Auparavant un simple jeu de survie procédural lors de son accès anticipé, We Happy Few a fait bien du chemin depuis. Le titre s’offre désormais une sortie définitive sur PC, PS4 et Xbox One, avec évidemment un mode histoire. Le soft de Compulsion Games, se déroulant dans une Angleterre d’après-guerre alternatif, est-il finalement à la hauteur des espérances que nous avions placées sur lui ?
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ToggleWelligton Wells, la ville de la drogue
Chose pas moins appréciable en premier lieu, We Happy Few se découpe en trois actes, dont chacun représente en fait un nouveau personnage jouable à chaque fois. Nous suivrons tout d’abord le périple d’Arthur Hastings, ensuite de Sally Boyle, pour terminer avec Ollie Starkey. Ces trois protagonistes, sont plus ou moins liés. En effet, ils se connaissent parfaitement, et se croisent par moments dans ces trois actes. Leur objectif commun est de s’enfuir de la ville fictive de Welligton Wells, où la plupart des habitants sont sous l’emprise de la Joy, une drogue puissante qui rend les gens heureux quelles que ce soit les circonstances.
Au premier abord, il faut avouer que l’histoire des trois personnages est globalement intéressante, et permet de voir le point de vue de chacun d’entre eux. Que ce soit Arthur Hastings, Sally Boyle ou encore Ollie Starkey, nos trois protagonistes sont clairement attachants. Leur caractère et leur psychologie sont franchement bien construits tout le long, avec parfois quelques petits twists sympathiques.
La narration se neutralise toute seule au fil de notre progression, mais on pourra compter sur des personnages attachants, et hauts en couleur.
Mais hélas, la narration en prend malgré tout un coup. En effet, on pourra reprocher à l’histoire de parfois se perdre un peu en route, et de se doter de quelques petites incohérences dans les cinématiques, notamment sur l’histoire de Sally Boyle. On oubliera donc assez vite la narration, mais on appréciera cependant le tempérament et les motivations de chaque personnage, qui sauvent un peu les meubles d’une narration poussive, et sans grosse surprise sur la fin. A noter qu’à la toute fin de ces trois actes, vous aurez un choix à faire, mais cela ne sera qu’anecdotique, et n’apporte pas grand-chose, et quelques petites zones d’ombres subsisteront dans We Happy Few.
Cela dit, le background proposé dans We Happy Few ne laisse cependant pas vraiment indifférent. D’ailleurs et on le sait, le studio Compulsion Games a été fondé par un certain Guillaume Provost, anciennement chez Arkane Studios, qui avait bossé sur Dishonored. Qu’on se le dise, on retrouve un peu de cette patte artistique sur We Happy Few, qui mélange un peu du Dishonored, et du Bioshock. Ce pot-pourri donne naissance à une vision alternative de l’Angleterre des années 60, tout aussi joyeuse avec la Joy, que glauque et clairement dérangeante. Soyons honnêtes, ce petit côté british est envoûtant, et nous en met incontestablement plein la vue artistiquement parlant.
En joy !
We Happy Few a radicalement évolué depuis son accès anticipé. En attendant un mode bac à sable qui arrivera probablement bientôt, le soft nous propose un mode histoire, avec tout un aspect monde ouvert. De plus, We Happy Few mélange en somme du crafting et donc un côté survie, de l’exploration à foison, des combats, et bon nombre de quêtes principales comme secondaires à réaliser.
D’ailleurs, et chose plutôt surprenante à première vue, le système de crafting est efficace. Bien évidemment, il n’en reste pas moins classique car il s’agira en général de récolter diverses ressources pour crafter lesdits objets – des rossignols pour crocheter des serrures, de nouvelles armes blanches, des produits chimiques, de quoi se soigner etc. En soi c’est générique, et il est possible de crafter directement via le menu de notre personnage, ou en allant directement vers des établis prévus à cet effet, qui sont d’ailleurs améliorables au fil du jeu. Il est au passage assez regrettable qu’il soit impossible de réparer les armes que l’on ramasse, qui se dotent évidemment d’une jauge de durabilité. On pourra pester sur ce point mais néanmoins, au-delà de ça, les amateurs de craft seront sûrement aux anges de trouver un système basique qui fonctionne plutôt bien.
Dans l’interface de notre personnage, on y trouve également un inventaire, la map du jeu, mais aussi une fiche montrant l’état actuel de notre protagoniste, ainsi qu’un arbre à compétences. L’inventaire vous permettra dans un premier temps de stocker toutes les ressources que vous trouvez ou bien modifier la tenue de votre personnage si nécessaire – notamment Arthur, pour passer incognito aux yeux des habitants drogués à la joy comme parfaitement normaux. Sans compter la map relativement lisible, vous aurez également une section où vous pourrez observer votre état actuel. Vous pouvez observer votre jauge de joy – votre pourcentage de perte de mémoire, votre dépendance etc., ou encore votre faim, votre soif ainsi que votre sommeil. Qu’on se le dise, c’est encore une fois d’un classicisme flagrant, et sachez que vous gagnez logiquement de l’expérience en terminant des quêtes, et cela vous permettra par la suite de glaner des points de compétences. Il faut noter que nos trois personnages verront leur arbre à compétences changer tout juste légèrement, en fonction de leurs diverses habiletés.
Justement, nos trois héros seront radicalement différents en matière d’approche. En effet, Arthur Hastings sera un personnage très débrouillard, équilibré, et surtout assez brillant dans l’art de crafter dans le domaine purement mécanique, tandis qu’il sera une vraie buse côté chimie. Il pourra d’ailleurs courir plus vite, et devra gérer évidemment sa faim, soif, et sommeil, au risque de subir quelques pénalités d’endurance ou en combat. Ensuite il y aura Sally Boyle. Elle sera plus fragile niveau santé, et devra adopter des approches plus discrètes. Elle sera très bonne en crafting dans le domaine de la chimie en revanche. En sus de ses propres besoins vitaux à gérer, la demoiselle devra aussi faire attention à donner à manger régulièrement à son bébé, sous peine de subir quelques grosses pénalités. Enfin, pour Ollie Starkey, ce sera le gros bourrin de base. Il s’agit d’un ancien soldat de guerre, et ce dernier est donc relativement costaud au corps à corps. En revanche, comme les autres personnages il faudra gérer la faim, la soif et le sommeil, mais le bougre devra aussi faire attention à son diabète, qu’il devra gérer tout le long, sinon il sera moins efficace en combat.
Les mécaniques de jeu sont parfois bien rodées, mais pourries par l’I.A., des combats archaïques, et des quêtes franchement peu inspirées… Regrettable !
Les personnages ont donc des habiletés variées, mais un peu pourries par l’I.A. qui n’aide absolument pas pour l’infiltration, en supplément de son comportement plus que discutable. La réaction de l’I.A. de We Happy Few n’est clairement pas son fort, et est véritablement bien trop aux aguets quand il s’agit du côté infiltration. En effet, il sera pratiquement obligatoire d’y aller finalement en mode bourrin à chaque fois, car l’aspect infiltration est clairement trop brouillon dans chaque situation. Il manque un gros équilibre de ce côté-là, sans compter le comportement des habitants parfois un peu démesuré, alors que l’on fait tout pour justement passer incognito à leurs yeux.
Cependant, on pourra apprécier l’utilisation de la fameuse petite pilule rose qu’est la joy, plutôt intelligente. En effet, elle vous permettra de vous faufiler dans la ville de Wellington Wells sans aucun soucis, sans pour autant faire de mouvements brusques, car les habitants pourraient se mettre en colère contre vous, et vous attaquer. Par contre, si vous en prenez trop, vous pourrez faire une overdose, et les habitants de la ville qui le verront assez vite vous pourchasseront aussi. Ils pourront même remarquer si vous êtes en manque de joy, une fois que vous êtes en pleine descente. La jauge est donc à gérer avec précaution, et c’est une bonne idée de gameplay orchestrée par Compulsion Games, au-delà hélas de cette I.A. beaucoup trop déséquilibrée, parfois peu réactive, et réagissant tantôt de manière disproportionnée, ce qui pourrit clairement les combats.
D’ailleurs, pour les combats justement, ils sont hélas en demi-teinte. Ici, pas question d’avoir des armes à feu, et tout ce qui est parapluie, branche d’arbre, poêle, ou encore hache et matraque électrique, vous servent d’armes pour vous défendre contre les habitants de Wellington Wells ou en dehors. On peut parader, donner des coups, pousser les ennemis pour les faire tomber et tout ça, en faisant attention à la jauge d’endurance. Malheureusement, on verra assez vite des combats terriblement anecdotiques, répétitifs, assez mous, et surtout beaucoup trop brouillons contre plusieurs adversaires en même temps. Cet aspect-là aurait dû être beaucoup mieux peaufiné, tout comme le côté infiltration que nous avons évoqué plus haut, assez mal amené et très mal exploité pour le coup.
Le gameplay est clairement terni par des combats pas vraiment intéressants en somme, tout comme les quêtes, qui manquent un peu de profondeur. Effectivement, si quelques missions secondaires peuvent arriver parfois à sortir du lot, les missions principales quant à elles, sont bien trop génériques pour qu’elles nous marquent au final. Ce sera très souvent d’aller d’un point A à un point B pour rapporter tels ou tels objets à divers PNJs, et puis ce sera globalement tout. Alors bien entendu, tout n’est pas à jeter loin de là, mais il y a vraiment trop peu de quêtes principales et secondaires qui sortent le grand jeu pour que l’on s’en souvienne à tout jamais. Soit dit en passant, pour terminer les trois actes de We Happy Few, il faudra compter entre 15 et 20 heures pour en voir le bout en ligne droite. En attendant le mode bac à sable qui arrivera bientôt, vous pourrez toujours prolonger de plusieurs heures l’expérience We Happy Few en effectuant les très nombreuses quêtes secondaires à disposition.
Une technique en dent de scie
On l’a déjà dit, We Happy Few est vraiment un pur régal en matière de direction artistique. Ce mélange de Dishonored et de Bioshock fait le café, mais techniquement ce n’est clairement pas ça. Alors c’est loin d’être moche graphiquement parlant, mais les textures restent franchement beaucoup trop datées pour se prendre une grosse baffe graphique en fait. On retrouve des textures un peu baveuses, qui manquent de finesses, et on ne comptera pas le clipping à foison et les différents bugs d’affichage que l’on se tape tout le long. Le jeu est néanmoins propre sur PC, mais est terriblement bugué avec des personnages qui passent à travers les textures des bancs par exemple, qui s’élèvent tout seul dans les airs, qui s’enfoncent parfois dans les textures, ou alors l’I.A. qui tourne parfois sur elle-même en phase d’alerte, surtout quand on se dissimule de nos poursuivants. Tous ces bugs entachent un peu l’expérience de We Happy Few, qui est pourtant correct graphiquement, avec quelques animations parfois rigolotes, et quelques effets graphique pas forcément vilains. On pourra aussi souffler sur des arrières-plan floutés, et pas forcément très folichons au passage.
Pour terminer, la bande-son de We Happy Few est littéralement envoûtante du début à la fin. Pas de doute, les divers thèmes musicaux employés transpirent l’Angleterre des années 60, ce qui fait ressortir ce petit côté british plutôt séduisant. On retrouve au passage une V.O. d’enfer, avec des doublages vraiment parfaits, et cet accent british de chaque personnage qui aura le don de nous charmer dès les premiers instants. Hormis quelques bugs de son et des bruitages parfois limites, le sound design fait un sans faute, et on sent le savoir faire de Compulsions Games qui maîtrise complètement son sujet.
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