Avec Genshin Impact, HoYoverse est parvenu à instaurer une nouvelle norme dans le marché des free-to-play qu’il est difficile de concurrencer. A vrai dire, seul le studio lui-même arrive à faire jeu égal avec son jeu puisque Honkai Star Rail, lancé l’année dernière, réalise lui aussi des chiffres qui donnent le tournis à tous les autres gacha du marché. Peut-il renouveler l’exploit une troisième fois avec Zenless Zone Zero ? Rien n’est encore sûr si ce n’est que ce nouveau titre part avec des bases solides et un style rien qu’à lui, lui permettant d’éviter d’être le jeu de trop pour le studio.
Conditions de test : Nous avons joué 25 heures à la version PS5 et PC du titre, après avoir essayé ses différentes bêtas.
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TogglePlus qu’une copie urbaine
Même en passant d’un jeu d’aventure en monde ouvert à un RPG plus fermé avec des combats au tour par tour, HoYoverse est resté dans ses chaussons en passant de Genshin Impact à Honkai Star Rail. Avec Zenless Zone Zero, il se permet de sortir de sa zone de confort. Ne vous y trompez pas : la formule du studio se retrouve partout, engloutie derrière des menus stylisés et une autre structure, qui peine vraiment à cacher le fait que la progression dans l’avancée des personnages reste la même d’un jeu à un autre. Mais derrière ce squelette qui est plus ou moins le même, Zenless Zone Zero reste le jeu le plus audacieux du studio. Ou du moins celui effectuant un vrai pas vers l’inconnu.
Et cela passe avant tout par le style. L’univers se veut très pop et coloré, urbain, d’une telle manière qu’il est impossible de faire l’impasse sur une comparaison avec Persona 5. Zenless Zone Zero a beau avoir une patte plus fantaisiste avec des animaux anthropomorphes et un aspect science-fiction plus prononcé, l’énergie globale qui s’en dégage est similaire à celle du JRPG d’Atlus.
Il suffit d’aller faire un tour dans les ruelles de la Nouvelle-Eridu – la mégalopole servant de décor principal – pour vite s’en rendre compte. Le quartier dans lequel évoluent nos deux héros, Wise et sa sœur Belle (vous choisissez l’un des deux en tant qu’avatar), renvoie directement à l’esthétique des petites rues japonaises avec des commerces de proximité et une architecture semblable. Cette inspiration se retrouve également au sein des menus très stylisés du jeu, qui font encore une fois écho au design des Persona, mais aussi dans le choix de l’ambiance musicale qui va souvent lorgner sur le jazz ou le lo-fi, quand elle ne se permet pas quelques écarts vers le hip-hop.
Mercenaires de Proxymité
Et la comparaison s’arrête là. Pas question d’aller voler le cœur des gens ici, mais plutôt d’effectuer un petit boulot de gérant d’un vidéoclub. En apparence, car les deux protagonistes sont aussi connus sous le nom de Phaethon, un Proxy légendaire capable de s’aventurer sans danger dans les failles appelées Néantres qui sont apparues dans toute la ville. Des endroits infestés par la corruption, où il ne faut pas rester trop longtemps, ne serait-ce que pour éviter de croiser quelques monstres. Plutôt que d’effectuer le sale boulot eux-mêmes dans ces Néantres, nos protagonistes envoient des Agents sur place, bien plus aguerris au combat, qu’ils peuvent guider sur le terrain via un Bangbou, sorte de peluche lapin robotisée (absolument adorable) qui sera les yeux de Phaeton.
C’est suite à l’apparition d’une IA mystérieuse et d’un hack de leur compte que nos héros vont se lier d’amitié avec toutes sortes d’Agents pour résoudre plusieurs histoires plus ou moins intéressantes au sein de ces failles. Comme dans ses précédents jeux, HoYoverse met un point d’honneur à constituer un lore béton, appuyé par une galerie de personnages très expressifs et immédiatement attachants. Le problème reste cependant le même que dans Honkai Star Rail, et dans une moindre mesure Genshin Impact.
En nous assénant des informations plus ou moins captivantes, le jeu nous submerge rapidement et en perd son rythme. Zenless Zone Zero tente de combler cela en variant sa narration puisqu’il alterne entre des phases de dialogues statiques, des séquences façon BD et des cinématiques qui en mettent (vraiment) plein les yeux, mais le cocktail ne prend pas forcément et on a du mal à s’intéresser à la suite de l’histoire de nos deux Proxys. Ce n’est que le début et le studio a déjà montré qu’il pouvait se planter au lancement pour se reprendre en main par la suite (Honkai Star Rail en est le meilleur exemple). L’humour et le second degré très présents rendent également tout cela moins lourd. L’espoir reste donc là, surtout dans la mesure où le casting fait mouche.
C’est aussi sur ce point que HoYoverse est sorti de sa zone de confort. Là où les personnages de Genshin Impact et Honkai Star Rail (et donc Honkai Impact 3rd) sont presque des miroirs avec un chara-design très similaire, Zenless Zone Zero présente des Agents vraiment uniques, avec des morphologies et des apparences très différentes.
Vous ne retrouverez pas un ours comme Ben dans les autres jeux du studio, ni même un loup habillé en majordome comme Lycaon. Le studio a plutôt choisi d’aller piocher ses influences ailleurs, parfois en Occident en s’inspirant par exemple de Deadpool pour le personnage de Billy Kid. Un rapprochement que l’on effectuera rapidement grâce à l’expressivité du personnage (pourtant muni d’un casque), ce que l’on doit à des animations qui forcent le respect. Elles sont volontairement très appuyées et exagérées à la manière d’un film d’animation, de quoi donner un peps considérable à ce qu’il se passe à l’écran. Après tout, la mise en scène n’a jamais été le point faible du studio.
Davantage triple-A que triple-Z
Cette animation, on s’en délecte aussi lorsqu’il s’agit de passer à l’action. Le cœur du gameplay de Zenless Zone Zero repose dans son système de combat, dans lequel on contrôle une équipe de trois personnages se relayant à tour de rôle, avec des mécaniques très simples sur le papier. On retrouve un seul bouton d’attaque, un de compétence et un pour déclencher une capacité spéciale après avoir réuni les conditions nécessaires.
Cela n’est complexifié – et c’est un bien grand mot – que par un système d’esquive et de parade très satisfaisant, qui nous demande de changer de personnage avec le bon timing pour bloquer l’attaque ennemie et contre-attaquer avec l’agent qui entre sur le terrain. Le tout avec un des plans de caméra qui dynamisent l’ensemble et une sensation d’impact grisante.
Le but est ensuite de faire grimper une jauge d’étourdissement pour que nos personnages puissent enchaîner les attaques en relais. Classique, mais d’un dynamisme à couper le souffle. On retrouve ici quelque chose d’assez similaire à Honkai Impact 3rd, avec des effets encore plus flashys. C’est immédiatement compréhensible, immédiatement simple à prendre en main, immédiatement amusant.
L’une des seules dimensions un tant soit peu stratégique vient de la composition de notre équipe, à laquelle vient se greffer un Bangbou contrôlé par IA, apportant quelques effets de soutien. Chaque personnage a vraiment son style à lui avec un rôle qui peut varier d’un Agent à un autre (on retrouve le triptyque Main DPS – Sub-DPS – Soutien) mais le feeling reste bon peu importe qui vous choisissez. Que ce soit avec Lycaon se la jouant Sanji de One Piece ou avec Nekomata qui bondit partout sur le terrain, en passant par Ben assommant tout le monde avec un pilier bétonné, on prend beaucoup de plaisir à essayer tout le monde pour trouver ce qui nous convient le plus.
La loi du gacha ne change pas
Encore faut-il avoir le choix. Car Zenless Zone Zero reste un gacha, qui se montrera impitoyable chez les uns ou très généreux chez les autres selon la chance de chacun. Les mécaniques sont ici copiées collées des autres jeux du studio avec seulement un personnage de Rang S (la rareté la plus élevée) qui tombe obligatoirement au bout de 90 tirages, ce qui ne s’effectue pas en un jour, sauf en profitant des récompenses au lancement.
Aucun changement n’est à noter sur ce point si ce n’est que dans cette version 1.0, le casting de base est de taille raisonnable et qu’il y a donc plus de chance de tomber sur le personnage souhaité (en théorie). On ne se refait pas et ce système est visiblement le mal nécessaire pour avoir droit à un free-to-play de cette qualité.
On notera néanmoins que HoYoverse a su prendre en compte les critiques émises sur les bêtas du jeu pour revoir certains aspects, qui auraient rendu ce modèle économique étouffant. Avant, chaque mission demandait de l’énergie, une ressource se rechargeant avec du temps ou en utilisant notre monnaie in-game (en plus d’autres objets). C’est le cas dans beaucoup de free-to-play sur mobiles, mais pour un jeu de l’envergure de Zenless Zone Zero, ce n’était pas envisageable. Même les précédents jeux du studio n’osaient pas cela. Le tir est heureusement corrigé dans la version finale et ce n’est pas le seul élément qui a été pris en compte.
Lorsque l’on ne combat pas au sein des arènes très fermées des Néantres, on contrôle Wise/Belle à travers la Nouvelle-Eridu pour naviguer entre les différentes missions et les nombreux marchands. HoYoverse a tenté de rendre ces phases ludiquement plus intéressantes en y ajoutant des énigmes et des coffres à dénicher, dans la pure tradition de ses autres jeux. On regrette cependant que tout soit encore très étriqué même si certains apprécieront d’avoir une proposition plus digeste.
TV, TV, TV, TV…
Le studio a aussi voulu s’attaquer à ce qui avait été le plus pointé du doigt lors des bêtas : son système de commission. Dans la plupart des missions que vous allez effectuer, vous ne contrôlerez pas toujours vos Agents au sein des décors, souvent balancés d’arène en arène. L’exploration prend ici la forme d’une grande grille de télévisions, sur laquelle on se déplace case par case. Une sorte de labyrinthe 2D qui change au gré des missions, avec des cases spéciales et des mécaniques pouvant différer d’une quête à une autre. Il faut plutôt les voir comme des puzzles.
Parfois, on doit simplement trouver la sortie en actionnant les bons mécanismes, tandis qu’une autre mission pourra nous afficher des TV de couleurs différentes avant de répondre à un quiz… Les exemples sont nombreux et si, d’apparence, ces phases se ressemblent toutes, la manière de les aborder n’est pas la même. Comme lorsqu’on l’avait souligné durant la bêta, l’idée est bonne. L’exécution est plus pénible.
Si ces puzzles étaient une composante accessoire du jeu, ils ne poseraient pas problème. En s’insérant dans les missions, notamment les quêtes liées à l’histoire de nos Agents, elles cassent complètement le rythme. Comment avoir envie de passer 5 minutes à naviguer entre toutes ces TV si on ne nous donne que 30 secondes de combat derrière ?
Le studio a essayé de trouver un meilleur équilibre tout en ajoutant une fonctionnalité d’avance rapide, mais ce n’est pas encore idéal. On préférera donc se ruer sur des défis qui font complètement l’impasse sur cela et qui laissent un peu plus libre cours à l’exploration au sein des décors. C’est ici très linéaire et ça ne dure encore que quelques minutes (car le jeu a conscience qu’il ne peut pas nous demander trop de temps quotidiennement), mais c’est plus satisfaisant. Encore faut-il accepter de visiter les mêmes arènes, encore et encore.
Une routine de plus dans le cercle HoYoverse
Les défis dits « endgame » comme la Néantre Zero tentent de rendre ce mariage plus heureux en ajoutant une composante rogue-lite, avec des cartes à choisir durant notre parcours pour renforcer notre équipe (il s’agit de la même chose que l’Univers simulé de Honkai Star Rail et des Abysses de Genshin Impact). Et il est vrai que c’est plus digeste, sans doute aussi parce que l’aspect énigme est un peu mis sur le côté pour offrir quelque chose de plus direct.
On en vient alors à se demander si la boucle de gameplay de Zenless Zone Zero a des bases assez solides pour espérer un meilleur avenir. Passé le plaisir de la découverte et des bonnes sensations offertes par le système de combat, la routine dans laquelle on s’engage n’offre pour l’instant que peu de variété. On compte évidemment sur HoYoverse pour ajouter tout un tas d’événements au fil des mises à jour.
En l’état, une fois passé le niveau 30 de notre Proxy et la découverte d’un nouveau quartier aux faux airs de Shibuya, les choses commencent à devenir trop répétitives. Le potentiel reste là et on compte sur le studio pour écouter sa communauté. En regardant ce qu’il se passé sur Honkai Star Rail, on y croit.
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