C’est désormais de notoriété publique, nous avons perdu la Seconde Guerre Mondiale. Les nazis et leur supériorité technologique ont pris le dessus sur les forces alliées et ont envahi les États-Unis. Il faut dire que face à des soldats équipés de rayons lasers et d’armure façon prototype d’Iron Man, les valeureux soldats américains n’avaient aucune chance. Le problème pour les nazis, c’est que l’un de ces soldats n’abandonne jamais, William J Blazkowicz dit « Terror Billy ». Vous le connaissez, c’était déjà lui dans Wolfenstein 3D, et bien entendu dans The New Order ! New Colossus reprend pile poil là où le précédent épisode s’arrêtait et nous renvoie casser du nazis pour notre plus grand plaisir.
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Blazkowicz, il vaut mieux ne pas lui baver sur les rouleaux. Le bonhomme est une montagne de force brute, agile et versatile qui sème la terreur au sein des rangs du troisième Reich. L’action est brutale, nerveuse et explosive comme un panzer qui débarque sur le palier un 25 septembre 1939 au petit matin. Manette en main, on domine le champ de bataille par notre vivacité et notre puissance de feu symbolisé par cet arsenal restreint mais au feeling impeccable. Toutes les armes sont plaisantes à jouer, même si on se contentera rapidement du shotgun, l’arme la plus jouissive pour désosser nos ennemis, et du fusil d’assaut efficace de près comme de loin. En fouillant un peu les niveaux on peut tomer sur des pièces permettant d’améliorer ses armes. Ainsi, les balles du fusil à pompe ricochent, le pistolet se voit équipé d’un silencieux, et le fusil d’un double chargeur. Blazkowicz s’améliore lui non pas en dépensant des points de compétences, mais en remplissant des défis (100 headshot, 20 éliminations au corps-à-corps etc…). On retrouve aussi les différents modes de tir, ainsi que la possibilité de porter deux armes en même temps. Si cette dernière empêche de viser avec le réticule, il n’y a rien de plus jubilatoire que de sprinter dans les rangs nazis avec deux shotgun dans les mains. C’est dans ce genre de moment, qui arrivent plutôt dans la deuxième partie du jeu, qu’on se sent vraiment comme le Terror-Billy.
Via un flash-back au tout début, on doit à nouveau choisir entre Wyatt et Fergus. En fonction du survivant, on aura soit une arme basée sur l’électricité, soit sur le feu. Dans les deux cas, l’arme est originale et permet de varier un peu les plaisirs. On a aussi accès à plusieurs armes lourdes que l’on récupère sur certains ennemis. Ces dernières sont extrêmement efficaces, mais réduisent grandement la mobilité faisant de nous une cible facile. Il faudra donc les utiliser à bon escient et ne pas hésiter à rapidement s’en débarrasser pour sauter sur une trousse de soin à proximité. Les points de vie atteignent un maximum de 200 avec un système de surcharge. Passé le cap des 50, elle descendra automatiquement jusqu’à retomber à son palier. On pourrait croire qu’il faut donc utiliser les trousses avec parcimonie, mais la réalité est qu’il n’y a pas de meilleur moment pour ramasser de la vie que l’immédiat. La mort est très vite arrivée, déjà parce que les ennemis tapent sacrément fort par moment, mais aussi parce que quelques petits soucis de feedback font qu’on ne se rend pas toujours compte de la quantité de vie que l’on vient de perdre. D’ailleurs, pour ramasser armures, vie et munitions, il est impératif d’appuyer sur une touche correspondante. Passer sur les objets ne suffit pas, ce qui donne lieu à des game over évitables et frustrants, surtout que sur la version console, ramasser et recharger correspondent au même bouton…
Deutsche Qualität
The New Colossus reprend aussi la construction de son prédécesseur. Des niveaux courts et nombreux, rythmés par des zones remplies d’ennemis et d’un ou plusieurs commandants qu’il faudra éliminer en premier pour éviter qu’il ne sonne l’alarme. On a ainsi la possibilité de se la jouer plus discret avec notre silencieux et nos fidèles hachettes. Ah, ces hachettes, elles nous font le bonheur de nous assister dans toute nos éliminations au corps-à-corps, tranchant les membres de nos victimes comme si c’était des mottes de beurre. On peut aussi les lancer pour éliminer en silence un garde un peu trop apathique. Malheureusement l’infiltration soulève un gros défaut du jeu, son IA. Cette dernière est totalement à la ramasse, capable de nous tuer en quelques balles avec la précision de Frederick Zoller, mais également capable de courir dans tous les sens sans jamais trop savoir où se planquer. Si cela n’est pas toujours problématique pendant les phases d’action (encore que l’immersion en prend un coup), l’infiltration souffre énormément de ce problème. On est régulièrement repéré sans jamais comprendre pourquoi ni comment, par un soldat de l’autre côté du mur de Berlin, alors que les autres enjambent les cadavre de leur collègue comme si de rien n’était.
Heureusement le level design a été revu pour le meilleur. Fini les couloirs et les menaces arrivant uniquement de front, ici nous sommes dans des zones plus larges, plus ouvertes et avec plus de verticalité, forçant à gérer les hordes de nazis qui arrivent dans tous les sens. Les situations sont très variées et même si on passe pas mal de temps dans des bunkers et autres sous-terrains, certaines séquences vraiment mémorables suffisent à renouveler le gameplay. Le titre n’atteint jamais le niveau d’un Doom et de ses arènes calibrées au pixel, mais il mérite tout de même sa médaille d’honneur. Ainsi, que l’alarme retentisse n’est plus vraiment un problème tant on a envie de foncer dans le tas armes à la main. On pourra se forcer à la jouer fine avant de se rendre à l’évidence, on ne prend son pied que quand le jeu envoie la sauce. On regrettera tout de même quelques checkpoints un peu hasardeux qui ont la fâcheuse tendance à nous planter au milieu d’une salle remplie d’ennemis, de quoi passer un petit moment à essayer de se sortir de vilaines situations. On peut aussi pester sur la navigation dans les niveaux les plus ouverts. Pas toujours pratique, la faute à un marqueur d’objectifs qui apparaît uniquement quand il en a envie. On perd donc quelques minutes à faire le tour du niveau à la recherche de la porte à ouvrir, l’échelle à monter ou le levier à actionner.
« Tous les allemands ne sont pas nazis »
Si vous ne l’aviez pas encore compris, Wolfenstein n’est pas un jeu à mettre entre toutes les mains. Outre sa violence graphique très prononcée, il n’est pas avare en langage fleuri. Sa galerie de personnages hauts en couleur donne lieu à des scènes aussi déjantées que perturbantes. La grande méchante de l’aventure marque à chacune de ses apparitions par sa folie sans limites, son sens du spectacle et son patriotisme inflexible. L’équipe de New Order est de retour et voit l’arrivée de nouvelles têtes dont Grace, new-yorkaise dur à cuire meneuse de la résistance antinazie de Manhattan. Une forte personnalité qui sous ses faux airs d’archétype dissimule un personnage bien plus nuancé qu’elle n’y paraît, en témoigne un formidable monologue sur les horribles événements qu’elle a vécus. Autre nouvelle tête, Sigrun Engel, fille de la grande méchante, dont la destinée réserve bien des surprises. On pourrait aussi revenir sur notre héros en personne, l’aryen parfait, grand, fort, blond aux yeux bleus, qui représente pourtant le visage de l’horreur pour les soldats nazis.
Ces personnages sont mis en scène dans les nombreuses cinématiques qui rythment le jeu, mais aussi dans des petites scénettes qui prennent place au sein du QG. En se baladant un peu dans les couloirs de notre sous-marin, on voit nos colocataires vivre, discuter, interagir entre eux. Parfois, c’est un simple mouvement qui en dit long, parfois c’est un débat enflammé qui dure plusieurs minutes. Dans tous les cas, ces moments brisent la monotonie de ces niveaux sans réel intérêt si ce n’est de développer les personnages. Ces fortes têtes ne seraient rien si leur incarnation vocale n’était pas au niveau. Fort heureusement, en VO comme en VF (mais surtout en VO), le travail réalisé sur les doublages force le respect. Ces derniers se hissent sans problème parmi les meilleurs de leur catégorie avec des acteurs impliqués à 200% et parfaitement dirigés. Assurément l’un des meilleurs arguments du jeu.
Le scénario : escale à Nanarland
Les talents d’écriture du studio transparaissent dans les personnages mais aussi dans un scénario plus subtil qu’il n’y paraît. C’était déjà l’une des forces de The New Order, c’est encore plus vrai ici. L’histoire est capable de nous arracher une larme quand Machine Games offre à son héros un background à la mélancolie insoupçonnée et bienvenue, compté par des scènes émotionnellement très fortes qui déconstruisent l’image du héros pour mieux justifier ses motivations. Puis dans la scène suivante, il vire à la série B la plus totale avec des séquences aussi absurdes que pleinement assumées. Le jeu tend progressivement vers le grand n’importe quoi qui provoquera plus d’un fou rire tant l’humour est bien senti (outre quelques blagues graveleuses qu’on aurait pu éviter). Les dialogues oscillent entre le Tarantino et les films de Martin McDonagh, parfois franchement cru mais parfois plus fin.
Dans sa première moitié, Wolfenstein jongle entre ces moments plus sombres incarnés par un Blazkowicz affaibli, fatigué aux allures d’un antihéros signé Frank Miller. Mais progressivement, le côté nanardesque prend le dessus et le titre fini dans une fanfare de nawak nous collant un gigantesque sourire aux lèvres qui peine à retomber à l’écriture de ces lignes. Il n’y a qu’à voir le traitement du Ku Klux Klan qui n’a pas été ridiculisé comme ça depuis un certain Django Unchained, il est ici réduit au rang de sous-traitant des nazis. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les seules cibles autres que les nazis sont les membres du Klan. The New Colossus change de ton avec habileté et cache bien des choses sous une grande couche de n’importe quoi, finalement très cohérente avec l’univers du titre, qui nous réserve de grands moments de jeu vidéo.
Les graphismes : c’est beau, c’est boche
L’avantage de travailler avec Bethesda, c’est que Machine Games a pu mettre la main sur l’utraperformant id Tech 6. Le moteur d’idSoftware utilisé sur le magnifique (je ne le dirai jamais assez) Doom 2016 fait à nouveau des merveilles. Mon petit cœur de Pciste a souffert à la découverte de la clé console reçue de l’éditeur, mais dès les premières minutes j’ai été rassuré. Premièrement, le titre tourne sur un 1080p et 60fps très solide uniquement mis à mal à quelques rares occasions (non handicapant). En résulte une action toujours plus nerveuse qui profite pleinement de ce taux de rafraîchissement élevé. Mais le moteur permet surtout de profiter de graphismes parmi les plus beaux sur la marché actuel. Le jeu met à mal de très nombreux concurrents avec de superbes effets visuels, des modèles détaillés et des animations fines et crédibles. Une nouvelle preuve que les consoles actuelles sont capables de solides performances pour peu que l’on se donne le mal d’essayer.
Pour accompagner la brutalité des images, qui de mieux que ce grand malade de Mick Gordon à la musique ? Déjà à l’œuvre sur The New Order, depuis propulsé comme nouvelle star du milieu grâce à l’incroyable bande-son de Doom (encore lui), ses guitares stridentes et rythmes saturés accompagnent parfaitement les coups de feu et la fumée des canons. On regrettera un mixage audio qui relègue certains morceaux au troisième plan de façon assez incompréhensible, mais rien qui ne nous empêche de profiter du talent du monsieur.
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