Lorsqu’en 2019 débarque Wargroove, la presse et les joueurs sont unanimes : on tient enfin le digne successeur de Advance Wars. Et effectivement, tout y était. Non content de reprendre les mêmes bases en termes de gameplay, à savoir du Tactical guerrier où les unités sont « jetables », le titre de Chucklefish s’armait aussi d’une esthétique très old school, avec un pixel art rappelant beaucoup le rendu des jeux de Intelligent System. Ajoutez à cela une histoire pas déplaisante, teintée d’un humour bon enfant et mettant en scène des personnages hauts en couleur, une dimension multi très appréciable, mais surtout un énorme contenu et des possibilités quasiment infinies pour en créer du nouveau… nous tenions là assurément l’un des meilleurs jeux de l’année.
Alors évidemment, quatre ans et demi plus tard, alors que s’apprête à débarquer Wargroove 2, une suite qui se sera faite désirer, les fanatiques du Tactical sont en émoi. Après avoir eu largement le temps de retourner le premier volet dans tous les sens, de s’essayer aux nombreuses maps et campagnes créées par la communauté et disponibles gratuitement en ligne, il est enfin temps de passer à un nouvel opus, promettant des nouveautés intéressantes. Ces ajouts seront-ils suffisant pour justifier l’achat de cette suite ? Et les joueurs ne seront-ils pas déçus, après le retour tant attendu de Advance Wars en début d’année ? C’est ce que nous allons tâcher de voir ensemble, à travers ce court test.
Conditions de test : Nous avons passé près de vingt heures sur la version Nintendo Switch du jeu, principalement sur TV. Il est bon de noter que si nos captures sont en anglais, le jeu est, lui, proposé entièrement en français. Ce test est garanti sans spoiler.
On prend les mêmes
Le retour de Advance Wars en début d’année, via un remake des deux premiers volets, aura certes été un petit événement au sein de la communauté des fans de Tactical. Malheureusement, malgré des qualités indéniables, nous n’y trouvions aucune véritable surprise. En vérité, hormis un lifting graphique qui n’était de surcroît pas du goût de tous, on a vraiment l’impression d’avoir eu entre les mains les versions d’origine, parues sur Game Boy Advance. Ainsi, le champ restait complètement libre pour l’arrivée de Wargroove 2, qui peut lui aussi se targuer d’une communauté solide, ayant déjà bien fait vivre son prédécesseur.
Prédécesseur qui reprenait donc la formule de la franchise Advance Wars. Enfin plus spécifiquement de Dark Conflict, le dernier épisode paru sur Nintendo DS, et qui permettait aux généraux de s’incarner directement sur le champ de bataille. Une méta un brin différente de ce que proposaient les précédents volets, mais qui avait ses avantages, notamment en confinant à une difficulté plus relevée. Chose que reprendra à son tour Wargroove, dont le challenge très évolutif au sein de sa campagne aura su largement contenter les habitués du genre. Et c’était sans compter sur son éditeur de maps et d’histoires.
Sans grande surprise, Wargroove 2 reprend la même tambouille, trait pour trait, n’y ajoutant que quelques subtilités. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle ce test n’est pas très long. Certes, il y a beaucoup à dire sur le jeu pris seul. Mais en observant la continuité de cette jeune série, on constate surtout que l’évolution aura été très douce. Autant qu’entre un Advance Wars premier et second, finalement, quoique ces deux cartouches cultes avaient quelques différences notables sur le plan visuel. Ici, Chuckelfish a repris exactement le même moteur, les mêmes sprites, et le résultat n’est guère surprenant.
Alors entendons-nous bien, ce n’est absolument pas un reproche. Au même titre que pour Blasphemous et sa suite, qui sortait cet été, on comprend que Wargroove 2 demeure un projet d’une petite envergure, en d’autres termes indépendant, et le résultat est parfaitement saisissant tel quel. Parce que l’esthétique en Pixel Art fonctionne encore merveilleusement bien, que les développeurs font preuve d’un véritable génie dans leur conception du Character Design, et que, plus généralement, son aspect Néo-Rétro lui confère d’emblée un charme absolument indéniable. Là où l’on serait tenté d’être moins tendre, néanmoins, c’est au niveau des nouveautés.
Parce que finalement, hormis un éditeur de campagnes et de maps qui a un brin évolué, et permet toujours des choses incroyables, on trouve peu de neuf dans ce Wargroove 2. Une nouvelle faction, de nouveaux généraux, un système de pouvoir qui se dote de deux jauges au lieu d’une, quelques nouvelles unités à recruter et des items à récupérer sur le terrain pour les améliorer momentanément… On retiendra surtout le nouveau mode Conquêtes, qui s’apparente à un Rogue Lite plutôt bien pensé, avec trois modes de difficulté, plusieurs niveaux à débloquer et des possibilités intéressantes, de quoi prolonger le plaisir encore un peu.
Prolonger le plaisir
Parce que oui, le mot d’ordre de ce second volet est définitivement celui-ci : prolonger le plaisir. On a droit à quatre nouvelles campagnes, auxquelles s’ajoute par ailleurs un prologue faisant plus ou moins office de tuto, tournant autour d’une nouvelle engeance et fonctionnant à merveille. L’écriture est toujours aussi soignée, l’humour toujours omniprésent, et malgré son aspect très rétro et coloré, Wargroove 2 parvient parfois à véhiculer de fortes émotions, à la mort d’un personnage par exemple. On ne boudera pas notre plaisir devant la nouvelle faction, au sein de laquelle les interactions sont plutôt touchantes par ailleurs, ou au contact de personnages que l’on connaît bien.
Les nouvelles unités ne réinventent pas la roue, mais apportent un petit supplément d’âme aux affrontements, qui jouissent toujours de possibilités stratégiques absolument jubilatoires. Possibilités que le mode Campagne vous fait entrevoir à son rythme, en vous confrontant d’abord à des maps assez restreintes et des challenges plutôt minces, avant de vous lâcher dans le grand bain. Du moins, si vous choisissez de ne rien changer à ce que les développeurs ont inscrit comme difficulté de base. Parce qu’il est toujours possible de modeler cette dernière selon ses envies, avec par exemple des modifications dans les dégâts reçus, ou la possibilité de recommencer un ou plusieurs tours à chaque bataille.
On est une nouvelle fois soufflés par ce constat : Chucklefish est d’une générosité qui fait un bien fou ! Parce que Wargroove 2 est affiché à moins de 20 euros (et bénéficiait même d’une promotion non négligeable sur les quelques jours précédant sa sortie), mais s’offre un contenu trois étoiles. Les différentes campagnes vous occuperont entre quinze et vingt heures, le mode Conquête a de quoi vous tenir éveillé un long moment lui aussi, et si vous vous sentez d’humeur créatrice, il reste toujours la possibilité de modeler vos propres maps et histoires. Et bien sûr, attendez quelques jours, puis foncez sur le menu Partage, vous permettant de récupérer les créations de la communauté, qui ne devraient pas tarder à pulluler.
Ainsi, ce qu’il faut retenir en premier lieu de ce second volet, c’est qu’il est peut-être plus proche d’un Wargroove 1.5 que d’une suite en bonne et due forme. Rien n’a changé dans son gameplay, les cinématiques sont toujours un peu cheap, et hormis le contenu scénarisé inédit qui occupe quand même un long moment, on sent que tout aurait presque pu sortir en DLC pour le premier volet. Mais là encore, cela reste à nuancer. Parce que les deux opus sont vendus moins de vingt euros, ce qui demeure absolument dérisoire pour tout ce qu’ils ont à offrir. Et de toute façon, tous ceux qui ont apprécié le premier volet savent pertinemment qu’ils ne passeront pas à côté de cette suite.
Parce que si cette dernière manque peut-être un peu d’ambition, en se cantonnant à une poignée de nouveautés et en reprenant globalement les mêmes modes que son prédécesseur, elle n’en conserve pas moins toutes les qualités de Wargroove, sans exception. De l’excellente bande sonore au visuel plein de charme, en passant par le gameplay facile d’accès, le level design de la campagne très soigné, les possibilités immenses de création, et le contenu potentiellement infini. Advance Wars 1 + 2 Re-Boot Camp a du souci à se faire, lui dont la direction artistique ne faisait déjà pas l’unanimité, parce qu’à compter de ce jour, les fans de la franchise de Intelligent System n’ont plus aucune raison de toucher à ce double remake paresseux.
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