Ce jeudi 13 février, un studio niçois a décidé d’ouvrir l’accès à leur premier projet : Wolcen : Lords of Mayhem. Financé par sa campagne Kickstarter en 2014, celui-ci a eu le temps de mûrir pendant les quatre ans d’accès anticipé qui ont précédé sa récente sortie. L’équipe s’est agrandie, les ambitions ont évolué, et le jeu a su changer de forme pour s’adapter aux attentes de sa communauté. Qu’en est-il alors de cet hack’n’ slash qui, à l’époque, avait mis en avant la grande liberté offerte aux joueurs et les visuels qu’offrait l’utilisation du Cry Engine 3 ?
Conditions de test : Afin de fournir un test complet, nous avons fais le tour de la campagne solo du titre, puis nous avons passé quelques dizaines d’heures pour explorer le contenu de fin de jeu de Wolcen. Le jeu a été testé sur un PC avec 16 Go de RAM, une RX Vega 56 et un AMD Ryzen 5 2600 cadencé à 3,40 GHz.
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ToggleChose promise, chose due
Les premiers pas dans le jeu sont en effet convaincants, l’utilisation du Cry Engine 3 se ressent tout de suite, et même si les visuels ne sont pas aussi impressionnants que lors de la campagne Kickstarter de 2014, il est en effet difficile de ne pas être satisfait puisqu’il s’inscrit dans un genre dont les grandes sorties commencent à dater.
L’emballage du jeu est alors très propre, et le tout est souligné par des effets visuels vraiment sympathiques en plus d’être accompagnés par un sound-design qui retranscrit très bien l’action et rythme efficacement les combats. Tout ceci a alors le mérite de rendre les affrontements agréables, et ce n’est pas un maigre plus puisque c’est un peu à ça que l’on va clairement occuper notre temps.
En ce qui concerne la personnalisation de son avatar, mis à part pour les cosmétiques qui ne sont vraiment pas en grands nombres, beaucoup d’outils sont mis à disposition afin de configurer le style de jeu de notre avatar comme on le souhaite.
Choix de statistiques, choix de son arme et de ses compétences, sélection des différents modificateurs pour chaque compétence, roue des compétences passives etc… Le jeu ne mentait pas là-dessus. Il est difficile de reprocher à celui-ci de ne pas donner assez de choix au joueur. Pour revenir sur la dernière mécanique de jeu évoquée, la roue des compétences passives, celle-ci se compose en cercles concentriques qu’il est possible de faire tourner individuellement afin d’acquérir les compétences qui nous intéressent. Cette mécanique fait preuve d’une assez grande ingéniosité pour ne pas aiguiller le joueur vers un style de jeu unique lorsque celui-ci commence à investir des points de talents dans cette roue.
Toutes ces mécaniques sont également partagées entre tous les joueurs, puisque ce jeu fait abstraction du système de classes, et dicte les compétences utilisables par les joueurs que par le choix des armes qu’ils équipent. Avec quatre types d’armes différents, vous ne pourrez pas utiliser les mêmes types de compétences si vous vous équipez d’un bâton ou d’une épée et d’un bouclier. Ainsi, puisqu’il est possible de réinitialiser tous les points investis et de changer ses armes, aucun choix n’est définitif et il sera alors possible de personnaliser comme on le souhaite sa façon de combattre.
Le fait également de pouvoir choisir l’apparence de son guerrier parmi une collection d’armure, sans devoir tout modifier à chaque changement de pièces, est assez agréable et on a l’impression de pouvoir contrôler chaque aspect de notre personnage.
La quantité ne fait pas la qualité
Même si le tout a l’air d’être très propre, il n’empêche que le jeu souffre de quelques maladresses ou manque de profondeur sur certains des points évoqués précédemment. Si les combats sont dans la forme très bien calibrés, on pourrait par exemple aborder quelques lenteurs par-ci et par-là.
On a, par exemple, le fait que les actions défensives comme l’esquive ou l’utilisation de potions ne sont pas prioritaires, et mettent parfois un peu de temps à se déclencher. Ces deux actions étant utilisées assez souvent pour une question de vie ou de mort, il sera assez désagréable de se voir périr du fait que ces inputs n’ont pas été pris en charge immédiatement. De plus, puisque tous les personnages partagent les mêmes opportunités et que le choix des compétences dépend des armes équipées, on aurait aimé que le jeu s’offre un plus large panel de compétences par armes.
Enfin, les formes d’apocalypses qui étaient un point fort de la campagne Kickstarter, du fait qu’elles devaient s’adapter au style de jeu du personnage, ont désormais leurs propres compétences et apparences. Celles-ci peuvent alors ne pas bien s’intégrer dépendamment de la façon avec laquelle on a choisi de jouer notre personnage. À noter qu’elles restent cependant très plaisantes à utiliser et simulent vraiment une explosion de force par le protagoniste.
Une narration originale et intéressante
Une chose assez inattendue dans ce jeu, si la plupart des hack’n’ slash ne s’intéressent pas plus que cela à la façon de raconter leurs histoires, Wolcen : Lords of Mayhem a décidé de tirer son épingle du jeu dans ce domaine. Prenant place dans un univers médiéval fantastique opposant humains et démons, on était en droit de s’attendre à une histoire pas très inspirée, agrémentée d’une narration tout à fait classique.
Pourtant un peu d’ingéniosité et d’originalité ont permis à Wolcen : Lords of Mayhem de montrer qu’il était possible de faire quelque chose à ce niveau-là dans un genre qui préfère délaisser cet aspect. Le jeu s’équipe entre autres de plusieurs outils bien sympathiques comme des fenêtres de dialogues apparaissant au milieu ou à droite de l’écran, mais aussi de compagnons qui, au lieu d’être dénués d’intérêt et juste là pour épauler le joueur, sont au contraire bien au centre de l’intrigue. Les quelques moments en leur présence ont alors le bénéfice de faire avancer le fil narratif grâce aux dialogues qui s’installent entre le joueur et ces personnages.
Mais là où Wolcen : Lords of Mayhem fait vraiment mouche, c’est dans la place accordée à son protagoniste dans l’histoire. Ici, nous ne sommes pas un personnage doté de capacités hors normes et sans personnalité qui s’en va sauver un monde déjà en plein désarroi. Notre personnage possède ses propres ambitions, même si elles sont simplistes pour ne pas briser l’identification du joueur à son avatar, et celui-ci possède également des attaches dans ce monde en plus d’être à l’origine des conflits qui vont s’y dérouler par la suite.
Ainsi, le héros n’agira pas de façon désintéressée, celui-ci possédera des objectifs bien plus personnels qui le pousseront à l’action. Conflits personnels et mondiaux vont donc s’entremêler dans cette histoire pour livrer une campagne plus intimiste que ne le faisaient les autres jeux du genre. L’écriture reste cependant assez simple, ne vous attendait donc pas à une grande profondeur pour chacun des personnages, mais c’est tout de même une bonne avancée dans le genre.
De plus les mises en scène travaillées qui prennent place dans les combats de fin de chapitre avec des cinématiques in-game assez nombreuses rythment bien l’histoire qui, sans toutes ces subtilités, ne seraient vraiment pas aussi intéressante à suivre. Le jeu a également su tirer parti du fait que l’histoire se place dans un monde avec tout de même encore un peu de vie à la place du scénario post-apocalyptique classique que nous servent les habituels hack’n’ slash, une légère minorité du bestiaire brille également par son originalité grâce à ce choix.
Un end game réussi ?
Si l’on doit parler du contenu, il est nécessaire de rappeler que le jeu a été en accès anticipé pendant longtemps. Et le end game a pu bénéficier d’ajouts bien sympathiques. Ici, pas question de refaire la campagne en boucle (enfin vous pouvez toujours le faire si vous voulez). Un petit côté gestion viendra vous rendre visite à la fin de la campagne pour mieux rythmer les dernières prises de niveaux de votre personnage.
Puisque la fin du jeu se résumera notamment à parcourir des niveaux générés procéduralement, on s’accommode bien de ce petit côté construction de ville qui s’invite entre deux parcours de donjon, afin de mêler plusieurs boucles de gameplay qui arrivent à relancer l’intérêt du jeu. Vous aurez donc, en plus de parcourir des niveaux afin d’acquérir un meilleur équipement, une ville à gérer et des bâtiments à construire qui vous débloqueront des atouts non négligeables comme un emplacement de compétence supplémentaire.
Le mode exploration, qui est le mode de génération procédurale de donjons, possédera également quelques atouts assez sympathiques. En effet, il sera possible de personnaliser chaque lancement d’une exploration grâce à l’ajout de plusieurs modificateurs. Par exemple, en échange de quelques pièces d’or vous pourrez alors rajouter de la difficulté à vos runs en octroyant des capacités spéciales bien voyantes à vos ennemis afin de rendre l’exploration plus lucrative. Vous pourrez également dépenser d’autres ressources pour inviter des assassins à se mêler de la partie, ou vous débarrasser d’items particuliers pour ajouter du contenu, comme des coffres, dans le donjon.
Toutes ces modifications possibles rendent finalement ce mode exploration assez conséquent et chaque session de jeu sera alors un minimum différente de la précédente. Un minimum oui, car la taille du bestiaire reste un peu limitée, les boss ne sont vraiment pas en grand nombre et vous allez vite faire le tour des différents décors, tirés de la campagne du jeu, qu’il sera possible de parcourir.
Ces similitudes accentuent également le fait que ce mode est au final le seul qui vaille le coup lors du end game. Bien que celui-ci s’arme d’une personnalisation assez poussée, on ne peut s’empêcher d’avoir un sentiment de lassitude après plusieurs dizaines d’heures de jeu passées dessus, au vu du manque d’alternatives proposées par le jeu.
En bref, le contenu end game de Wolcen : Lords of Mayhem est assez plaisant pour un jeu qui vient de sortir, surtout si l’on sait que les hack’n’ slash ont tendance à étoffer cette partie au fur et à mesure de leur développement. On regrette juste la taille limitée des bestiaires et des niveaux qui vont renforcer le fait que l’on tourne un peu en rond à chaque exploration.
Un early access qui est toujours là
Pour ceux qui se seraient approprié le titre dès sa sortie, vous l’aurez remarqué, le jeu est victime de nombreux problèmes depuis sa sortie. Et même si Wolcen Studio travaille activement pur en supprimer le plus possible, cela ne manquera pas d’entacher un peu l’expérience de jeu.
En premier il serait facile d’énoncer les serveurs en ligne qui ont été fermés pendant quelques jours après la sortie officielle du titre. Mais les problèmes ne s’arrêtent vraiment pas là. En effet même si l’emballage est propre (graphisme, visual effects, sound design, narration etc…), les soucis sont tout de même assez nombreux et la liste pour les recenser est elle-même assez longue.
Ces bugs peuvent être plus ou moins embêtants. Cela va des compétences ou des talents passifs qui sont mal traduits en français à la fenêtre d’échange entre joueurs qui ne s’affiche pas à des boss qui deviennent immobiles et invulnérables, ce qui vous obligera à retourner dans le menu principal du jeu pour relancer la partie.
Ces problèmes devraient être réglés et sont, pour une bonne partie, anecdotiques plus qu’autre chose. Mais à force d’accumuler ces petites inconvenances, cela finit par se ressentir dans l’expérience de jeu. Pour les plus agaçants, on note par exemple les boss de campagne qui peuvent bloquer la progression du joueur, ou bien le mode exploration qui souffre de bugs qui pourront bloquer la progression dans le niveau.
En plus de cela, le mode histoire souffre également d’une mauvaise gestion de la progression du joueur, et il faudra quelques fois rejouer dix voire vingt minutes de jeu lorsque l’on relancera celui-ci. Tout ceci pour revenir au même niveau que là où on était avant de fermer le jeu.
En conclusion, en dehors des considérables et nombreux problèmes que Wolcen semble rencontrer depuis son lancement, le jeu reste un bon hack’n’ slash et maîtrise bien son sujet. Il se permet même d’être audacieux dans sa narration avec un protagoniste qui n’est pas une personne vide et sans expression. L’end game et le contenu du jeu ont également bénéficié d’un long développement et d’un fructueux accès anticipé. On aurait tout de même aimé qu’il s’émancipe un peu plus de ses influences pour offrir un bestiaire plus meublé et original et une interface plus personnelle. Il sera intéressant de voir comment ce jeu évolue puisqu’il a le potentiel d’être une bonne alternative aux autres grands jeux du genre.
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