C’était au cours de la Gamescom 2022 que Noname Studios avait dévoilé son tout premier jeu. Intitulée Worldless, la création indé du studio espagnol, via ses premières images, inspirait tout de suite de bonnes choses grâce à ses visuels charmants et une musique envoûtante. Mais tout comme son univers, bien des mystères s’en dégageaient et il était particulièrement excitant d’attendre de mettre la main dessus. Disponible le 21 novembre sur tous les supports majeurs, Worldless compte nous offrir une aventure pas comme les autres où se rencontrent metroidvania et combats au tour par tour. Est-ce que l’expérience vaut le détour ? Réponse à la fin de ce test.
Conditions de test : Nous avons joué à la version PS5 de Worldless durant 12 heures, le temps d’arriver aux crédits de fin et de collecter un maximum de fragments. 6 heures ont été effectuées en version 1.001.000, et les 6 autres ont été faites en 1.002.000. Un crash persistant nous a empêchés d’affronter l’un des boss optionnels du jeu.
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ToggleUn univers commun à aucun autre
Empli de mystères alors, ce Worldless ? Assurément. À partir du tout début et une cinématique d’introduction aussi silencieuse que captivante, on distingue rapidement au sein de quel monde on se trouve. Ou plutôt, au sein de quel monde on ne se trouve pas. Ici, point de longues tirades sur l’affrontement du bien contre les forces du mal, seules quelques lignes nous situent très légèrement le contexte dans lequel nous allons évoluer. Depuis la nuit des temps, des forces opposées se confrontent les unes aux autres. Des sortes d’entités aux énergies bleues et oranges semblent donc lutter de manière instinctive et prédestinée.
Pourquoi ? Dans quel but ? Jusqu’à quand ? Les questions se multiplient au fil de nos premiers pas. Une chose est sûre, à l’issue de ces confrontations, la force gagnante voit sa nature préservée ou altérée. Un changement dont découle souvent une transformation voire, dans le pire des cas, la résultante d’une dangereuse instabilité. Ce cycle, voué à perdurer, voit pourtant une entité bien particulière en émerger. De nature bleue, c’est celle-ci que l’on va incarner tout au long du jeu, à la recherche de la transcendance.
Le premier objectif nous est clairement destiné personnellement : comprendre le monde qui nous entoure. Et à part une autre entité bien différente de notre avatar, les occasions de dialoguer n’existent pas. Sa manière de s’adresser à nous par des phrases toutes aussi énigmatiques n’arrange pas tout à fait les choses. Aux commandes de notre petite lueur sur pattes, on se fie alors à notre instinct et l’on suit le seul chemin possible. Ces premières minutes nous confirment donc un choix clair des développeurs : les joueuses et joueurs de Worldless ne sont pas vraiment pris par la main.
Un peu perturbé par ces débuts, on devient ensuite intrigué par la manière dont on progresse. L’originalité du titre de Noname Studios s’articule autour de deux axes de gameplay. Inspirée des metroidvania, l’aventure prend d’abord l’apparence d’un jeu de plateforme où l’on explore des zones tout en gagnant petit à petit en mobilité. Ces zones étant interconnectées, ce que l’on n’a pas pu fouiller dans un premier temps peut l’être en revenant plus tard via les traditionnelles phases de backtracking.
Un système de combat original…
Entre ces séquences de plateformes, on participe à des affrontements contre des êtres tout aussi étranges que le décorum global. Le système de combat fonctionne sur un modèle de tour par tour, dynamisé par une exécution en temps réel. Concrètement, entre nous et l’ennemi, c’est chacun son tour, puis quand vient le nôtre, on dispose d’un temps limité pour se battre, correspondant à l’écoulement d’une barre.
En phase offensive, on use d’attaques physiques ou magiques. En séquence défensive, on se protège des mêmes attaques. Notre avatar est en mesure de parer tous types de dégâts grâce à une membrane. Seulement, il faut appuyer sur le bouton correspondant au type d’attaques que l’on s’apprête à subir. Autrement dit, on pare les dégâts physiques avec une touche et les dégâts magiques avec une autre.
Heureusement, des traits lumineux nous indiquent, selon s’il s’agit d’un trait vertical ou horizontal, la nature de l’attaque à venir. Problème, se protéger des attaques ne dure pas indéfiniment, et notre bouclier finit par se briser en cas d’assauts répétés au fil des tours. Mais là où la protection gagne en piquant, c’est qu’en appuyant sur le bon bouton avec un timing parfait, on préserve la résistance de la membrane.
Défensivement, le système de combat, simple en apparence, témoigne d’une certaine exigence afin de le maîtriser et prendre un minimum de dégâts. Et il en va de même du côté des attaques. Pour l’expérimenter, il faudra d’abord débloquer des mouvements que l’on obtient par ce qui représente la vraie curiosité de Worldless : la mécanique d’absorption. Le titre de Noname Studios héberge un arbre de compétences. Jusque-là, rien de bien nouveau, nous sommes d’accord. La spécificité se situe dans la manière d’acquérir les capacités de cet arbre.
Lorsque l’on combat un ennemi, la victoire s’obtient en réduisant sa santé à zéro. On peut ainsi reprendre sa route et continuer à progresser dans la zone. Cependant, il ne s’agit pas d’une véritable victoire puisque celle-ci n’intervient que si l’on parvient à absorber ledit ennemi. À sa jauge de santé s’ajoute alors un réservoir. Une fois passé un certain seuil, ce dernier offre l’opportunité de saisir l’ennemi et de l’assimiler en participant à une brève session de QTE où l’on doit rentrer la bonne séquence en quelques fractions de secondes. Plus le réservoir est rempli, plus il est facile de rentrer la séquence. Sinon, il faut tenter au hasard l’une des quatre touches possibles en espérant que ça rentre. Mais encore une fois, le délai s’avère très court.
… Révélant une certaine exigence
Cette mécanique donne un intérêt fou aux combats, où l’on essaye d’absorber chacun des adversaires rencontrés. Surtout que presque chaque ennemi impose de réfléchir à une stratégie de combat bien particulière, nécessaire à leur assimilation. Certains afficheront une santé faible, ce qui implique d’optimiser nos attaques d’absorption et d’infliger un minimum de dégâts. Ou bien il faut jouer avec les affinités élémentaires. Soit en appuyant sur ses faiblesses et ainsi le rendre vulnérable, soit au contraire en soignant notre assaillant afin de le garder en vie histoire de pouvoir l’absorber.
Car oui, il n’y a pas que notre avatar qui peut se protéger. Il est souvent demandé d’infliger des types d’attaques bien précises afin de briser leurs barrières et de faire monter plus rapidement leur réservoir. Or parfois, les ennemis seront immunisés aux types d’attaques demandées pour fracturer leur bouclier. Il faut donc trouver une autre manière de booster leur jauge d’absorption. D’autres ne disposeront même pas de barre de vie, et nécessiteront parfois une exécution parfaite des mouvements défensifs ou offensifs avant de pouvoir déclencher une assimilation.
À cela s’ajoutent donc les fameuses compétences que l’on obtient en réalisant ces absorptions. Des combos supplémentaires, des bonus de dégât classiques ou d’absorption basés sur le timing de pression de touche, l’augmentation de notre délai de tour sous différentes conditions ou encore la possibilité de lancer des super attaques, les cordes à notre arc s’ajoutent à vitesse grand V. Le gameplay combat fait donc preuve d’une simplicité dans les faits, bien qu’il soit peu évident à assimiler au départ, et démontre une certaine richesse dont découle moult situations distinctes.
Une bonne partie des affrontements reste optionnelle, ce qui est d’autant plus vrai au niveau de l’assimilation des adversaires. Mais si l’on désire se frotter aux opposants les plus retors, semblables à des boss, il va falloir s’y présenter équipé et motivé. Ces boss nécessitent bien entendu une stratégie de combat bien précise, et user des meilleurs timings s’avère presque obligatoire pour s’en sortir. D’autant que, à chaque dégât subi de notre part, le réservoir d’absorption de l’adversaire baisse. Et notre vie n’étant pas illimitée, il faut garder les nerfs solides lorsque l’on accuse trop de fausses notes. Heureusement, il est possible d’abandonner le combat dans le cas où les hostilités seraient mal entamées.
Les boss représentent donc souvent les moments où « essayer, mourir, recommencer » rythme notre expérience de jeu. Remarquez, mourir, pas vraiment, puisque l’on revient juste avant le combat sans écran de game over, mais vous comprenez l’idée. Hélas, cette hausse de challenge offre une balance entre satisfaction et frustration où l’équilibre n’est jamais atteint, et il est aussi plaisant de triompher qu’il est tentant d’abandonner très vite. De la profondeur à une sensation de complexité punitive, il n’y a qu’un pas, et tout le monde ne risque pas d’y adhérer. Au moins, il s’agit d’un sentiment que l’on ne ressent pas vraiment durant les phases d’exploration, l’autre moitié du jeu.
Seul au monde
Un peu perçue comme une longue respiration entre les combats, la partie plateforme s’apprécie, d’une manière générale, calmement. Pas de dangers ni de pièges à proprement parler, on évolue au milieu des superbes environnements conçus par les développeurs. Chaque zone apporte son identité graphique avec sa pointe de minimalisme, son architecture, sa palette de couleurs et sa végétation. Et si les musiques sont un poil plus épiques durant les combats, elles laissent place à davantage de douceur en se baladant. On se laisse porter par des sonorités ambiantes fort agréables, servant complètement l’atmosphère sidérale et mystérieuse de l’univers de Worldless.
Une ambiance que l’on apprécie au fil d’une exploration qui se veut rétributive auprès des plus minutieuses et minutieux. En fouillant les zones que l’on traverse, il arrive de tomber sur des fragments neutres boostant nos capacités mais également des fragments colorés qui, à l’instar de ceux récupérés via une absorption, améliorent nos compétences de combat. En apprenant de nouveaux mouvements au fil de l’histoire, les secrets se dévoilent de plus en plus et certains s’avèrent plutôt bien cachés, quand on devine ce qu’il faut faire pour les récupérer. En effet, cette manière de ne pas trop nous prendre par la main se ressent également pas mal durant ces phases de jeu.
Bien observer l’environnement et ses points d’intérêt étranges, en testant un petit peu tout ce qui nous passe par la tête, est la clé pour comprendre certaines petites énigmes. À plusieurs reprises, on se demande bien à quoi sert cette stèle, ou encore comment faire naître cette fleur qui nous donnera un fragment neutre une fois éclose. Jusque dans son exploration, Worldless appuie donc à nouveau sa fibre cryptique. Simplement, on aurait aimé que la difficulté pour se repérer ne participe pas à la partie brumeuse du jeu. Avec un système de carte s’inscrivant lui aussi dans un minimalisme esthétique, il le fait au détriment de la lisibilité.
Chaque portion de zone forme un point sur la carte en stipulant si le fragment coloré de la zone a été récupéré ou non, et ces points s’accompagnent d’une vague idée sur la manière dont les portions sont reliées entre elles. L’affichage manque donc clairement de précision, et lorsque l’on sait qu’à tel endroit il nous manque quelque chose, il est souvent difficile de bien délimiter notre champ de recherches. Sans mécanique de voyage rapide digne de ce nom, les allers-retours nous font alors un peu souffler du nez. Toutes les zones disposent bien d’un portail d’accès, mais c’est tout. Il est assez dommageable d’avoir conçu l’exploration de cette façon, en sachant que le jeu semble réserver une part importante au contenu optionnel.
Il s’agit d’ailleurs d’un point que nous n’aurons pas pu vérifier pleinement, en raison d’un crash survenant systématiquement avant l’un des boss optionnels, bloquant vraisemblablement l’accès au challenge le plus dur du jeu. On imagine donc ce dernier plutôt ardu, comparativement à ce que l’on a pu expérimenter auprès de certains ennemis. Un souci technique auquel on rajoutera quelques faux départs au lancement du jeu, en restant bloqué sur un écran noir, nous obligeant à le relancer. De rares hics techniques dont les développeurs sont conscients, et sur lesquels ils ont déjà travaillé en déployant un premier patch avant la sortie. On espère qu’au lancement tout sera réglé afin que le public puisse profiter à 100% de cette belle aventure.
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