ça a son importance
Terminons ce test en parlant bien entendu du travail audio effectué par Alexis Laugier. Cet aspect du développement avait été abordé au cours de la quatrième édition de l’AG French Direct, et c’est bien logique d’en reparler ici tant il fait l’objet d’un grand soin. Chaque niveau possède son propre thème, de très bonne qualité, lui-même décliné en plusieurs variations selon l’endroit où se trouve Milo au sein de la pièce.
Dans les terres d’Ambrose, par exemple, il arrivera donc d’entendre des sonorités orientales du thème en traversant un marché rappelant des ambiances de souk, et d’avoir une musique qui vire davantage dans des notes de clavecin lorsque l’on se trouvera dans les hauts placards de la cuisine, où réside les insectes bourgeois des lieux.
Il n’y a pas que la musique qui est adaptative. En effet, les bruits de pas de Milo collent avec la surface sur laquelle il pose ses pieds. Métal, carton, tissu, tapis, plastique, bois, un très grand nombre de sons différents nous accompagnent au cours de nos escapades sur la multitude d’objets et de matériaux se dressant sur notre route. Ces musiques et sons dynamiques donnent alors beaucoup de corps à l’univers déjà bien riche qu’est celui de Tinykin, et que l’on parcourt avec encore plus d’immersion.
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